Généalogie génétique2024-03-18T07:41:30+01:00Bernardurn:md5:27a7020e33c8b33757a3207ee2825750DotclearAscendance des steppes dans l'ouest de l'Eurasie et diffusion des langues germaniquesurn:md5:35ef1ef99830f851323885f3a9a820872024-03-16T14:52:00+01:002024-03-16T18:31:05+01:00Bernard SécherADN ancien <p>La diffusion de l'ascendance des steppes il y a environ 5000 ans est supposée être à l'origine de la diffusion des langues Indo-européennes. Dans le nord de l'Europe, les langues germaniques constituent une composante importante du paysage linguistique avec les langues balto-slaves et Finno-ougriennes. Dans cette région, la culture Cordée incluant les cultures des haches de combats et des sépultures individuelles, et la culture campaniforme ont été supposées être le vecteur de l'introduction des langues germaniques. Cependant un délai important de deux ou trois millénaires existe entre ces premières cultures et les premiers écrits runiques de langue germanique datés des premiers siècles de notre ère. Ainsi on ne peut exclure que des changements démographiques inconnus soient à l'origine du paysage linguistique actuel de l'Europe du nord. Durant la fin du Néolithique et l'Âge du Bronze, on ne connait rien de la distribution géographique des ancêtres des populations germaniques. Cependant, des emprunts aux langues celtiques et finno-ougriennes sont supposés avoir été faits à la fin de l'Âge du Bronze suggérant la localisation de ces populations à cette époque.<br />
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L'Âge du Fer de l'Europe du nord (entre 2800 et 1575 ans) et la période des grandes invasions (entre 1575 et 1200 ans) sont caractérisés par une série d'événements importants comme la démocratisation de l'utilisation des métaux, l'avènement et la chute de l'empire Romain, et les grandes invasions. Ces événements sont associés à des changements linguistiques importants qui ont abouti au paysage linguistique actuel de l'Europe. On suppose que des populations parlant une langue proto-germanique ont vécu dans le sud de la Scandinavie et le nord de l'Allemagne durant l'Âge du Fer et la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Culture_de_Jastorf" hreflang="en">culture de Jastorf</a>. A la fin de cette période, ce langage s'est scindé en trois: le germanique de l'est, le germanique du nord et le germanique de l'ouest. Ce processus a coïncidé avec la chute de l'empire romain d'occident et des phases d'expansion de ces langues vers le sud avec les grandes invasions.<br />
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Les germaniques de l'est sont représentés principalement par les Goths, acteurs principaux de la fin de l'antiquité. Ils se sont installés en Europe du sud-est il y a 1850 ans. A la suite de l'invasion des Huns, ils sont entrés sur le territoire de l'ancien empire Romain, établissant deux royaumes, le premier en Italie et le second en France et dans la péninsule Ibérique. Les germaniques de l'ouest sont représentés par les Lombards et les Anglo-saxons. Les Lombards sont originaires du sud du Danemark et du nord de l'Allemagne. Ils ont migré vers le sud en Tchéquie, Hongrie et Italie où ils sont arrivés il y a 1350 ans. Les Anglo-saxons ont migré vers l'ouest dans les îles Britanniques où ils ont remplacé les langues celtiques. Les premières études de paléo-génétique ont montré que les Goths, les Lombards et les Anglo-saxons avaient une proportion d'ascendance Scandinave dans leurs gènes. Il y a cependant des débats importants concernant la proportion des mouvements de populations associés aux grandes invasions. Les germaniques du nord sont associés aux populations Scandinaves dont les Vikings. Leurs langues sont bien documentées par les runes.<br />
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Hugh McColl et ses collègues viennent de publier en pre-print un papier intitulé: <a href="https://www.biorxiv.org/content/10.1101/2024.03.13.584607v1" hreflang="en">Steppe Ancestry in western Eurasia and the spread of the Germanic Languages</a>. Ils ont séquencé 710 anciens génomes issus de populations de l'ouest de l'Eurasie, avec un focus particulier sur l'Âge du Fer du nord de l'Europe et des régions celtiques voisines. Ces données ont été associées à des génomes préalablement publiés. Après filtrage des génomes de mauvaise qualité, la base de données utilisée dans cette étude comprend 578 nouveaux génomes et 3939 génomes déjà publiés:<br />
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<img src="http://secher.bernard.free.fr/blog/public/2024_McColl_Figure1.png" alt="2024_McColl_Figure1.png, mar. 2024" style="display:table; margin:0 auto;" title="2024_McColl_Figure1.png, mar. 2024" /><br />
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Les auteurs ont réalisé une analyse de clustering IBD (identité par descente) afin de relier ces anciens individus entre eux. Ils ont identifié quatre groupes issus de cultures archéologiques reliées aux quatre cultures ancestrales: les Yamnayas, les Cordés du nord, les Cordés de l'est et les Campaniformes. De manière intéressante, les individus du même groupe sont localisés proches les uns des autres sur une Analyse en Composantes Principales:<br />
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<img src="http://secher.bernard.free.fr/blog/public/2024_McColl_Figure2.png" alt="2024_McColl_Figure2.png, mar. 2024" style="display:table; margin:0 auto;" title="2024_McColl_Figure2.png, mar. 2024" /><br />
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Un modèle de mélange IBD permet de mettre en évidence pour chaque individu, les proportions d'ascendance sur différents gradients: Yamnaya/fermiers d'Anatolie, fermiers d'Anatolie/chasseurs-cueilleurs de l'ouest et chasseurs-cueilleurs de l'ouest/chasseurs-cueilleurs de l'est:<br />
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<img src="http://secher.bernard.free.fr/blog/public/2024_McColl_FigureE1.png" alt="2024_McColl_FigureE1.png, mar. 2024" style="display:table; margin:0 auto;" title="2024_McColl_FigureE1.png, mar. 2024" /><br />
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Les auteurs ont affiné ces gradients. Ils ont ainsi mis en évidence, pour les individus reliés à la culture Cordée, un gradient entre une ascendance Yamnaya et une ascendance issue des fermiers de la culture des Amphores Globulaires (figure B ci-dessous). Cette dernière ascendance vient d'un mélange génétique qui s'est produit avant l'entrée de l'ascendance des steppes en Europe. Pour les individus reliés à la culture Campaniforme on voit un second gradient entre une population Campaniforme et un ajout supplémentaire d'ascendance issue des fermiers d'Europe (figure C ci-dessous):<br />
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<img src="http://secher.bernard.free.fr/blog/public/2024_McColl_Figure3.png" alt="2024_McColl_Figure3.png, mar. 2024" style="display:table; margin:0 auto;" title="2024_McColl_Figure3.png, mar. 2024" /><br />
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A partir de la diversité des individus reliés aux cultures Cordée et Campaniforme, les auteurs ont mis en évidence deux gradient supplémentaires: s'étendant vers le cluster de l'Âge du Bronze du Levant (Figure F ci-dessus). Parmi ces cultures reliées à la culture Campaniforme, on trouve les cultures celtiques de Hallstatt et de la Tène situées entre la France et la mer Noire. Le gradient lié à la culture Cordée relie des individus du nord-est et du sud-est de l'Europe. Ces deux gradients ont une source orientale commune d'ascendance fermier d'Anatolie: les individus du Levant de l'Âge du Bronze. A l'autre bout du gradient, dans la région Baltique, on trouve des individus qui possède une part supplémentaire d'ascendance issue des chasseurs-cueilleurs de l'est.<br />
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La plupart des individus du sud de l'Europe possèdent davantage d'ascendance issue des fermiers du Néolithique. La source steppique de ces individus vient de la culture Campaniforme. A la fin de l'âge du Bronze, l'ascendance des steppes des différentes populations Européennes est issue soit de la culture Cordée du nord, soit de la culture Campaniforme. La frontière entre ces ascendances Cordée et Campaniforme reste relativement stable durant tout l'Âge du Fer. Elle est ensuite décalée vers le sud et vers l'ouest à l'époque des grandes invasions:<br />
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<img src="http://secher.bernard.free.fr/blog/public/2024_McColl_Figure4.png" alt="2024_McColl_Figure4.png, mar. 2024" style="display:table; margin:0 auto;" title="2024_McColl_Figure4.png, mar. 2024" /><br />
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Les auteurs ont ensuite essayé de découvrir si des migrations ont eu lieu en Europe du nord durant l'Âge du bronze. Pour cela ils ont refait une analyse de clustering à partir de tous les individus plus vieux que 2800 ans, pour s'affranchir des mouvements de populations plus récents. A l'intérieur de la Scandinavie, ils ont identifié trois groupes:</p>
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<li>un groupe ancien correspondant à la vieille culture des haches de combat de Suède, à quelques individus du Danemark et presque tous les individus de Norvège</li>
<li>un groupe plus récent de Scandinavie du sud restreint au Danemark et à la pointe sud de la Suède</li>
<li>un autre groupe récent de Scandinavie de l'est qui s'étend principalement en Suède</li>
</ul>
<p>Pour la plupart des anciens individus, il y a une correspondance quasi parfaite entre ces groupes et les haplogroupes du chromosome Y: R1a-Z284 pour le premier groupe, R1b-U106 pour le second groupe et I1-DF29 pour le troisième groupe:<br />
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<img src="http://secher.bernard.free.fr/blog/public/2024_McColl_FigureE4.png" alt="2024_McColl_FigureE4.png, mar. 2024" style="display:table; margin:0 auto;" title="2024_McColl_FigureE4.png, mar. 2024" /><br />
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De manière intéressante, les individus du groupe de Scandinavie de l'est possèdent une proportion d'ascendance des chasseurs cueilleurs de l'est plus élevée que les individus des deux autres groupes. Cette ascendance EHG vient principalement des chasseurs-cueilleurs de la Baltique et non de chasseurs-cueilleurs locaux. A l'inverse, les individus des deux autres groupes possèdent davantage d'ascendance des chasseurs-cueilleurs de l'ouest. Ces résultats suggèrent l'arrivée d'une population venue de la Baltique en Scandinavie durant l'Âge du Bronze. Ensuite à l'Âge du Fer, ces trois groupes vont se mélanger pour former quatre groupes géographiques (Suède, Norvège, Danemark continental, îles du Danemark) qui possèdent au moins 50% d'ascendance issu du groupe de l'est de l'Âge du bronze identifié ci-dessus:<br />
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<img src="http://secher.bernard.free.fr/blog/public/2024_McColl_Figure5.png" alt="2024_McColl_Figure5.png, mar. 2024" style="display:table; margin:0 auto;" title="2024_McColl_Figure5.png, mar. 2024" /><br />
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Durant l'Âge du bronze, il y a un certain nombre d'individus de Norvège et du Danemark qui possèdent un mélange d'ascendances issues des chasseurs-cueilleurs locaux et de la Baltique. Ainsi à l'Âge du Fer, les individus de la péninsule du Jutland au Danemark ont un profil génétique similaire aux individus de l'Âge du Bronze qui avaient déjà ce mélange génétique. A l'inverse, dans les îles du Danemark et en Norvège, les individus de l'Âge du Fer possèdent un surplus d'ascendance issue des chasseurs-cueilleurs de la Baltique, suggérant plusieurs vagues de migrations ou un flux continuel venu de la région Baltique. Les auteurs ont utilisé le logiciel DATES pour dater ces événements de mélange génétique. Les résultats donnent une valeur comprise entre 3750 et 3250 ans, peu de temps après la première détection de cette ascendance de Scandinavie de l'est, dans les autres régions de Scandinavie.<br />
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Durant l'Âge du Fer les individus du Jutland appartiennent au groupe Scandinave sud et peuvent être modélisés en moyenne par un mélange génétique de 55% du groupe de l'Âge du Bronze du sud de la Scandinavie et 45% du groupe de l'Âge du Bronze de l'est de la Scandinavie. Dans les îles du Danemark ces proportions sont respectivement de 20 et 80%. Enfin en Suède les individus de l'Âge du Fer ont le même profil génétique que les individus de l'Âge du Bronze. <br />
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La période située entre 2800 et 1575 ans correspond également à l'époque des grandes invasions germaniques vers le sud. De manière intéressante les migrations vers l'ouest (Allemagne, Pays-Bas et Grande-Bretagne) viennent de la péninsule du Jutland. Plus à l'est (Pologne, Lituanie, Lettonie, Estonie et Finlande) les populations actuelles sont issues principalement d'un mélange génétique entre une ascendance de l'Âge du Bronze de la Baltique et une ascendance de l'Âge du Bronze de l'est de la Scandinavie. La migration Anglo-saxonne dans les îles Britanniques semble venir du nord de l'Allemagne, une région dont les anciens individus possédaient l'haplogroupe du chromosome Y: R1b, correspondant à un groupe de Scandinavie du sud durant l'Âge du Fer. La migration des Lombards en Tchéquie, Hongrie et Italie est issue d'un groupe de l'Âge du Fer du sud de la Scandinavie. Les anciens Ostrogoth d'Ukraine ou Visigoths de la péninsule Ibérique analysés jusqu'ici on un profil génétique local. Cependant deux exceptions de la péninsule Ibérique on un profil génétique similaire aux anciens individus de la région Baltique appartenant à un gradient Baltique du nord-est/Baltique du sud-est. Ce gradient inclut également des populations à l'origine de la migration Slave.</p>http://secher.bernard.free.fr/blog/index.php?post/2024/03/15/Ascendance-des-steppes-dans-l-ouest-de-l-Eurasie-et-diffusion-des-langues-germaniques#comment-formhttp://secher.bernard.free.fr/blog/index.php?feed/atom/comments/619Génomes anciens des derniers chasseurs-cueilleurs de Franceurn:md5:3b7dcb79f0e6a0ef9108a5af6afc24022024-03-02T13:30:00+01:002024-03-02T21:07:02+01:00Bernard SécherADN ancien <p>Le début de l'holocène daté de 11.700 ans coïncide avec de meilleures conditions climatiques qui ont impacté la vie des chasseurs-cueilleurs d'Europe. Cette période est caractérisée par des changements significatifs des pratiques socio-culturelles comme le montrent les vestiges d'habitats, les outils technologiques, les moyens de subsistance et les pratiques funéraires qui définissent la transition entre le Paléolithique et le Mésolithique. Les précédentes études de paléo-génétique ont montré que différents groupes génétiquement distincts ont coexisté en Europe durant le Paléolithique. Ainsi en Europe occidentale un groupe ancestral associé à la culture Magdalénienne entre 20.000 et 14.000 ans était prédominant durant le maximum glaciaire. Ce groupe a été remplacé ensuite par le groupe des chasseurs-cueilleurs de l'ouest (WHG) au début de l'holocène, sauf dans la péninsule Ibérique et dans le sud-ouest de la France. Pendant plusieurs millénaires, le groupe des chasseurs-cueilleurs de l'ouest fut le plus commun dans une bonne partie de l'Europe, jusqu'à l'arrivée des premiers fermiers du Néolithique. Dans l'ouest de la France la coexistence des derniers chasseurs-cueilleurs et des premiers fermiers est limitée à quelques siècles entre 6950 et 6750 ans. Il est maintenant clair que les populations de fermiers assimilèrent progressivement les populations de chasseurs-cueilleurs. La façon dont cela s'est déroulé reste encore inconnue, mais des nuances régionales existent dans ce processus.<br />
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Les amas coquillers d'Hoedic et de Téviec situés dans le sud de la Bretagne sont parmi les sites Mésolithiques les plus significatifs de France, à cause de leurs nombreuses sépultures. Ils donnent des informations importantes sur la vie et la mort des derniers chasseurs-cueilleurs d'Europe occidentale, jusqu'à l'arrivée des premiers fermiers.<br />
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Luciana Simões et ses collègues viennent de publier un papier intitulé: <a href="https://www.pnas.org/doi/10.1073/pnas.2310545121" hreflang="en">Genomic ancestry and social dynamics of the last hunter-gatherers of Atlantic France</a>. Ils ont séquencé le génome de dix individus de la fin du Mésolithique issus des sites d'Hoedic (n=6) et de Téviec (n=3) dans le nord-ouest de la France et de Champigny (n=1) dans le nord-est de la France:<br />
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<img src="http://secher.bernard.free.fr/blog/public/2024_Simoes_Figure1.png" alt="2024_Simoes_Figure1.png, mar. 2024" style="display:table; margin:0 auto;" title="2024_Simoes_Figure1.png, mar. 2024" /><br />
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Les datations radiocarbone obtenues sur ces individus donnent une date qui varie de 7910 et 6760 ans à Hoedic, entre 7425 et 6760 ans à Téviec et entre 8300 et 8015 ans à Champigny. Ainsi dans l'ouest de la France, les derniers chasseurs-cueilleurs ont bien coexisté avec les premiers fermiers.<br />
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Les sépultures multiples sont nombreuses à Hoedic et Téviec. Ainsi les trois individus de Téviec analysés dans cette étude appartiennent à la même sépulture. A Hoedic, une sépulture contenait un adulte et un enfant, et une seconde sépulture contenait un adulte et plusieurs enfants.<br />
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Les analyses isotopiques du carbone et de l'azote montrent que les chasseurs-cueilleurs d'Hoedic et de Téviec consommaient une forte proportion d'aliments marins comme de gros poissons. Si la proportion d'alimentation marine est très importante à Hoedic, elle est plus équilibrée avec une alimentation terrestre à Téviec. Ces résultats s'expliquent notamment par le fait qu'au Mésolithique, Hoedic était une île alors que Téviec était situé sur le littoral. Ainsi les habitants de ce site avaient aussi accès à une alimentation terrestre:<br />
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<img src="http://secher.bernard.free.fr/blog/public/2024_Simoes_Figure2.png" alt="2024_Simoes_Figure2.png, mar. 2024" style="display:table; margin:0 auto;" title="2024_Simoes_Figure2.png, mar. 2024" /><br />
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Les auteurs ont ensuite réalisé une Analyse en Composantes Principales pour comparer le génome de ces individus avec celui d'autres anciens individus d'Europe. Les résultats montrent que la population Mésolithique de France est homogène et similaire aux autres chasseurs-cueilleurs de l'ouest:<br />
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<img src="http://secher.bernard.free.fr/blog/public/2024_Simoes_Figure3A.png" alt="2024_Simoes_Figure3A.png, mar. 2024" style="display:table; margin:0 auto;" title="2024_Simoes_Figure3A.png, mar. 2024" /><br />
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Les haplogroupes mitochondriaux et du chromosome Y sont tous respectivement U5 et I2a1, typiques des populations Mésolithiques de l'ouest de l'Europe:<br />
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<img src="http://secher.bernard.free.fr/blog/public/2024_Simoes_Table1.png" alt="2024_Simoes_Table1.png, mar. 2024" style="display:table; margin:0 auto;" title="2024_Simoes_Table1.png, mar. 2024" /><br />
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Aucun de ces individus montre la moindre trace d'ascendance des fermiers du Néolithique. La plupart de ces individus ont la peau foncée et les yeux bleus caractéristiques des chasseurs-cueilleurs de l'ouest. Cependant un individu de Hoedic avait la peau un peu plus claire.<br />
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Les auteurs ont ensuite analysé les segments d'homozygotie afin d'estimer la taille de la population et le niveau de consanguinité. Le nombre des longs segments est compatible avec une faible taille de la population des chasseurs-cueilleurs des côtes Bretonnes. De manière intéressante, les auteurs n'ont pas trouvé de trace de consanguinité dans cette population. Ainsi ces chasseurs-cueilleurs avaient accès à un large réseau de reproduction au-delà de leur territoire, et devaient échanger des individus d'un groupe à un autre pour leurs unions.
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De plus, les auteurs n'ont pas trouvé de relation au premier degré parmi les génomes analysés dans cette étude. A Téviec, les trois génomes sont issus d'individus enterrés dans la même sépulture. Parmi ceux-ci, il y a deux relations au second ou au troisième degré. De manière intéressante, à Hoedic où dans la même sépulture sont enterrés une adulte et une petite fille, ces deux individus n'ont pas de relation familiale identifiée.</p>http://secher.bernard.free.fr/blog/index.php?post/2024/03/01/G%C3%A9nomes-anciens-des-derniers-chasseurs-cueilleurs-de-France#comment-formhttp://secher.bernard.free.fr/blog/index.php?feed/atom/comments/618Relations familiales dans un site du début de l'Âge du Bronze en Allemagneurn:md5:8ecdaa33cb3d0f72ddc801abc06f775b2024-02-22T15:44:00+01:002024-02-22T15:45:02+01:00Bernard SécherADN ancien <p>La culture d'<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Culture_d%27Un%C3%A9tice" hreflang="fr">Únětice</a> du début de l'Âge du Bronze est datée en Allemagne centrale entre 2200 et 1550 av. JC. Elle est caractérisée par des changements significatifs dans l'économie et la stratification sociale qui ont conduit à l'émergence de chefferies. La distribution géographique de la culture d'Únětice s'étend de l'Autriche et la Slovaquie au sud-est au massif montagneux du <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Harz" hreflang="fr">Harz</a> en Allemagne centrale. La découverte de tombes richement fournies et d'autres sans mobilier archéologique suggère l'existence d'une importante stratification sociale dans cette culture. Ainsi des artefacts en or ont été trouvés dans des sépultures de Leubingen, Helmsdorf et Bornhöck. La stratification sociale a été déjà suggérée dans les sociétés précédentes de la fin du Néolithique dans cette région, notamment dans la culture campaniforme avec sa riche sépulture d'Apfelstädt. Avant l'émergence de la culture d'Únětice, les archéologues ont mis en évidence la co-existence des deux cultures cordée et campaniforme dans la région des monts Harz pendant au moins 300 ans. Les récentes études de paléo-génétique ont montré que les populations de ces deux cultures se sont mélangées génétiquement pendant cette période avant de donner naissance à la culture d'Únětice. Le mobilier archéologique des sépultures de la culture d'Únětice montent qu'elles ont hérité d'objets issus des deux cultures précédentes.<br />
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Leubingen est localisé dans le bassin de Thuringe, au sud du massif montagneux de Harz. Il y avait une forte densité d'habitats dans cette région durant le début de l'Âge du Bronze. Les cimetières sont situés à proximité du tumulus de prince de Leubingen, qui est la plus ancienne tombe princière de la culture d'Únětice. Un homme a été enterré dans une chambre en bois accompagné d'un mobilier extraordinaire: une céramique, une hache massive en pierre, une pierre de martelage pour la métallurgie, trois ciseaux, deux haches, trois poignards, une hallebarde en cuivre/bronze, un bracelet, deux épingles, deux anneaux et une petite spirale en or. Malheureusement les restes humains de cet individu ont été perdu depuis sa découverte en 1877, et cela empêche toute étude de bio-archéologie sur cet individu. Deux cimetières datés de la culture d'Únětice, ont été découverts à proximité de ce tumulus: le premier est situé 800 m au sud-ouest et le second 2,5 km au nord-est:<br />
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<img src="http://secher.bernard.free.fr/blog/public/2024_Penske_Figure1.png" alt="2024_Penske_Figure1.png, fév. 2024" style="display:table; margin:0 auto;" title="2024_Penske_Figure1.png, fév. 2024" /><br />
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A part le tumulus princier, le mobilier archéologique est rare dans les sépultures des cimetières de Leubingen. Sandra Penske et ses collègues viennent de publier un papier intitulé: <a href="https://www.nature.com/articles/s41598-024-54462-6" hreflang="en">Kinship practices at the early bronze age site of Leubingen in Central Germany</a>. Ils ont analysé le mobilier archéologique, fait des études anthropologiques sur les restes humains, analysé le génome et les isotopes de 46 individus issus des deux cimetières de Leubingen.<br />
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Les auteurs ont ainsi mis en évidence 41 relations au premier degré. Ils ont reconstruit la généalogie de quatre familles dans le cimetière Leubingen I, et la généalogie d'une famille dans le cimetière Leubingen II:<br />
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<img src="http://secher.bernard.free.fr/blog/public/2024_Penske_Figure2.png" alt="2024_Penske_Figure2.png, fév. 2024" style="display:table; margin:0 auto;" title="2024_Penske_Figure2.png, fév. 2024" /><br />
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De plus, l'analyse des segments identiques par descentes de 35 individus a mis en évidence des relations jusqu'au cinquième degré et a ainsi confirmé la reconstruction des différentes généalogies:<br />
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<img src="http://secher.bernard.free.fr/blog/public/2024_Penske_Figure3a.png" alt="2024_Penske_Figure3a.png, fév. 2024" style="display:table; margin:0 auto;" title="2024_Penske_Figure3a.png, fév. 2024" /><br />
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La première famille (en rouge ci-dessus) consiste en un couple et ses cinq enfants: trois garçons et deux filles. Parmi ces enfants, un seul a atteint l'âge adulte. Il s'agit de la femme 2039. Les analyses isotopiques du strontium montrent que tous les individus de cette famille ont grandi localement à Leubingen. La seconde famille (en vert ci-dessus) comprend huit individus sur quatre générations. Ils sont tous connectés via la lignée paternelle. Les femmes de cette familles ont pour seule relation familiale, leurs enfants. Elles ne sont connectées à aucun autre individu, suggérant qu'elles venaient de l'extérieur. Les deux enfants de la dernière génération sont décédés avant l'âge adulte. Les analyses isotopiques du strontium montrent que tous les individus de cette famille ont grandi localement à Leubingen. La troisième famille (en bleu ci-dessus) comprend dix individus sur quatre générations. Ils sont également tous reliés entre eux via la lignée paternelle. Cette famille montre qu'à la deuxième et à la troisième génération on trouve des demi-frères et des demi-sœurs, leurs pères ayant eu deux conjointes. Là aussi, les femmes 2033 et 2223 ne sont reliées biologiquement qu'à leurs enfants et sont probablement venues de l'extérieur. Ces résultats sont confirmés par l'analyse isotopique du strontium qui montre que ces deux femmes ont des valeurs non locales. La troisième femme de cette famille est morte avant l'âge adulte entre 11 et 13 ans. La quatrième famille (en orange ci-dessus) est constituée uniquement d'un père et sa fille décédée entre 4 et 5 ans. Ils ont tous les deux, des valeurs isotopiques du strontium locales. La dernière famille (en rose ci-dessus) issue du second cimetière comprend quatre individus. Il y a deux topologie possible pour sa généalogie. Soit l'individu 81 est la nièce des deux individus 142 et 201-1 qui sont frère et sœur (généalogie de gauche), soit elle est leur tante (généalogie de droite). Cette famille est la seule qui montre un lien maternel via l’individu 142. Tous ces individus ont grandi localement d'après les analyses isotopiques du strontium.<br />
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Dans ces cinq familles, huit femmes et six hommes sont manquants et leur ADN n'a pas été analysé. Tous ces individus manquants sont un conjoint d'une union et ont des enfants. De plus quatre des six hommes manquants sont un frère d'un autre individu. Seul le père de l'individu 203 de la cinquième famille, n'est relié a aucun autre individu. A l'opposé, toutes les femmes manquantes sont seulement les mères de leurs enfants Elles n'ont aucune autre relation de famille. Elles ne sont sœur de personne. Parmi les individus de ces cinq familles, il y a bien moins de femmes que d'hommes. Ainsi parmi les enfants on observe 17 fils et seulement 6 filles. Ces résultats suggèrent que les filles qui ont atteint l'âge adulte ont quitté cette communauté et ont été enterrées ailleurs. Si sur l'ensemble des deux cimetières le nombre de femmes (29) et d'hommes (31) est équilibré, il y a beaucoup plus de fils adultes (8) que de femmes adultes (1). Ce déséquilibre est contrebalancé par le plus grand nombre de femmes sans aucune relation familiale. Tous ces résultats suggèrent une exogamie féminine dans cette société du début de l'Âge du Bronze en Allemagne, comme on a pu le voir sur d'autres sites archéologiques. Les femmes quittent l'habitat pour aller se marier sur un autre site, alors que les hommes se marient et restent dans leur habitat d'origine.<br />
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Parmi tous ces individus, treize n'ont aucune relation familiale: neuf femmes et quatre hommes. Parmi ces quatre hommes il y a deux enfants et deux adolescents. A l'inverse huit des neuf femmes sont des adultes, dont quatre ont des valeurs des isotopes du strontium qui montrent qu'elles viennent d'ailleurs. Il est possible que ces femmes soient les conjointes d'hommes de la communauté dont on n'a pas retrouvé d'enfants. Deux femmes sans relation familiale (2224 et 2242) ont été retrouvées avec un riche mobilier funéraire, par rapport aux autres individus des deux cimetières de Leubingen, suggérant qu'elles avaient un rôle prééminent dans cette communauté.</p>http://secher.bernard.free.fr/blog/index.php?post/2024/02/19/Relations-familiales-dans-un-site-du-d%C3%A9but-de-l-%C3%82ge-du-Bronze-en-Allemagne#comment-formhttp://secher.bernard.free.fr/blog/index.php?feed/atom/comments/617L'homme de Vittrupurn:md5:c5cc7c2c28b2d3d27a054a6800ccdc852024-02-16T15:35:00+01:002024-02-16T15:35:56+01:00Bernard SécherADN ancien <p>Les restes fragmentaires du squelette d'un individu ont été retrouvés dans une tourbière située à Vittrup, dans le nord du Danemark, en 1915, avec un bâton en bois, une céramique et des os de bovins. Anders Fischer et ses collègues viennent de publier un papier intitulé: <a href="https://journals.plos.org/plosone/article?id=10.1371/journal.pone.0297032" hreflang="en">Vittrup Man–The life-history of a genetic foreigner in Neolithic Denmark</a>. Ils ont réalisé des études anthropologiques, isotopiques et génétiques, ainsi que des mesures de datation sur les restes de l'homme de Vittrup.<br />
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<img src="http://secher.bernard.free.fr/blog/public/2024_Fischer_Figure1.png" alt="2024_Fischer_Figure1.png, fév. 2024" style="display:table; margin:0 auto;" title="2024_Fischer_Figure1.png, fév. 2024" /><br />
<br />
Les analyses anthropologiques montrent que cet individu était un homme âgé entre 30 et 40 ans. L'état fragmentaire du crâne indique que celui-ci a reçu au moins huit coups qui ont été fatal à l'individu. Le bâton de bois retrouvé à proximité pourrait être l'arme utilisée pour tuer cet homme.<br />
<br />
Six dates radiocarbone ont été obtenues à partir des restes humains et de bovins. Les auteurs ont tenu compte de l'effet réservoir marin pour obtenir une datation absolue comprise entre 3345 et 3082 av. JC. Cette date correspond à la culture archéologique des<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Culture_des_vases_%C3%A0_entonnoir" hreflang="fr"> vases à entonnoir</a> qui s'est développée au Danemark entre 3900 et 2800 av. JC. Il s'agit d'une culture Néolithique.<br />
<br />
Les analyses d'ADN montrent que cet individu est proche génétiquement des chasseurs-cueilleurs de la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Culture_de_la_c%C3%A9ramique_perfor%C3%A9e" hreflang="fr">culture de la céramique perforée</a> situés sur l'île de <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Gotland" hreflang="fr">Gotland</a> en Suède (disques orange ci-dessous à gauche), bien que ces individus soient légèrement décalés vers les fermiers d'Anatolie et d'Europe. Il est également éloigné génétiquement des fermiers de la culture archéologique des vases à entonnoir qui habitaient le Danemark à cette époque (triangles gris pointe vers le haut ci-dessous à droite):<br />
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<img src="http://secher.bernard.free.fr/blog/public/2024_Fischer_Figure7.png" alt="2024_Fischer_Figure7.png, fév. 2024" style="display:table; margin:0 auto;" title="2024_Fischer_Figure7.png, fév. 2024" /><br />
<br />
Les auteurs ont ensuite comparé le génome de l'homme de Vittrup avec celui de l'homme de Svinninge Vejle qui a été retrouvé sur l'île de <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Seeland_(Danemark)" hreflang="fr">Seeland</a> à l'est du Danemark. Cet individu est daté de la même époque que l'homme de Vittrup, entre 3341 et 2921 av. JC. Il est également proche génétiquement des chasseurs-cueilleurs de Scandinavie, comme on peut le voir sur la PCA ci-dessus.<br />
<br />
L'analyse avec le logiciel ADMIXTURE confirme ce résultat. Dans la figure ci-dessous les deux hommes de Vittrup et de Svinninge Vejle sont situés tout en haut. La composante grise correspond à l'ascendance des fermiers d'Anatolie, la composante bleue à l'ascendance des chasseurs-cueilleurs de l'ouest et la composante marron à l'ascendance des chasseurs-cueilleurs de l'est:<br />
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<img src="http://secher.bernard.free.fr/blog/public/2024_Fischer_Figure8.png" alt="2024_Fischer_Figure8.png, fév. 2024" style="display:table; margin:0 auto;" title="2024_Fischer_Figure8.png, fév. 2024" /><br />
<br />
Ces résultats suggèrent que les deux individus de Vittrup et de Svinninge Vejle sont des migrants issus d'une population de chasseurs-cueilleurs qui sont venus au Danemark en provenance du nord: Suède ou Norvège.<br />
<br />
L'analyse des traits phylogénétique de l'homme de Svinninge Vejle montre que celui-ci avait une peau plus sombre que les populations de la culture des vases à entonnoir. Sa taille et sa couleur des cheveux étaient dans la variabilité des populations de la culture des vases à entonnoir, bien qu'en étant proche des individus les plus grands et dont les cheveux étaient les plus sombres. L'individu de Svinninge Vejle avait également les yeux bleus.<br />
<br />
Les analyses isotopiques du strontium et de l'oxygène indiquent que l'homme de Vittrup n'était pas originaire du nord du Danemark, mais qu'il venait d'une région éloignée située dans un climat plus froid, en accord avec les résultats génétiques. Les valeurs sont compatibles avec une région d'origine située au nord-ouest de la Norvège ou au sud-ouest de la Suède. La comparaison des valeurs entre les différentes molaires indiquent que cet individu a migré avant l'âge de 9 à 12 ans.<br />
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Les analyses isotopiques du carbone et de l'azote indiquent que l'homme de Vittrup a consommé au début de son enfance entre 2 et 7 ans une grande quantité de ressources marines, et ensuite une alimentation plus terrestre ou issue de l'eau douce. Ainsi cet individu a vécu les premières années de sa vie dans une population de chasseurs-cueilleurs. Par contre, à la fin de sa vie, son alimentation est comparable à celle des populations de fermiers de la culture des vases à entonnoir: mélange de céréales, de lait et de viande de bovins. Tous ces résultats suggèrent donc pour cet individu une transition d'une vie de chasseurs-cueilleurs à une vie de fermiers durant son enfance.<br />
<br />
L'analyse du tartre dentaire indique que l'homme de Vittrup a consommé de la viande d'ovins: moutons ou chèvres. Il a également consommé de la morue, et de la viande de phoque et de baleine. La chasse à ces animaux demande une forte compétence en techniques maritimes. Ces résidus dans son tartre dentaire, sont probablement des marqueurs de la fin de sa vie, lorsqu'il habitait dans une société de fermiers de la culture des vases à entonnoir. Ainsi cette population Néolithique devait également s'adonner à la pèche en mer.<br />
<br />
La fin tragique de l'homme de Vittrup et son dépôt dans une tourbière pose question. La violence de sa mort exclut un accident. Il pourrait avoir été une victime d'une querelle ou d'un meurtre, mais son dépôt dans une tourbière incite à penser qu"il a été victime d'un sacrifice. Les auteurs ont imaginé deux scénarios. Dans le premier, il serait un individu issu d'une population du nord de la Scandinavie impliquée dans le commerce du silex entre le nord du Jutland au Danemark, la Suède et la Norvège, et qui aurait été intégré dans la société de fermiers du nord du Danemark. Le second scénario suggère qu'il aurait été fait prisonnier dans son enfance et qu'il aurait passé le reste de sa vie en tant que captif de la société de fermiers, avant d'être sacrifié.</p>http://secher.bernard.free.fr/blog/index.php?post/2024/02/16/L-homme-de-Vittrup2#comment-formhttp://secher.bernard.free.fr/blog/index.php?feed/atom/comments/616Homo sapiens a atteint les hautes latitudes en Europe il y a 45.000 ansurn:md5:3c755201af8f6a106867ed6d6d68e7192024-02-02T09:46:00+01:002024-02-02T09:46:30+01:00Bernard SécherADN ancien <p>Le techno-complexe <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Jerzmanowicien" hreflang="fr">Lincombian–Ranisian–Jerzmanowician</a> (LRJ) s'étend en Europe centrale et du nord-ouest. Il se situe à la transition entre le Paléolithique Moyen et Supérieur et a été attribué aussi bien à Neandertal qu'à Homo sapiens. Jusqu'ici il a été daté entre 44.000 et 41.000 Ans. Le site archéologique d'Ilsenhöhle à Ranis est un des sites éponymes de ce complexe. Il est composé de pointes bifaciales et unifaciales. Il est situé dans la vallée de la rivière Orla en Allemagne:<br />
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<img src="http://secher.bernard.free.fr/blog/public/2024_Mylopotamitaki_Figure1.png" alt="2024_Mylopotamitaki_Figure1.png, fév. 2024" style="display:table; margin:0 auto;" title="2024_Mylopotamitaki_Figure1.png, fév. 2024" /><br />
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Les fouilles ont eu lieu entre 1926 et 1938. Dorothea Mylopotamitaki et ses collègues viennent de publier un papier intitulé: <a href="https://www.nature.com/articles/s41586-023-06923-7" hreflang="en">Homo sapiens reached the higher latitudes of Europe by 45,000 years ago</a>. Ils sont retournés sur le site de Ranis en 2016 pour clarifier la stratigraphie et la chronologie de ce site. Les auteurs ont ainsi construit un modèle chronologique basé sur 28 datations radiocarbone. Notamment les couches 9 et 8 associées au complexe LRJ sont datées entre 45.770 et 43.260 ans. De plus six os humains appartenant au complexe LRJ ont été datés directement entre 46.950 et 42.200 ans.<br />
<br />
Les auteurs ont ensuite testé l'ADN mitochondrial sur onze os humains appartenant aux couches LRJ du site de Ranis. Cinq séquences mitochondriales sont identiques suggérant qu'il s'agit du même individu ou des individus de même haplotype. Neuf des dix séquences mitochondriales obtenues appartiennent à l'haplogroupe N et sont proche de la séquence mitochondriale de l'individu de Zlatý kůň, un individu de la République Tchèque daté de 45.000 ans, et le dixième appartient à l'haplogroupe R. Ces séquences sont en rouge dans la figure ci-dessous:<br />
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<img src="http://secher.bernard.free.fr/blog/public/2024_Mylopotamitaki_Figure3.png" alt="2024_Mylopotamitaki_Figure3.png, fév. 2024" style="display:table; margin:0 auto;" title="2024_Mylopotamitaki_Figure3.png, fév. 2024" /><br />
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Ces résultats indiquent que les hommes du site de Ranis étaient des Homo sapiens qui se sont déplacés dans les hautes latitudes de l'Europe il y a environ 45.000 ans.</p>http://secher.bernard.free.fr/blog/index.php?post/2024/02/02/Homo-sapiens-a-atteint-les-hautes-latitudes-en-Europe-il-y-a-45.000-Ans#comment-formhttp://secher.bernard.free.fr/blog/index.php?feed/atom/comments/614Histoire génomique du Danemarkurn:md5:c5c7831c4e74727370b567ed687b2ea42024-01-14T14:20:00+01:002024-01-14T14:20:26+01:00Bernard SécherADN ancien <p>Au sud de la Scandinavie, le Mésolithique et le Néolithique sont caractérisés par des transitions culturelles bien définies. Cependant les impacts démographiques et génétiques de ces événements restent mal connus. Les débuts de la colonisation post glaciaire de la Scandinavie comprennent au moins deux migrations. La première voit l'arrivée de chasseurs-cueilleurs de l'ouest (WHG) au sud, alors que la seconde voit l'arrivée de chasseurs-cueilleurs de l'est (EHG) par le nord, avant de descendre plus au sud le long de la côte Norvégienne. En Europe, le Néolithique voit l'arrivée de fermiers venus d'Anatolie. Dans le sud de la Scandinavie, cette transition arrive un millénaire plus tard qu'en Europe Centrale. Au Danemark, le premier Néolithique correspond à la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Culture_des_vases_%C3%A0_entonnoir" hreflang="fr">culture des vases à entonnoir</a>. Il laisse ensuite la place à la <a href="https://en.wikipedia.org/wiki/Single_Grave_culture#Distribution" hreflang="en">culture des sépultures individuelles</a> (SGC).<br />
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Morten Allentoft et ses collègues viennent de publier un papier intitulé: <a href="https://www.nature.com/articles/s41586-023-06862-3" hreflang="en">100 ancient genomes show repeated population turnovers in Neolithic Denmark</a>. Ils ont séquencé le génome de 100 anciens individus du Danemark datés entre le début du Mésolithique et l'Âge du Bronze sur une durée de 7300 ans:<br />
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<img src="http://secher.bernard.free.fr/blog/public/2024_Allentoft_Figure1.png" alt="2024_Allentoft_Figure1.png, janv. 2024" style="display:table; margin:0 auto;" title="2024_Allentoft_Figure1.png, janv. 2024" /><br />
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Le début du Mésolithique au Danemark correspond au <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Maglemosien" hreflang="fr">Maglemosien</a> daté entre 11.000 et 8400 ans, caractérisé archéologiquement par de petits projectiles en silex. Il est suivi par le <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Kongemosien" hreflang="fr">Kongemosien</a> daté entre 8400 et 7400 ans caractérisé par des pointes de flèche trapézoïdales, puis par la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Culture_d%27Erteb%C3%B8lle" hreflang="fr">culture d'Ertebølle</a> entre 7400 et 5900 ans. La céramique a été introduite dans la région par d'autres cultures de chasseurs-cueilleurs. Les auteurs de cette étude ont analysé le génome de 38 chasseurs-cueilleurs du Danemark dont quatre du Maglemosien, huit du Kongemosien, et 27 de la culture d'Ertebølle. Tous ces individus montrent une forte homogénéité génétique sur une période de 4500 ans, comme on peut le voir en bas à gauche de la PCA ci-dessous (symboles violet foncé):<br />
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<img src="http://secher.bernard.free.fr/blog/public/2024_Allentoft_Figure1b.png" alt="2024_Allentoft_Figure1b.png, janv. 2024" style="display:table; margin:0 auto;" title="2024_Allentoft_Figure1b.png, janv. 2024" /><br />
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ou l'analyse avec le logiciel ADMIXTURE (ascendance vert clair largement dominante):<br />
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<img src="http://secher.bernard.free.fr/blog/public/2024_Allentoft_Figure1c.png" alt="2024_Allentoft_Figure1c.png, janv. 2024" style="display:table; margin:0 auto;" title="2024_Allentoft_Figure1c.png, janv. 2024" /><br />
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Ces résultats suggèrent une forte continuité génétique au Danemark tout le long du Mésolithique, correspondant à l'ascendance des chasseurs-cueilleurs de l'ouest. Les traits phylogénétiques indiquent une très forte probabilité des yeux bleus et des cheveux bruns tout le long du Mésolithique. L'analyse isotopique du carbone et de l'azote montre une forte consommation de produits marins à cette époque. L'analyse isotopique du strontium montre une faible mobilité de cette population.<br />
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La culture des vases à entonnoir marque le début du Néolithique au Danemark il y a environ 5900 ans. De longs tumulus de bois et de terre apparaissent rapidement. A partir de 5300 ans apparaissent les premières structures de pierre. Une ancienne femme datée entre 5896 et 5718 ans affiche un profil génétique complètement différent de celui des chasseurs-cueilleurs précédents, mais identique aux fermiers venus d'Anatolie au moment de la transition Néolithique en Europe. Le Néolithique au Danemark comme ailleurs en Europe est donc le témoin d'un remplacement de population avec néanmoins un peu de contribution génétique (entre 10 et 35%) des anciens chasseurs-cueilleurs de la phase précédente, comme on peut le voir en bas à droite de la PCA et l'analyse avec le logiciel ADMIXTURE ci-dessus. Ces anciens fermiers du Danemark sont le plus proche des individus de la culture des vases à entonnoir de Suède et de Pologne ainsi que des fermiers de la culture des amphores globulaires. Cela suggère une origine orientale pour les premiers fermiers du Danemark. De manière intéressante, une forte proportion de l'ascendance chasseurs-cueilleurs des fermiers du Néolithique ne provient pas du Danemark, indiquant ainsi que les premiers fermiers arrivés au Danemark possédaient déjà une proportion importante d'ascendance chasseurs-cueilleurs. Cependant les fermiers Danois de la fin du Néolithique possèdent une proportion non négligeable d'ascendance génétique issue des chasseurs-cueilleurs du Danemark suggérant ainsi un flux de gènes de cette ancienne population dans la population des fermiers. Ainsi les anciennes populations de chasseurs-cueilleurs au Danemark ont du survivre plusieurs siècles en parallèle avec les sociétés agricoles. Les analyses isotopiques montrent que dès le début du Néolithique, l'alimentation des hommes s'est modifiée fortement vers une diète à base de ressources terrestres: viande, céréales et légumes. De plus, les analyses des isotopes du strontium indiquent des valeurs beaucoup plus variées qu'au Mésolithique. L'analyse des trait phylogénétiques indiquent une couleur des cheveux plus claire et une taille plus petite que les individus du Mésolithique. Enfin, deux individus de la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Culture_de_la_c%C3%A9ramique_perfor%C3%A9e" hreflang="fr">culture de la céramique perforée</a> datés de 5200 ans ont un profil génétique semblable aux chasseurs-cueilleurs du Mésolithique.<br />
<br />
Entre 5000 et 4800 ans, l'Europe voit l'arrivée d'un mouvement de populations en provenance des steppes qui donne naissance à la culture de la céramique cordée, puis à la culture campaniforme. Au Danemark, ce mouvement démographique correspond à la transition entre la culture des vases à entonnoir et la culture des sépultures individuelles, qui est une manifestation régionale de la culture cordée. Cette étude démontre que les anciens individus de la culture des sépultures individuelles ont un profil génétique très différent des fermiers de la culture précédente. Cela se voit à la fois en haut à droite de la PCA et dans l'analyse ADMIXTURE sur les figures ci-dessus. La proportion d'ascendance des steppes dans le génome de ces anciens Danois est comprise entre 60 et 85%. Les traits phylogénétiques indiquent une augmentation de la taille de ces individus par rapport à la phase précédente.<br />
<br />
La période suivante de la fin du Néolithique correspond à la période archéologique des poignards en silex comprise entre 4600 et 3700 ans. Elle peut être divisée en trois phases successives. Dans la première phase comprise entre 4600 et 4300 ans, les anciens individus se regroupent avec la population de la culture cordée, riche en ascendance des steppes et un haplogroupe du chromosome Y: R1a. Cette phase est associée archéologiquement à la culture des sépultures individuelles du Danemark et à la culture des haches de combats de Suède. La seconde phase entre 4300 et 3700 ans correspond à la culture des poignards en silex. Ces anciens individus se regroupent avec les populations d'Europe Centrale et de l'ouest de la fin du Néolithique et du début de l'Âge du Bronze, avec une domination de l'haplogroupe R1b-L51 du chromosome Y. Enfin la troisième phase entre 4000 et 3000 ans, voit l'apparition de l'haplogroupe du chromosome Y: I1 qui est dominant aujourd'hui en Scandinavie. Cette dernière phase correspond à l'arrivée d'une nouvelle population venue du nord et de l'est de la Scandinavie. Ce profil génétique sera ensuite dominant dans les populations plus tardives de l'Âge du Fer et de l'ère Viking.<br />
<br />
La population actuelle du Danemark (symboles noirs ci-dessous à droite) se regroupe entre les anciens individus de la fin du Néolithique et du début de l'Âge du Bronze (en orange) et l'ancienne population Viking (en jaune):<br />
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<img src="http://secher.bernard.free.fr/blog/public/2024_Allentoft_Figure4.png" alt="2024_Allentoft_Figure4.png, janv. 2024" style="display:table; margin:0 auto;" title="2024_Allentoft_Figure4.png, janv. 2024" /><br />
<br /></p>http://secher.bernard.free.fr/blog/index.php?post/2024/01/13/Histoire-g%C3%A9nomique-du-Danemark#comment-formhttp://secher.bernard.free.fr/blog/index.php?feed/atom/comments/613Génomes anciens dans la culture de Koban du nord Caucaseurn:md5:7946b435f4cb4b9ce4911c7dbaa2212f2024-01-07T15:29:00+01:002024-01-07T15:29:43+01:00Bernard SécherADN ancien <p>Le Caucase est considéré comme une région importante pour les migrations des populations vers l'Europe ou l'Asie, depuis le Paléolithique Supérieur. La <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Culture_de_Koban" hreflang="fr">culture de Koban</a> de la fin de l'Âge du Bronze et du début de l'Âge du Fer est considérée comme un pont entre les cultures de l'Âge du Bronze et les populations actuelles du Caucase. Son nom vient d'un site archéologique localisé dans le village de Verkhny Koban situé en Ossétie du nord, sur lequel les premiers artéfacts appartenant à cette culture ont été découverts au milieu du 19ème siècle. Plusieurs autres sites appartenant à cette culture, ont été ensuite découverts dans le Caucase. Des influences venues des <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Cimm%C3%A9riens" hreflang="fr">Cimmériens</a> et des <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Scythes" hreflang="fr">Scythes</a> apparaissent dans le mobilier archéologique de la culture de Koban.<br />
<br />
Fedor Sharko et ses collègues viennent de publier un papier intitulé: <a href="https://www.nature.com/articles/s41431-023-01524-4" hreflang="en">Koban culture genome-wide and archeological data open the bridge between Bronze and Iron Ages in the North Caucasus</a>. Ils ont séquencé le génome de cinq anciens individus de la culture de Koban issus des sites de Klin-Yar-3 et Zayukovo-3, et d'un ancien <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Alains" hreflang="fr">Alain</a> issu du site de Bratskiye 1-ye Kurgany:<br />
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<img src="http://secher.bernard.free.fr/blog/public/2024_Sharko_Figure1.png" alt="2024_Sharko_Figure1.png, janv. 2024" style="display:table; margin:0 auto;" title="2024_Sharko_Figure1.png, janv. 2024" /><br />
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La détermination du sexe des individus a montré que quatre des cinq individus de la culture de Koban sont des hommes et que l'unique Alain est une femme. Deux des hommes sont de l'haplogroupe du chromosome Y G2a alors qu'un troisième homme est de l'haplogroupe R1b.<br />
<br />
Les auteurs ont ensuite réalisé une Analyse en Composantes Principales afin de comparer ces anciens génomes avec d'autres anciens génomes de la région. Les résultats de la figure ci-dessous montrent clairement que les anciens individus de la culture de Koban sont proche génétiquement des anciens individus des cultures de l'Âge du Bronze de <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Culture_Kouro-Araxe" hreflang="fr">Kouro-Araxe</a> et de <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Culture_de_Ma%C3%AFkop" hreflang="fr">Maïkop</a> d'un côté et des anciens Alains de l'autre. De manière intéressante l'Alain de cette étude se retrouve à mi chemin entre les Alains (losanges bleus) et les Scythes (symboles jaunes) dont le génome a été préalablement publié:<br />
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<img src="http://secher.bernard.free.fr/blog/public/2024_Sharko_FigureS7.png" alt="2024_Sharko_FigureS7.png, janv. 2024" style="display:table; margin:0 auto;" title="2024_Sharko_FigureS7.png, janv. 2024" />
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Les auteurs ont également fait une analyse avec le logiciel ADMIXTURE. La figure ci-dessous montre que le profil génétique des anciens individus de la culture de Koban ont un profil génétique similaire aux anciens Alains, et par rapport aux cultures de l'Âge du Bronze du Caucase, ils montrent une influence venue des nomades de la steppe:<br />
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<img src="http://secher.bernard.free.fr/blog/public/2024_Sharko_Figure4.png" alt="2024_Sharko_Figure4.png, janv. 2024" style="display:table; margin:0 auto;" title="2024_Sharko_Figure4.png, janv. 2024" /><br />
<br />
Enfin la comparaison avec les populations actuelles montre que les <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Koumyks" hreflang="fr">Koumyks</a> et <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Lezghiens" hreflang="fr">Lezghiens</a> ont hérité du profil génétique des anciens individus de la culture de Koban.<br />
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En conclusion cette étude a démontré une certaine continuité dans le Caucase entre les populations de l'Âge du Bronze et la culture de Koban malgré un certain flux de gènes venu des steppes.</p>http://secher.bernard.free.fr/blog/index.php?post/2024/01/07/G%C3%A9nomes-anciens-dans-la-culture-de-Koban-du-nord-Caucase#comment-formhttp://secher.bernard.free.fr/blog/index.php?feed/atom/comments/612Un individu d'ascendance sarmate en Grande-Bretagne Romaineurn:md5:88689ab252b4c56c3002bc213184ec812024-01-03T18:27:00+01:002024-01-03T18:27:49+01:00Bernard SécherADN ancien <p>Des restes humains ont été découverts dans une tombe isolée près du village d'Offord Cluny situé dans le Cambridgeshire au sud-est de l'Angleterre. Une analyse ostéologique a montré que cet individu est un jeune adulte âgé entre 18 et 25 ans. Son sexe n'a pu être déterminé. Marina Silva et ses collègues viennent de publier un papier intitulé: <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0960982223016342" hreflang="en">An individual with Sarmatian-related ancestry in Roman Britain</a>. Une mesure radiocarbone sur une dent a donné une datation comprise entre 126 et 228 après Jésus-Christ. Ils ont également analysé le génome de cet individu. Les résultats ont montré que cet individu était un homme. Les auteurs ont ensuite réalisé une Analyse en Composantes Principales pour pouvoir comparer ce génome (symbole carré jaune ci-dessous) avec celui d'autres anciens individus. De manière intéressante il se différencie de tous les autres génomes de Grande-Bretagne de l'époque Romaine (symboles carrés rouge ci-dessous). Par contre il se situe proche des anciens génomes d'Anatolie et du Caucase. Notamment il a des affinités génétiques avec des individus de la fin de l'Âge du Bronze d'Arménie et des <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Alains" hreflang="fr">Alains</a> appartenant à la confédération des <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Sarmates" hreflang="fr">Sarmates</a>, situés au nord du Caucase:<br />
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<img src="http://secher.bernard.free.fr/blog/public/2023_Silva_Figure1.png" alt="2023_Silva_Figure1.png, janv. 2024" style="display:table; margin:0 auto;" title="2023_Silva_Figure1.png, janv. 2024" />
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Ces résultats sont confirmés par l'utilisation de la statistique f4.<br />
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Son haplogroupe du chromosome Y est R1b-Y13369 une sous-branche de l'haplogroupe R1b-Z2103 fréquent dans la population Yamnaya de l'Âge du Bronze. Cet haplogroupe a été retrouvé chez d'anciens individus d'Arménie. Aujourd'hui on le retrouve dans des populations du Caucase, d'Anatolie et du Proche-Orient. Son haplogroupe mitochondrial est K1a trouvé en Anatolie et au Levant au Néolithique, ainsi qu'en Europe.<br />
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Les auteurs ont ensuite utilisé les logiciels qpWave et QpAdm. Les résultats montrent que la seule source possible pour cet individu d'Offord Cluny est la population d'Arménie de la fin de l'Âge du Bronze. Cependant cette population pré-date l'individu d'Offord Cluny d'environ un millénaire, et n'est donc pas bien représentative des ascendances du premier millénaire dans le Caucase. Par contre cet individu pourrait être issu d'un mélange génétique entre une population Sarmate (entre 24 et 34%) et une population d'Arménie de l'antiquité:<br />
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<img src="http://secher.bernard.free.fr/blog/public/2023_Silva_Figure2.png" alt="2023_Silva_Figure2.png, janv. 2024" style="display:table; margin:0 auto;" title="2023_Silva_Figure2.png, janv. 2024" /><br />
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Les auteurs ont ensuite mesuré les isotopes du carbone, de l'azote, de l'oxygène et du strontium. La valeur du strontium sur une seconde molaire représentative d'un âge de 5 ou 6 ans est compatible avec les valeurs d'Angleterre. Cependant cette valeur est commune a de nombreux sols géologiques sur la planète. D'autre part la valeur de l'oxygène est plus faible que les valeurs d'Angleterre. Elle est compatible avec une région plus froide de climat continental. Les valeurs du carbone et de l'azote indiquent une diète riche en plantes C4 non natives en Angleterre, avec peu de ressources marines. De plus les valeurs mesurées à différents âges montrent un changement de régime alimentaire autour de l'âge de cinq ans lorsque les valeurs du carbone passent brutalement de -12‰ à -16‰ caractéristique d'un changement d'un régime à base de plantes C4 à un régime à base d'un mélange de plantes C3 et C4, et lorsque les valeurs de l'azote passent de 8‰ à 10‰ correspondant à une augmentation de la consommation de viande:<br />
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<img src="http://secher.bernard.free.fr/blog/public/2023_Silva_Figure3.png" alt="2023_Silva_Figure3.png, janv. 2024" style="display:table; margin:0 auto;" title="2023_Silva_Figure3.png, janv. 2024" /><br />
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Un deuxième changement intervient à l'âge de neuf ans lorsque les valeurs du carbone passent de -15‰ à -19‰ vers l'âge de 13 ans, ce qui correspond alors à une diète basée principalement sur des plantes C3. Ces changements des valeurs isotopiques pourraient correspondre à des mouvements géographiques de cet individu durant son enfance.<br />
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L'âge de l'individu d'Offord Cluny à sa mort est compatible avec la mort d'un soldat de l'armée Romaine. Une possibilité, sachant que la datation de cet individu est comprise entre 126 et 228, pourrait être le déploiement de la cavalerie Sarmate dans l'armée Romaine en l'an 175, à la suite de la victoire de Marc Aurèle durant les <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Guerres_marcomanes" hreflang="fr">guerres marcomanes</a> décrite par l'historien Romain: <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Dion_Cassius" hreflang="fr">Cassius Dion</a>.</p>http://secher.bernard.free.fr/blog/index.php?post/2024/01/03/Un-individu-d-ascendance-sarmate-en-Grande-Bretagne-Romaine#comment-formhttp://secher.bernard.free.fr/blog/index.php?feed/atom/comments/611Segments d'ADN identiques par descendance dans plusieurs populations de l'Âge du Bronze en Eurasieurn:md5:b2677842e210fc3cc250d230728e8fce2023-12-26T16:02:00+01:002023-12-26T16:09:26+01:00Bernard SécherADN ancien <p>De longs segments d'ADN partagés entre deux individus, appelés identité par descendance (IBD), révèlent des ancêtres communs récents entre ces deux individus. Plusieurs méthodes existent actuellement pour rechercher ces segments d'ADN, mais elles demandent une bonne qualité des deux génomes considérés. Elles sont donc rarement utilisables sur des génomes issus d'anciens individus à cause de leur trop faible couverture.<br />
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Harald Ringbauer et ses collègues viennent de publier un papier intitulé: <a href="https://www.nature.com/articles/s41588-023-01582-w" hreflang="en">Accurate detection of identity-by-descent segments in human ancient DNA</a>. Ils présentent une nouvelle méthode de détection de segments IBD applicable à l'ADN ancien. Ils sont ainsi capable de détecter des segments identiques par descendance de longueur supérieure à 8 cM sur des génomes anciens avec une couverture supérieure à 0,25 pour les génomes séquencés et 1 pour les génomes issus de capture de SNPs.<br />
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Les auteurs ont mis en pratique leur nouvelle méthode sur un ensemble de 4248 anciens génomes d'Eurasie. Ils ont tracé un graphique donnant le nombre de segments IBD de longueur supérieure à 12 cM en fonction de la longueur totale de la somme de tous les segments IBD partagés entre deux individus. La figure ci-dessous représente à gauche le résultat obtenus sur les génomes anciens et à droite une simulation obtenue sur des individus reliés jusqu'au sixième degré:<br />
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<img src="http://secher.bernard.free.fr/blog/public/2023_Ringbauer_Figure3A.png" alt="2023_Ringbauer_Figure3A.png, déc. 2023" style="display:table; margin:0 auto;" title="2023_Ringbauer_Figure3A.png, déc. 2023" /><br />
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La méthode permet d'identifier deux groupes reliés au premier degré en vert foncé: un premier cluster à droite contenant les relations parent/enfant, et une autre cluster de frères et sœurs, deux groupes reliés au second degré en vert clair: un premier cluster en bas contenant les relations grand-parent/petit-enfant, et un autre cluster en haut reliant oncle-tante/neveu-nièce. La méthode permet également d'identifier un groupe relié au troisième degré en jaune. Ensuite, tous les couples reliés entre le quatrième et le sixième degré se regroupent ensemble en bas à gauche de la figure ci-dessus.<br />
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Les auteurs ont ensuite appliqué la méthode à un nombre limité d'anciens génomes d'Eurasie datés entre 3000 et 2000 av. JC. Ils ont ainsi sélectionné 304 anciens génomes appartenant à 24 groupes archéologiques différents. Ainsi plusieurs groupes du complexe Yamnaya partagent un grand nombre de segments IBD. Ils en partagent aussi beaucoup avec les individus de la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Culture_d%27Afanasievo" hreflang="fr">culture Afanasievo</a>, qui est considérée comme une migration Yamnaya vers l'est, au-delà des montagnes de l'Altaï. Deux anciens individus de la culture Afanasievo distants de 1410 km, l'un en Mongolie centrale et l'autre du sud de la Russie partagent de longs segments IBD correspondant à une relation au 5ème degré:<br />
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<img src="http://secher.bernard.free.fr/blog/public/2023_Ringbauer_Figure4.png" alt="2023_Ringbauer_Figure4.png, déc. 2023" style="display:table; margin:0 auto;" title="2023_Ringbauer_Figure4.png, déc. 2023" /><br />
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D'autre part, différents individus appartenant à différents groupes de la culture Cordée, partagent de longs segments IBD avec des individus du complexe Yamnaya. De plus, tous les individus de la culture Cordée partagent de longs segments IBD avec des individus de la culture des amphores globulaires de Pologne et d'Ukraine. La composantes des fermiers d'Europe présente chez les individus de la culture Cordée vient donc d'un mélange génétique avec des individus de la culture des amphores globulaires.</p>http://secher.bernard.free.fr/blog/index.php?post/2023/12/24/Segments-d-ADN-identiques-par-descendance-dans-plusieurs-populations-de-l-%C3%82ge-du-Bronze-en-Eurasie#comment-formhttp://secher.bernard.free.fr/blog/index.php?feed/atom/comments/610Histoire génétique des Balkans entre l'empire Romain et les migrations Slavesurn:md5:f9638a6e53071c603a092fbd69ed55ca2023-12-23T16:40:00+01:002023-12-23T16:40:52+01:00Bernard SécherADN ancien <p>Au second siècle de notre ère, l'empire Romain s'étend de la Mésopotamie et l'Arabie à l'est jusqu'à la Grande Bretagne à l'ouest, et des rives du Rhin au nord jusqu'au Sahara au sud. Il a stimulé le mouvement de populations volontairement ou non. Les Balkans ont toujours été un carrefour historique. Entre le premier et le sixième siècle de notre ère, les frontières de l'empire Romain dans le bassin moyen de la vallée du Danube, situées dans l'actuelle Serbie et Croatie, étaient une zone de défense contre les populations vivant au nord. Cette région a été urbanisée et Romanisée. Entre 268 et 610, plus de la moitié des empereurs Romains était originaires de cette région. A la fin de l'antiquité cette région a subi de nombreuses invasions: Goths, Huns, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/G%C3%A9pides" hreflang="fr">Gépides</a>, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Avars_(Caucase)" hreflang="fr">Avars</a>, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/H%C3%A9rules" hreflang="fr">Hérules</a>, Lombards et Slaves. La fin de l'hégémonie impériale Romaine coïncida avec l'arrivée de ces derniers qui étaient suffisamment nombreux pour marquer de façon durable la culture des Balkans.<br />
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Iñigo Olalde et ses collègues viennent de publier un papier intitulé: <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0092867423011352" hreflang="en">A genetic history of the Balkans from Roman frontier to Slavic migrations</a>. Ils ont analysé le génome de 136 anciens individus issus de vingt sites archéologiques des actuelles Croatie et Serbie dont Viminacium la capitale de la province Romaine de <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/M%C3%A9sie" hreflang="fr">Mésie</a>, située à la confluence du Danube et de la rivière Mlava (symboles rouges ci-dessous), et six d'Autriche, de République Tchèque et de Slovaquie datés pour la très grosse majorité entre l'an zéro et l'an mille:<br />
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<img src="http://secher.bernard.free.fr/blog/public/2023_Olalde_Figure1A.png" alt="2023_Olalde_Figure1A.png, déc. 2023" style="display:table; margin:0 auto;" title="2023_Olalde_Figure1A.png, déc. 2023" /><br />
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Les auteurs ont effectué une Analyse en Composantes principales pour comparer l'ensemble de ces anciens génomes avec d'autres préalablement publiés et des génomes d'individus contemporains. La figure ci-dessous montre deux gradients horizontaux qui s'étalent le long de la première composante: le gradient des populations des Balkans de l'Âge du Bronze et de l'Âge du Fer (zones violettes ci-dessous) et le gradient des populations actuelles des Balkans (zone jaune ci-dessous mise en valeur dans la figure D du quart supérieur droit de la figure ci-dessous):<br />
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<img src="http://secher.bernard.free.fr/blog/public/2023_Olalde_Figure1C.png" alt="2023_Olalde_Figure1C.png, déc. 2023" style="display:table; margin:0 auto;" title="2023_Olalde_Figure1C.png, déc. 2023" /><br />
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Ces résultats suggèrent une certaine forme de continuité dans les Balkans entre l'Âge du Fer et maintenant, mais montrent également l'impact d'un flux de gènes important sur toute la région qui a décalé tous les génomes vers le haut durant les 2000 dernières années. Les échantillons du premier millénaire de cette étude montrent une plus grande hétérogénéité dans la figure ci-dessus que la population de l'Âge du Fer, liée à des mouvements de population sur de longues distances.<br />
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La moitié des anciens individus datés entre 0 et 250 sont issus uniquement des groupes des Balkans de l'Âge du Fer. La moitié des hommes de ce groupe appartiennent à l'haplogroupe du chromosome Y: E1b-V13. Ce sont des descendants des groupes locaux de l'Âge du Fer qui se sont parfaitement intégrés dans la société Romaine. Malgré le grand nombre de colonies Romaines dans les Balkans aucun homme de cette période appartient à l'haplogroupe du chromosome Y: R1b-U152 qui est le plus fréquent dans la péninsule Italienne à l'Âge du Bronze et à l'Âge du Fer. Ainsi très peu de Romains sont venus s'installer dans les Balkans à l'apogée de l'empire. Cependant un tiers de ces individus sont positionnés dans la PCA, en dehors des gradients décrits ci-dessus. Ils se situent proches des populations Proche-Orientales: population Byzantine, de l'ouest de l'Anatolie ou du Levant. La plupart de ces individus viennent d'une des nécropoles de Viminacium. Les études précédentes ont également montré un décalage des populations Romaines de Rome et d'Italie, vers les populations Proche-Orientales à la même époque. Ainsi l’influence de ces populations Proche-Orientales se fait jour non seulement dans la capitale de l'empire Romain, mais aussi dans les principales villes de l'empire. Si le sexe des individus d'origine locale de cette période est bien équilibré (onze hommes et onze femmes), il n'en va pas de même pour les populations d'origine Proche-Orientale puisque il y a seulement deux femmes pour dix hommes. Ces individus d'origine Proche-Orientale se retrouvent dans les mêmes nécropoles que les individus d'origine locale. Il n' y a pas de ségrégation en fonction de l'origine. Trois individus d'origine Proche-Orientale de la nécropole de Rit à Viminacium, sont enterrés dans un sarcophage de pierre avec un riche mobilier archéologique suggérant pour ces trois personnes un haut statut social. La source Proche-Orientale dans les Balkans se tarit après l'an 300. Cependant au début du Moyen-Âge l'ascendance Proche-Orientale représente en moyenne 23% dans la population des Balkans.<br />
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Cette étude rapporte également quelques mouvement de personnes sur de longues distances. En effet trois hommes datés des 2d et 3ème siècles sont décalés sur la PCA vers les populations Africaines. Ainsi deux individus ont respectivement 33% et 100% d'ascendance nord Africaine et le troisième a 100% d'ascendance est Africaine avec des haplogroupes mitochondriaux L2a1j et du chromosome Y: E1b-V32, les deux communs aujourd'hui en Afrique de l'est. Cet individu a été enterré avec une lampe à huile représentant l'iconographie de l'aigle liée à Jupiter. Les analyses isotopiques sur cet individu montre également qu'il venait d'une région étrangère et qu'il avait une diète différente des autres individus de la même nécropole.<br />
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Aux 3ème et 4ème siècles les résultats montrent que des individus originaires du centre et du nord de l'Europe et d'autres originaires des steppes arrivent dans les Balkans. Les auteurs ont retrouvé ces deux sources exogènes dans les mêmes individus suggérant que le mélange génétique s'est fait en dehors des Balkans, bien qu'il y ait quelques exceptions comme deux individus contemporains de la nécropole de Pecine à Viminacium qui possèdent respectivement 36% et 50% d'ascendance des steppes, sans aucune contribution d'Europe centrale ou du nord. Les individus portant ces deux ascendances sont situés dans les mêmes nécropoles comme Pecine et Vise Grobalja à Viminacium. De manière intéressante, la plupart des hommes d'origine 100% locale ont pour haplogroupe du chromosome Y: I1, R1b-U106 ou R1a-Z93, communs pour les deux premiers dans le nord de l'Europe et pour le troisième dans les steppes. Ces résultats suggèrent une organisation sociale patrilocale qui résulte dans la persistance des lignages des hommes venus de l'extérieur à cause de la sélection sociale à l’œuvre dans la reproduction de ces populations. Ces résultats reflètent la rencontre des Romains avec diverses populations transfrontalières comme les Goths. Certains de ces individus ont intégré la société Romaine bien avant la chute du contrôle Romain sur la région. Cela confirme l'importance de processus tels que la migration, le recrutement et l’installation dans l’histoire démographique des Balkans à la fin de l'antiquité. De manière surprenante, les ascendances nord et centre Européenne et des steppes disparaissent complètement après l'an 700.<br />
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Après 700, une nouvelle ascendance apparait dans les Balkans. Ces niveaux individus se situent sur la PCA au même endroit que les individus de la période précédente d'ascendance nord et centre Européenne ou des steppes. Cependant on distingue un décalage après 700 des populations des Balkans vers les populations actuelles Slaves d'Europe de l'est. Ce résultat est largement confirmé par l'emploi de la statistique f4. Cependant, ce décalage vers les populations est Européennes apparait sporadiquement dans les périodes antérieures. Ainsi une femme décédée au 2d ou 3ème siècle de la nécropole de Vise Grobalja présente une ascendance 100% est Européenne. Dans cette étude la très grosse majorité des individus avec une ascendance est Européenne sont datés entre le 7ème et le 10ème siècle. Les migrations Slaves ont débuté dès le 6ème siècle, mais cette migration précoce n'apparait pas dans cette étude. Sur les sept individus des Balkans possédant plus de 90% d'ascendance est Européenne et qui représentent des migrants de première génération, il y a trois femmes. De manière intéressante, sur le site fortifié de Brekinjova Kosa en Croatie deux individus datés entre 770 et 890, sont enterrés dans la même tombe. Le plus jeune a 97% d'ascendance est Européenne, alors que le plus âgé est 100% d'ascendance locale. Ce résultat donne une indication de l'intégration de la nouvelle population Slave dans la société des Balkans. D'autre part, sur le site de Dvorac en Croatie une femme avec 90% d’ascendance Slave a un fils avec seulement 64% de cette ascendance, ce qui suggère l'intégration de cette femme Slave dans la société des Balkans. Les populations actuelles de Serbie, Croatie, Bulgarie et Roumanie possèdent entre 50 et 60% d’ascendance est Européenne suggérant une forte persistance de cette composante dans la population des Balkans. Cette proportion décroit cependant dans les populations actuelles de la région Égéenne située plus au sud.</p>http://secher.bernard.free.fr/blog/index.php?post/2023/12/23/Histoire-g%C3%A9n%C3%A9tique-des-Balkans-entre-l-empire-Romain-et-les-migrations-Slaves#comment-formhttp://secher.bernard.free.fr/blog/index.php?feed/atom/comments/609Trois vagues successives structurent le premier Paléolithique Supérieur en Europeurn:md5:ad6e224a5082d7da04654280528fc7e82023-12-18T18:02:00+01:002023-12-19T08:38:32+01:00Bernard SécherPaléo-anthropologie <p>L'<a href="http://secher.bernard.free.fr/blog/index.php?post/2023/12/17/Incursion-de-l-homme-moderne-en-territoire-Neandertal-il-y-a-54.000-ans-dans-la-grotte-Mandrin-en-France" hreflang="fr">attribution récente</a> du Néronien à Homo sapiens il y a environ 54.000 ans à la grotte Mandrin, non seulement repousse l'arrivée des hommes modernes en Europe de plus de 10.000 ans, mais également suggère des interactions entre Néandertal et Homo sapiens dans une région spécifique. A Mandrin, une seule année au maximum sépare le départ de Néandertal et l'arrivée de l'homme moderne permettant d'appréhender d’éventuelles interactions entre ces deux humanités. D'autre part les correspondances entre le Néronien et le Paléolithique Supérieur Initial du Proche-Orient questionne la validité de concepts qui définissent les premières migrations d'hommes modernes en Europe.<br />
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Ludovic Slimak vient de publier un papier intitulé: <a href="https://journals.plos.org/plosone/article?id=10.1371/journal.pone.0277444" hreflang="en">The three waves: Rethinking the structure of the first Upper Paleolithic in Western Eurasia</a>. Il discute la structure des connexions qu'il est désormais possible d'établir entre les rives de la Méditerranée orientale et occidentale et souligne les connexions technologiques inattendues et la remarquable homogénéité culturelle des sociétés d'Homo sapiens lors de leur colonisation en Europe, ce qui semble désormais indiquer l'existence de trois vagues distinctes de migration vers le continent Européen.<br />
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La séquence stratigraphique du site archéologique de <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Ksar_Akil" hreflang="fr">Ksar Akil</a> au Liban occupe une place clé dans la compréhension des sociétés paléolithiques de la Méditerranée orientale. Cette grotte est située 10 km au nord est de Beyrouth et domine la plaine côtière depuis les contreforts du mont Liban. Les fouilles archéologiques ont révélé 22,6 m de dépôts datés entre le Paléolithique Moyen et L'Épipaléolithique. Ce site constitue une des stratigraphies les plus complètes concernant la transition entre le Paléolithique Moyen et le Paléolithique Supérieur. Les fouilles archéologiques conduites par Ewing ont eu lieu en 1937/1938 et 1947/1948, puis celles conduites par Tixier entre 1969 et 1975. La stratigraphie complète est divisée en 36 couches archéologiques. Les couches 36 à 26 correspondent au Paléolithique Moyen, les couches 25 à 21 correspondent au Paléolithique Supérieur Initial et les couches 20 à 16 correspondent au début du Paléolithique Supérieur. Des correspondances ont déjà été faites entre les enregistrements Levantins et Européens. Ainsi, l'Aurignacien correspond aux couches 9 et 10 de Ksar Akil.<br />
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L'étude de la stratigraphie de Ksar Akil montre un changement abrupt entre les couches 26 à 24 correspondant à la transition entre le Paléolithique Moyen et le Paléolithique Supérieur. Ensuite les couches du Paléolithique Supérieur montrent clairement trois phases distinctes de développement:</p>
<ul>
<li>une première phase de pointes Levallois unipolaires</li>
<li>une deuxième phase de pointes à bord abattu provenant principalement de débitages laminaires bipolaires</li>
<li>une troisième phase de lamelles aiguës rectilignes issues de débitages convergents unipolaires</li>
</ul>
<p>Le Proto-Aurignacien Européen correspond ici à la troisième phase du site de Ksar Akil et aux couches 13 et celles situées au-dessus. Le Néronien de la grotte Mandrin correspond à la première phase du site de Ksar Akil et aux couches 25 à 21. La figure ci-dessous montre qu'aucune distinction ne peut être faite entre ces deux industries situées aux deux extrémités de la Méditerranée:<br />
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<img src="http://secher.bernard.free.fr/blog/public/2023_Slimak_Figure8.png" alt="2023_Slimak_Figure8.png, déc. 2023" style="display:table; margin:0 auto;" title="2023_Slimak_Figure8.png, déc. 2023" /><br />
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L'analyse de la seconde phase du site de Ksar Akil montre un nombre important de points techniquement et typologiquement indiscernables de ceux du <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Ch%C3%A2telperronien" hreflang="fr">Châtelperronien</a> attesté en France et dans le nord-est de l'Espagne. Certains chercheurs attribuent le Châtelperronien aux derniers Néandertaliens d'Europe qui se seraient acculturés au contact des premiers Hommes modernes arrivés en Europe. L'attribution du Châtelperronien aux Néandertaliens n'est toutefois pas complètement assurée, du fait de la rareté et de l'ambigüité stratigraphique des restes humains fossiles liés à la culture matérielle du Châtelperronien. Dans cette étude, sa similarité avec la seconde phase de Ksar Akil indique cependant à l'auteur que cette industrie est liée à Homo sapiens et non à Néandertal.<br />
<br />
En résumé, l'auteur de cette étude propose d'associer les trois phases de la stratigraphie du site archéologique de Ksar Akil au Liban associées à l'homme moderne, au Néronien, au Châtelperronien et au Proto-Aurignacien. En Europe, ces trois phases sont distribuées géographiquement de manière différente. La première phase semble localisée uniquement dans la vallée du Rhône pour le Néronien mais aussi en Europe de l'est entre la république Tchèque et l'Ukraine pour le <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Bohunicien" hreflang="fr">Bohunicien</a> et le Kréménicien. La seconde phase se retrouve en France et dans le nord-est de l'Espagne. Seule la dernière phase se retrouve dans toute l'Europe. Il semble que les Néroniens de la vallée du Rhône n'aient pas laissé de descendants. Ce groupe est resté environ quarante ans dans la grotte Mandrin. Il a laissé une dent appartenant à un enfant suggérant que ce groupe était composé d'hommes, de femmes et d'enfants. Il est fort probable que ce groupe a eu des contacts avec les Néandertaliens avoisinants. Le Châtelperronien semble correspondre à une seconde vague migratoire d'Homo sapiens en Europe autour de 45.000 ans, depuis le Levant. Pendant cette seconde phase, la vallée du Rhône est habitée par Néandertal. <a href="http://secher.bernard.free.fr/blog/index.php?post/2023/04/15/Le-g%C3%A9nome-d-un-homme-de-Neandertal-issu-de-la-grotte-Mandrin-dans-la-vall%C3%A9e-du-Rh%C3%B4ne" hreflang="fr">Une étude récente</a> a montré que ce groupe Néandertalien est relié génétiquement aux Néandertals de Gibraltar. Enfin la troisième vague migratoire d'Homo sapiens en Europe correspond au Proto-Aurignacien et est distribuée sur toute l'Europe. Elle marque véritablement les débuts de l’installation pérenne d'Homo sapiens sur le continent Européen. Elle marque également la disparition de Néandertal:<br />
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<img src="http://secher.bernard.free.fr/blog/public/2023_Slimak_Figure9.png" alt="2023_Slimak_Figure9.png, déc. 2023" style="display:table; margin:0 auto;" title="2023_Slimak_Figure9.png, déc. 2023" /></p>http://secher.bernard.free.fr/blog/index.php?post/2023/12/18/Trois-vagues-successives-structurent-le-premier-Pal%C3%A9olithique-Sup%C3%A9rieur-en-Europe#comment-formhttp://secher.bernard.free.fr/blog/index.php?feed/atom/comments/608Incursion de l'homme moderne en territoire Néandertal il y a 54.000 ans dans la grotte Mandrin en Franceurn:md5:3452856129029098934c82d679fc8c7f2023-12-17T22:03:00+01:002023-12-17T22:03:29+01:00Bernard SécherPaléo-anthropologie <p>Homo sapiens apparait en Afrique il y a environ 300.000 ans et les hommes anatomiquement modernes il y a au moins 195.000 ans. Les premières sorties d'Afrique de l'homme moderne se trouvent en Israël entre 194.000 et 177.000 ans et peut-être en Grèce il y a 210.000 ans. On suppose que le Levant a joué un rôle fondamental dans la dispersion d'Homo sapiens sur la terre, bien que les vestiges fossiles dans cette région soient distribués inégalement. Des restes d'hommes modernes sont retrouvés en Asie de l'est il y a 80.000 ans et l'archéologie indique qu'ils ont atteint l'Australie il y a 65.000 ans. Cependant en Europe les premières traces de l'homme moderne apparaissent seulement entre 45.000 et 43.000 ans en Italie et en Bulgarie. Sur ce continent Néandertal disparait autour de 40.000 ans. Un peu avant cette date, apparaissent, à la suite du <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Moust%C3%A9rien" hreflang="fr">Moustérien</a>, les cultures de transition comme l'<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Uluzzien" hreflang="fr">Uluzzien</a>, le <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Ch%C3%A2telperronien" hreflang="fr">Châtelperronien</a> ou le <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Bohunicien" hreflang="fr">Bohunicien</a> dont l'identité taxonomique de l'artisan reste intensément débattue. Ces cultures laissent ensuite la place au proto-Aurignacien et à l'Aurignacien associés à l'homme moderne. Les enregistrements archéologiques montrent systématiquement que les vestiges proto-Aurignaciens ou Aurignaciens sont découverts dans la stratigraphie, toujours dans les couches situées au-dessus des couches Néandertales, rendant impossible de montrer que Néandertal et Homo sapiens se soient rencontrés en Europe.<br />
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Ludovic Slimak et ses collègues ont publié l'année dernière un papier intitulé: <a href="https://www.science.org/doi/10.1126/sciadv.abj9496" hreflang="en">Modern human incursion into Neanderthal territories 54,000 years ago at Mandrin, France</a>. Ils ont découvert des traces de Néandertal et d'Homo sapiens dans la grotte Mandrin.<br />
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La grotte Mandrin est située à côté de la ville de Malataverne, sur la rive orientale du Rhône, à une altitude de 225 m. Les fouilles ont commencé sur ce site en 1990:<br />
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<img src="http://secher.bernard.free.fr/blog/public/2022_Simak_Figure1.png" alt="2022_Simak_Figure1.png, déc. 2023" style="display:table; margin:0 auto;" title="2022_Simak_Figure1.png, déc. 2023" /><br />
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La séquence stratigraphie de 3 m d'épaisseur comprend 12 couches entre le Paléolithique Moyen et le Paléolithique Supérieur. Elle est particulièrement bien préservée et datée directement par de nombreux artefacts. Les site a fournit environ 60.000 pièces lithiques et 70.000 restes animaux dont principalement du cheval, du bison et du cerf. De manière intéressante, la couche E contient une industrie remarquable caractérisée par de petites pointes standardisées dont certaines ne mesurent pas plus de 1 cm de longueur. Ces pointes représentent une différence technologique substantielle par rapport aux couches Moustériennes Néandertales de la grotte Mandrin. Cette industrie a été appelée le Néronien en référence à la même industrie lithique retrouvée dans quelques sites voisins, notamment à la grotte de Néron. Jusqu'à maintenant l'industrie Néronienne n'a été découverte dans aucun autre site archéologique et ses artisans n'ont pas été identifiés:<br />
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<img src="http://secher.bernard.free.fr/blog/public/2022_Simak_Figure2.png" alt="2022_Simak_Figure2.png, déc. 2023" style="display:table; margin:0 auto;" title="2022_Simak_Figure2.png, déc. 2023" />
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Dans la grotte Mandrin les restes humains consistent en neuf dents représentant au minimum sept individus différents. Des analyses d'ADN ancien ont été tentées sur des restes de chevaux de la grotte Mandrin. Cependant la pauvre préservation de l'ADN sur ces échantillons ont poussé les auteurs a ne pas tenter des analyses ADN sur les restes humains. Les auteurs ont alors investigué la structure morphologique de ces dents humaines afin d'essayer de déterminer si elles appartiennent à Néandertal ou à l'homme moderne:<br />
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<img src="http://secher.bernard.free.fr/blog/public/2022_Simak_Figure5.png" alt="2022_Simak_Figure5.png, déc. 2023" style="display:table; margin:0 auto;" title="2022_Simak_Figure5.png, déc. 2023" /><br />
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Ainsi la combinaison de l'étude de caractéristiques dentaires métriques et non métriques a permis de déterminer sans aucun doute que les dents des couches G, F, D et C appartiennent à Néandertal et que la dent de la couche E appartient à l'homme moderne. Ainsi, à la grotte Mandrin, les fouilles montrent que Néandertal et l'homme moderne se sont remplacés l'un l'autre à plusieurs reprises:<br />
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<img src="http://secher.bernard.free.fr/blog/public/2022_Simak_Figure6.png" alt="2022_Simak_Figure6.png, déc. 2023" style="display:table; margin:0 auto;" title="2022_Simak_Figure6.png, déc. 2023" /><br />
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La datation de la stratigraphie a été réalisée à partir de nombreuses mesures radiocarbones AMS. Notamment la couche E contenant les vestiges de l'homme moderne est datée entre 56.800 et 51.700 ans:<br />
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<img src="http://secher.bernard.free.fr/blog/public/2022_Simak_Figure8.png" alt="2022_Simak_Figure8.png, déc. 2023" style="display:table; margin:0 auto;" title="2022_Simak_Figure8.png, déc. 2023" /><br />
<br />
L'industrie lithique Néronienne de la couche E montre une forte similarité avec une industrie présente dans la grotte Ksar Akil au Liban, associée au Paléolithique supérieur initial (IUP) et datée entre 45.000 et 39.000 ans. La comparaison statistique de la forme des pointes dans les deux sites ne montre pas de différence significative. Des restes appartenant à l'homme moderne ont également été retrouvés dans les couches de cette industrie à Ksar Akil. La similarité entre l'industrie IUP de Ksar Akil et celle de la couche de la grotte Mandrin suggère que des hommes modernes se sont dispersés en Europe depuis le Proche-Orient 12.000 ans plus tôt que ce que l'on pensait jusqu'ici.</p>http://secher.bernard.free.fr/blog/index.php?post/2023/12/17/Incursion-de-l-homme-moderne-en-territoire-Neandertal-il-y-a-54.000-ans-dans-la-grotte-Mandrin-en-France#comment-formhttp://secher.bernard.free.fr/blog/index.php?feed/atom/comments/607Anciens génomes pré-islamiques de Bahreïnurn:md5:ea7f26e7af79ebaf89853d397115f5ea2023-12-14T14:58:00+01:002024-03-02T21:12:09+01:00Bernard SécherADN ancien <p>L'histoire du peuplement de l'île de <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Bahre%C3%AFn">Bahreïn</a> commence avec des vestiges de silex et de poterie datés d'environ 5000 av. JC. Ensuite, à partir de 2200 av. JC., des références dans les archives cunéiformes mésopotamiennes au pays de <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Dilmun" hreflang="fr">Dilmun</a> suggèrent que cette île était un centre commercial qui a joué un rôle important dans la mythologie sumérienne, y compris dans la création des mythes et dans l'épopée de Gilgamesh. Cette période voit également le début d'une tradition funéraire qui aboutira à la plus forte densité de tumulus funéraires du monde antique. La fin de la phase Dilmun tardive (~ 600 av. JC.) a coïncidé avec la conquête perse achéménide de la Mésopotamie, dont l'influence à Bahreïn (600-300 av. JC.) est attestée par la présence de bols et d'autres objets typiques de cette culture. Vers 325 av. JC., une expédition sur la côte arabe envoyée par Alexandre le Grand atteint les côtes de Bahreïn, qui sera désormais connue sous le nom de Tylos. La période Tylos (entre 325 av. JC. et 600 ap. JC.) a été caractérisée par une prospérité exceptionnelle et marquée par l'influence hellénistique et perse. La mort d'Alexandre et la désintégration ultérieure de l'Empire macédonien ont conduit à l'établissement de l'<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/S%C3%A9leucides" hreflang="fr">Empire séleucide</a> (entre 312 et 63 av. JC.), qui dominait une vaste zone comprenant l'Anatolie, le Levant, la Mésopotamie et l'Iran, contrôlant également les îles arabes orientales de Failaka et Bahreïn. Les Séleucides perdirent finalement leur autorité en Mésopotamie, conduisant à la formation du royaume semi-indépendant de <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Charac%C3%A8ne" hreflang="fr">Characène</a> (entre 141 av. JC. et 222 ap. JC.) dans le sud de l'Irak, vassal de l'empire parthe qui gouverna Bahreïn jusqu'à la conquête <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Sassanides" hreflang="fr">sassanide</a>.<br />
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Rui Martiniano et ses collègues viennent de publier en pre-print un papier intitulé: <a href="https://www.biorxiv.org/content/10.1101/2023.10.01.559299v1" hreflang="en">Ancient genomes illuminate Eastern Arabian population history and adaptation against malaria</a>. Ils ont séquencé le génome de quatre anciens individus de l'île de Bahreïn datés de la période Tylos, dont un issu du site archéologique d'Abu Saiba et les trois autres issus du site de Madinat Hamad. Deux de ces individus du site de Madinat Hamad, ont fourni une datation radiocarbone. Les résultats obtenus sont entre 432 et 561 ap. JC. pour le premier et entre 577 et 647 ap. JC. pour le second. Ces deux individus sont donc de la fin de la période Tylos, juste avant l'expansion de l'Islam. Cependant le cimetière d'Abu Saiba est daté entre 200 av. JC et 300 ap. JC. Cet individu est donc plus ancien que les individus de Madinat Hamad:<br />
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<img src="http://secher.bernard.free.fr/blog/public/2023_Martiniano_FigureS1.png" alt="2023_Martiniano_FigureS1.png, déc. 2023" style="display:table; margin:0 auto;" title="2023_Martiniano_FigureS1.png, déc. 2023" /><br />
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Les auteurs ont réalisé une Analyse en Composantes Principales, afin de comparer ces anciens génomes à d'autres anciens génomes préalablement publiés et à des génomes contemporains. Les quatre anciens individus de Bahreïn sont localisés ci-dessous sur le gradient qui relie les anciennes populations occidentales (Anatolie et Levant) situées en bas aux anciennes populations orientales (Caucase, Iran et Pakistan) situées en haut. Ils se trouvent proches des anciens Néolithiques de la haute Mésopotamie au sud-est de la Turquie et au nord de l'Irak, des fermiers du Néolithique d'Arménie et d'Azerbaïdjan. Ils sont également proche d’individus plus récents comme des Iraniens du Chalcolithique et de l'Âge du Fer, et des Irakiens et Syriens de la fin de l'Âge du Bronze, ainsi que des groupes Levantins de la période Grecque ou Romaine. Tous ces individus sont issus de mélanges génétiques entre les trois sources Anatolienne, Levantine et Caucasienne/Iranienne:<br />
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<img src="http://secher.bernard.free.fr/blog/public/2023_Martiniano_Figure1A.png" alt="2023_Martiniano_Figure1A.png, déc. 2023" style="display:table; margin:0 auto;" title="2023_Martiniano_Figure1A.png, déc. 2023" /><br />
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Les quatre anciens individus de Bahreïn sont légèrement différenciés génétiquement puisque les individus de Madinat Hamad MH1_LT et MH2_LT sont décalés vers les populations orientales par rapport à l’individu plus ancien d'Abu Saiba, alors que le troisième individu de Madinat Hamad MH3_LT, est lui décalé vers les populations levantines.<br />
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Afin d'étudier leurs composantes ancestrales, les auteurs ont fait une analyse avec le logiciel DyStruct. Dans la figure ci-dessous la composante bleue est celle des fermiers du Néolithique d'Anatolie, la composante orange est celle des chasseurs-cueilleurs Natoufiens du Levant et la composant rose est celle des fermiers du Néolithique d'Iran. Les quatre individus de Bahreïn ont un profil génétique proche de ceux du Levant ou d'Iran datés entre le chalcolithique et l'âge du fer quoique qu'avec plus de composante Iranienne que les individus du Levant et plus de composante Natoufienne que les individus d'Iran. D'autre part, MH1_LT et MH2_LT possèdent un peu d'ascendance chasseurs-cueilleurs d'Europe (WHG/EHG):<br />
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<img src="http://secher.bernard.free.fr/blog/public/2023_Martiniano_Figure1B.png" alt="2023_Martiniano_Figure1B.png, déc. 2023" style="display:table; margin:0 auto;" title="2023_Martiniano_Figure1B.png, déc. 2023" /><br />
<br />
Ces résultats sont confirmés par la statistique f4.<br />
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Les auteurs ont ensuite utiliser le logiciel qpAdm pour modéliser le profil génétique des quatre anciens individus de Bahreïn. Ils ont ainsi modélisé ces individus comme issus d'un mélange génétique entre trois sources: chasseurs-cueilleurs du Caucase (CHG), fermiers d'Anatolie et chasseurs-cueilleurs Natoufiens du Levant. Ils ont également estimé les dates de mélange génétique à l'aide du logiciel DATES. Les résultats donnent des dates différentes entre ces individus. Ainsi l’individu d'Abu Saiba montre un mélange entre 357 et 455 av. JC. durant la période Achéménide, alors que les individus de Madinat Hamad montrent un mélange génétique durant le royaume de Characène:<br />
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<img src="http://secher.bernard.free.fr/blog/public/2023_Martiniano_Figure3C.png" alt="2023_Martiniano_Figure3C.png, déc. 2023" style="display:table; margin:0 auto;" title="2023_Martiniano_Figure3C.png, déc. 2023" /><br />
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Le graphe ci-dessus à droite résume les différents résultats obtenus. Ainsi le génome d'Abu Saiba est issue d'un mélange génétique entre une composante Levantine et une composante Iranienne. Les trois génomes plus tardifs de Madinat Hamad sont issus d'un mélange génétique entre la population précédente d'Abu Saiba et un flux de gènes Iranien pour MH1_LT et MH2_LT et un flux de gènes Levantin pour MH3_LT.<br />
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Les résultats précédents ont montré que les anciens individus de Bahreïn sont plus proches génétiquement des habitant actuels du Levant que de ceux d'Arabie. Les auteurs ont utilisé les logiciels ChromoPainter et FineSTRUCTURE pour investiguer un peu plus ce résultat. Ainsi avec le logiciel FineSTRUCTURE, trois anciens individus de Bahreïn se regroupent avec des individus actuels de Syrie et d'Irak, et deux juifs de Géorgie et d'Iran, et le quatrième se regroupe avec 22 anciens Libanais datés entre l'Âge du Bronze et la période Romaine:<br />
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<img src="http://secher.bernard.free.fr/blog/public/2023_Martiniano_Figure4A.png" alt="2023_Martiniano_Figure4A.png, déc. 2023" style="display:table; margin:0 auto;" title="2023_Martiniano_Figure4A.png, déc. 2023" /><br />
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Ces résultats sont confirmés par une Analyse en Composantes Principales basée sur les résultats du logiciel ChromoPainter:<br />
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<img src="http://secher.bernard.free.fr/blog/public/2023_Martiniano_Figure4B.png" alt="2023_Martiniano_Figure4B.png, déc. 2023" style="display:table; margin:0 auto;" title="2023_Martiniano_Figure4B.png, déc. 2023" /><br />
<br />
Sachant que la malaria est une maladie endémique de Bahreïn depuis les temps historiques, les auteurs ont recherché dans le génome des quatre anciens individus de Bahreïn les mutations associées à la protection contre cette maladie. Ainsi trois des quatre individus possèdent la mutation G6PD qui protège contre la malaria.</p>
<h3>Mise à jour</h3>
<p>Ce papier a été définitivement publié en février 2024: <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S2666979X2400034X?via%3Dihub" hreflang="en">Ancient genomes illuminate Eastern Arabian population history and adaptation against malaria</a></p>http://secher.bernard.free.fr/blog/index.php?post/2023/12/11/Anciens-g%C3%A9nomes-pr%C3%A9-islamiques-de-Bahre%C3%AFn#comment-formhttp://secher.bernard.free.fr/blog/index.php?feed/atom/comments/606Continuité génétique et changement parmi les peuples indigènes de Californieurn:md5:3e9ee704253001e290570adffded07a62023-12-09T17:35:00+01:002023-12-09T17:35:19+01:00Bernard SécherADN ancien <p>Les hommes vivent en Californie depuis au moins 13.000 ans d'après les vestiges archéologiques situés dans les <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Channel_Islands_de_Californie" hreflang="fr">îles du détroit de Californie</a> et sur le continent. Ces populations parlaient des <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Langues_chumash" hreflang="fr">langues chumash</a> au moment de l'arrivée des Européens. Cette région abrite une des plus grandes diversités linguistiques de toutes les Amériques. Dans le nord, les familles linguistiques sont les <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Langues_algiques" hreflang="fr">langues algiques</a> dont le <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Yurok" hreflang="fr">Yurok</a>, les <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Langues_athapascanes" hreflang="fr">langues athapascanes</a> dont le <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Hupa" hreflang="fr">Hupa</a> et les <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Yuki_(langue_yukiane)" hreflang="fr">langues yukianes</a>. Dans le centre, on trouve les <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Langues_miwok" hreflang="fr">langues miwok</a> parlées notamment par les tribus <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Ohlones" hreflang="fr">Ohlones</a>. Les langues chumash sont parlées dans le nord des îles du détroit de Californie et sur la côte continentale adjacente de la région de Santa Barbara. Dans le sud de la Californie, les populations parlent des <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Langues_uto-azt%C3%A8ques" hreflang="fr">langues uto-aztèques</a> dont le <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Gabrielino-fernande%C3%B1o" hreflang="fr">gabrielino-fernandeño ou tongva</a> et le <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Luise%C3%B1o_(langue)" hreflang="fr">luiseño</a>. Enfin il y a quelques langues isolées comme les <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Langues_yumanes" hreflang="fr">langues yumanes</a> ou le <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Washo" hreflang="fr">washo</a>. La manière dont ces familles linguistiques divergentes sont apparues dans cette région avec une telle proximité doit être comprise dans un contexte plus large. En effet, la migration dans une direction ou une autre a dû être à l'origine de certaines familles, telles que les langues algiques et les langues uto-aztèques, qui se sont largement dispersées, s'étendant dans ces cas bien au-delà de la Californie. La famille des langues uto-aztèques en particulier est l'une des familles les plus répandues géographiquement dans les Amériques, s'étendant des <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Shoshones" hreflang="fr">Shoshones</a> dans l'Idaho aux <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Pipils" hreflang="fr">Pipils</a> du Costa Rica et couvrant la côte centrale et ouest du Mexique et le sud-ouest américain. Il existe de nombreuses régions d'origines proposées, notamment le <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Grand_Bassin_des_%C3%89tats-Unis" hreflang="fr">Grand Bassin</a>, la vallée centrale de la Californie, le <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/D%C3%A9sert_de_Sonora" hreflang="fr">désert de Sonora</a>, le centre du Mexique (d'où il a été suggéré qu'il s'est propagé avec la culture du maïs) et le sud de l'Arizona jusqu'au nord du Mexique, avec différents types de contextes linguistiques et archéologiques.<br />
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Nathan Nakatsuka et ses collègues viennent de publier un papier intitulé: <a href="https://www.nature.com/articles/s41586-023-06771-5" hreflang="en">Genetic continuity and change among the Indigenous peoples of California</a>. Ils ont analysé le génome de 119 anciens individus dont 79 datés entre 7400 et 200 ans de la Californie du centre et du sud, et 40 anciens individus datés entre 2900 et 500 ans du nord ouest du Mexique:<br />
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<img src="http://secher.bernard.free.fr/blog/public/2023_Nakatsuka_Figure1.png" alt="2023_Nakatsuka_Figure1.png, déc. 2023" style="display:table; margin:0 auto;" title="2023_Nakatsuka_Figure1.png, déc. 2023" /><br />
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Les auteurs ont utilisé la statistique f3 pour regrouper les génomes en fonction de leur affinité. Les résultats obtenus montrent que la génétique est corrélée avec la géographique et le temps. La corrélation temporelle suggère une continuité génétique dans les régions investiguées. Dans certains cas la corrélation temporelle est plus forte que la corrélation géographique, ce qui suggère des migrations de populations entre les régions:<br />
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<img src="http://secher.bernard.free.fr/blog/public/2023_Nakatsuka_Figure2.png" alt="2023_Nakatsuka_Figure2.png, déc. 2023" style="display:table; margin:0 auto;" title="2023_Nakatsuka_Figure2.png, déc. 2023" /><br />
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La fréquence des haplogroupes mitochondriaux montre des variabilités au cours du temps. Ainsi il y a 3500 ans, 30 des 36 individus des îles du détroit et de la région de Santa Barbara sont de haplogroupe A2. Et les six individus qui ne sont pas A2, sont de la région du sud de la Californie. Après 3500 ans, il y a seulement 35 individus sur 91 qui sont de haplogroupe A2. Les autres appartiennent aux haplogroupes B2, C1b, C1c, C5b, D1 et D4h3a. Ces résultats suggèrent des migrations vers la Californie après cette date de 3500 ans. Tous les individus du Mexique sont plus récents que 3500 ans, et parmi eux, seulement cinq individus sur 44 sont de l’haplogroupe A2. Tous les hommes de cette étude sont de l’haplogroupe du chromosome Y Q1b1a, à l'exception d'un individu du nord du Mexique qui est Q1a2a. Ce dernier résultat diffère des temps plus anciens en Amérique du Sud où environ un tiers des individus étaient Q1a2a.<br />
<br />
Pour mettre en évidence des mouvements de population en Californie, les auteurs ont comparé le génome le plus ancien de cette étude daté de 7400 ans et situé sur l'île de Santa Rosa dans le détroit avec les génomes les plus récents situés sur cette même île, en utilisant la statistique f4. Les auteurs ont ainsi montré que les génomes les plus récents présentent une affinité génétique avec des individus situés plus au sud, au bout de la péninsule de Baja en Californie ou dans le nord du Mexique. Les auteurs ont ensuite utilisé le logiciel qpAdm pour modéliser d'éventuels mélanges génétiques. Ainsi la composante Mexicaine passe de 20% chez un individu de Santa Rosa de 4900 ans à 37% chez un individu de Santa Rosa de 300 ans. Ces résultats suggèrent donc des mouvements de population du sud vers le nord jusque dans les îles du détroit de Californie. Ces populations venues du sud, parlaient des langues uto-aztèques. Les auteurs ont fait la même étude pour différentes régions de la Californie. On retrouve cet accroissement de l'ascendance Mexicaine dans les îles du sud du détroit de Californie, et dans le sud de la Californie. Par contre, en Californie centrale, la composante Mexicaine est déjà présente avec une forte proportion dès 5200 ans et se maintient plus ou moins par la suite:<br />
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<img src="http://secher.bernard.free.fr/blog/public/2023_Nakatsuka_Figure3.png" alt="2023_Nakatsuka_Figure3.png, déc. 2023" style="display:table; margin:0 auto;" title="2023_Nakatsuka_Figure3.png, déc. 2023" /><br />
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Il semble ainsi que les mouvements de population du sud vers le nord précèdent la diffusion de la culture du maïs dans la région, et coïncident plutôt avec la diffusion des langues uto-aztèques en Californie avant 5200 ans. Le centre d'origine de cette famille linguistique semble donc être situé dans une société de chasseurs-cueilleurs qui vivaient entre le sud de l'Arizona et le nord du Mexique.<br />
<br />
Les auteurs ont ensuite comparé le génome du plus ancien individu de Californie centrale (PacificGrove_5200), avec les plus anciens individus de l'île de Santa Rosa (SantaRosa_7400) avec la statistique f4. Les résultats montrent que le plus ancien individu de Californie Centrale est plus proche génétiquement des individus de l’extrémité sud de la point de Baja située au sud de la Californie et datés seulement de 500 ans. Il est également plus proche de ces individus de Baja qu'un autre individu (CalaverasCounty_1500) du centre la Californie, mais situé à 290 km à l'est, et daté de seulement 1500 ans, comme le montre la figure ci-dessous:<br />
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<img src="http://secher.bernard.free.fr/blog/public/2023_Nakatsuka_EDFigure4.png" alt="2023_Nakatsuka_EDFigure4.png, déc. 2023" style="display:table; margin:0 auto;" title="2023_Nakatsuka_EDFigure4.png, déc. 2023" />
<br />
<br />
Il semble donc que l’ascendance de la pointe de Baja contenu dans l'individu PacificGrove_5200 décroisse au cours du temps dans le centre de la Californie. Ce résultat semble lié à une hypothèse qui indique qu'un substrat linguistique étendu entre le centre et le sud de la Californie a été remplacé par la suite par l'arrivée des langues miwok il y a environ 4000 ans. Ce changement linguistique a probablement été accompagné par l'arrivée d'une nouvelle population dans la région. Une source possible pour cette migration est le site archéologique de Calaveras County dont on a parlé ci-dessus. Cependant cette arrivée de population n'a pas totalement remplacée la population précédente car une bonne partie du profil génétique de PacificGrove_5200 (entre 55 et 76%) se retrouve dans les individus de la région plus récents, suggérant ainsi une certaine forme de continuité génétique au cours du temps en Californie centrale.<br />
<br />
Les anciens individus du début de l'Holocène (entre 9600 et 12.000 Ans) du Brésil, du Chili et du Nevada sont plus proches génétiquement de l'ancien individu Anzick de la culture Clovis et daté de 12.800 ans, que des anciens individus plus récents de ces mêmes régions, notamment ceux du Pérou datés entre 8600 et 9000 ans. Cependant l'ascendance Clovis a persisté plus longtemps (de plusieurs milliers d'années) en Californie par rapport aux autres régions d'Amérique, comme on peut le voir chez les individus SantaRosa_7400 et Carpinteria_7000 de cette étude et datés de 7500 et 7000 ans seulement. Ces résultats suggèrent que ces anciens individus de Californie descendent d'une population proche de l'ancienne population Clovis. De plus les anciens individus de Californie ne possèdent pas de composante ancestrale issue des anciennes populations nord Américaines.<br />
<br />
Les auteurs ont ensuite analysé les anciens individus du nord-ouest du Mexique. Ils ont ainsi montré qu'ils avaient plus d'affinité génétique avec les anciens individu du Pérou datés entre 8600 et 9000 ans et contenant moins d'ascendance Clovis, que ceux plus anciens du Brésil, du Chili et du Nevada.<br />
<br />
Les auteurs ont ensuite recherché une éventuelle ascendance polynésienne chez les anciens Californiens pour voir si le développement des <a href="https://en.wikipedia.org/wiki/Tomol" hreflang="en">canoés tomol</a> de Californie pouvait avoir eu une influence polynésienne. Ils n'en ont pas trouvé suggérant ainsi un développement local de ces bateaux.<br />
<br />
Enfin l'analyse des segments d'homozygotie montre que l'ancienne population des îles du détroit de Californie était moins nombreuse que l'ancienne population du continent en Californie.</p>http://secher.bernard.free.fr/blog/index.php?post/2023/12/07/Continuit%C3%A9-g%C3%A9n%C3%A9tique-et-changement-parmi-les-peuples-indig%C3%A8nes-de-Californie#comment-formhttp://secher.bernard.free.fr/blog/index.php?feed/atom/comments/605Anciens génomes dans le nord de l'Eurasie entre le Mésolithique et l'Âge du Bronzeurn:md5:4569e79e795c050807ad6f4e287e66fc2023-12-02T21:26:00+01:002023-12-02T21:26:51+01:00Bernard SécherADN ancien <p>Des similitudes à longue distance dans la langue et la culture matérielle partagées s'étendant sur des milliers de kilomètres à travers l'Eurasie du Nord au début et au milieu de l'Holocène ont été suggérées pour refléter non seulement des interactions entre voisins à courte distance, mais également une forte mobilité au cours de la vie des individus. Les langues ouraliennes - parlées aujourd'hui en Europe centrale (hongrois), autour de la mer Baltique (finnois, estonien et saami), en Europe de l'Est (<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Komi_(langue)" hreflang="fr">komi</a>, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Oudmourte" hreflang="fr">oudmourte</a>, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Mari_(langue)" hreflang="fr">mari</a> et <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Langues_mordves" hreflang="fr">langues mordves</a>: moksha et erzya) et en Sibérie occidentale, centrale et lointaine, y compris la péninsule de Taimyr (<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Khanty" hreflang="fr">Khanty</a>, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Mansi" hreflang="fr">Mansi</a>, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Selkoupe" hreflang="fr">Selkoupe</a>, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/N%C3%A9n%C3%A8tse" hreflang="fr">Nénètse</a>, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89n%C3%A8tse" hreflang="fr">Énètse</a> et <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Nganassane" hreflang="fr">Nganassane</a>) – constitue l'une de ces connexions transcontinentales. Cependant des débats importants subsiste au sujet de la localisation de l'origine de cette famille linguistique, l'époque de sa dispersion et dans quelle mesure ces anciennes communautés linguistiques sont visibles dans les vestiges archéologiques. Les études précédentes de paléo-génétique ont montré que tous les anciens locuteurs de cette langue portaient une ascendance Sibérienne associée à l'haplogroupe du chromosome Y: N, originaire également de Sibérie. Cette ascendance est arrivée en Europe il y a plus de 3500 ans en Carélie et il y a plus de 2600 ans dans la région Baltique, régions où des langues ouraliennes sont parlées aujourd'hui.<br />
<br />
Tian Chen Zeng et ses collègues viennent de publier un papier intitulé: <a href="https://www.biorxiv.org/content/10.1101/2023.10.01.560332v2" hreflang="en">Postglacial genomes from foragers across Northern Eurasia reveal prehistoric mobility associated with the spread of the Uralic and Yeniseian languages</a>. Ils ont analysé le génome de 181 anciens individus d'Eurasie du nord entre le Mésolithique et l'Âge du Bronze. Ils ont également obtenu 76 nouvelles datations radiocarbone à partir de ces échantillons:<br />
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<img src="http://secher.bernard.free.fr/blog/public/2023_Zeng_Figure1.png" alt="2023_Zeng_Figure1.png, nov. 2023" style="display:table; margin:0 auto;" title="2023_Zeng_Figure1.png, nov. 2023" /><br />
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Les auteurs ont réalisé une Analyse en Composantes Principales afin de comparer les génomes obtenus dans cette étude avec d'autres anciens génomes préalablement publiés. La figure ci-dessous révèle que les anciens individus appartenant à des cultures de chasseurs-cueilleurs utilisant la céramique dans les steppes boisées et le sud des zones forestières du nord de l'Eurasie s'étendant sur 7000 km et datés entre 10.000 et 5000 ans forment un vaste gradient génétique appelé par les auteurs de cette étude, le gradient des chasseurs-cueilleurs de la steppe boisée (FSHG), reliant les chasseurs-cueilleurs de la région trans-baïkale à gauche aux chasseurs-cueilleurs de l'est de l'Europe (EHG) à droite:<br />
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<img src="http://secher.bernard.free.fr/blog/public/2023_Zeng_Figure4a.jpg" alt="2023_Zeng_Figure4a.jpg, nov. 2023" style="display:table; margin:0 auto;" title="2023_Zeng_Figure4a.jpg, nov. 2023" /><br />
<br />
Cependant de nombreux groupes divergent de ce gradient comme les populations plus au nord de la zone forestière dans le centre et le nord-est de la Sibérie (dans une zone située entre la rivière Ienisseï, le détroit de Béring et le lac Baïkal) qui se rapprochent des populations orientales situées sur ce gradient, mais sont déviées vers les populations Arctiques et Amérindiennes. Les populations de la région Cis-Baïkale plus récent que 5400 ans dévient également de ce gradient mais vers d'autres directions.<br />
<br />
A l'aide de la statistique f4, les auteurs ont mis en évidence sept groupes génétiques et deux individus isolés: un individu du début de l'holocène de la grotte Khatystyr située dans le bassin moyen de la Lena en Yakoutie et daté de 10.200 ans (KhatystyrCave_M_10.2kya), des individus datés de la transition entre le Mésolithique et le Néolithique du site archéologique de Dzhilinda-1 situé dans le bassin de la rivière Vitim et affiliés à la culture Ust-Yumurchen datés entre 8400 ans (Dzhilinda1_M_N_8.4kya), des individus du Néolithique ancien et moyen de la région trans-Baïkale datés entre 8800 et 6200 ans (Transbaikal_EMN), des individus du début du Néolithique de la région Cis-Baïkale affiliés à la culture Kitoi et datés entre 8000 et 6600 ans (Cisbaikal_EN), des individus issus des cultures Syalakh et Belkachi datés entre 6800 et 6200 ans (Syalakh-Belkachi), des individus de la transition entre le Néolithique et l'Âge du Bronze de la région Cis-Baïkale, affiliés aux cultures Serovo, Isakovo, et Glazkovo datés entre 5100 et 3700 ans (Cisbaikal_LNBA), et des individus de la transition entre le Néolithique et l'Âge du Bronze de Yakoutie datés entre 4500 et 3200 ans (Yakutia_LNBA). Les autres individus ont été exclus de l'analyse qui suit et se positionnent dans des positions intermédiaires et représentent probablement des mélanges génétiques entre les groupes analysés. Seuls les groupes Cisbaikal_EN et Transbaikal_EMN sont situés sur le gradient FSHG. Les auteurs ont ensuite ajouté à ces sept groupes, trois anciens individus: MiddleLena_Khaiyrgas_16.7kya, Selenge_Ust-Kyakhta_14kya et Kolyma_M_10.1kya pour former un ensemble de dix groupes génétiques qui s'étalent entre 17.000 et 4000 ans:<br />
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<img src="http://secher.bernard.free.fr/blog/public/2023_Zeng_Figure4b.jpg" alt="2023_Zeng_Figure4b.jpg, nov. 2023" style="display:table; margin:0 auto;" title="2023_Zeng_Figure4b.jpg, nov. 2023" /><br />
<br />
Les auteurs ont ensuite utilisé le logiciel qpAdm pour modéliser chacun des dix groupes identifiés ci-dessus comme issus d'un mélange génétique à partir des différents groupes antérieurs ou contemporains. Les auteurs ont appelé Anciens PaléoSibériens (APS), la composante ancestrale trouvée dans l'ancien individu Kolyma_M_10.1kya, en généralisant cet individu à une ancienne population pré-Holocène. Mélangée avec une composante Anciens Nord Eurasiens (ANE) et une composante est Asiatique, elle a donné naissance à la population Amérindienne, mais a joué également un rôle dans la formation de plusieurs populations du nord-est de la Sibérie et du détroit de Béring. Les auteurs ont ainsi trouvé que le groupe MiddleLena_Khaiyrgas_16.7kya.SG appartient à cette population des Anciens PaléoSibériens. Cette composante s'est mélangée avec une population est Asiatique mais a cependant persisté dans de fortes proportions dans les deux individus Selenge_Ust_Kyakhta_14kya et Kolyma_M_10.1kya. Plus loin vers l'ouest, la population des Anciens PaléoSibériens s'est mélangée à une population des Anciens Nord Eurasiens pour former les populations situées sur le gradient FSHG.<br />
<br />
Le plus ancien individu de cette étude avec une forte proportion d'ascendance est Asiatique est MiddleLena_KhatystyrCave_M_10.2kya qui a une très forte affinité génétique avec les anciens chasseurs-cueilleur du bassin de la rivière Amour. De plus toutes les anciennes populations situées sur le gradient FSHG situées à l'est de l'Altaï, ont pour source est Asiatique la population Transbaikal_EMN.<br />
<br />
Au milieu de l'holocène dans la région Cis-Baïkale, le groupe Cisbaikal_LNBA remplace le groupe Cisbaikal_EN, correspondant à la transition entre la culture Kitoi Néolithique et les culture de la fin du Néolithique et de l'Âge du Bronze: Serovo, Isakovo et Glazkovo. Cette dernière population a une plus forte ascendance APS.<br />
<br />
Au nord de la région Baïkale, l'individu MiddleLena_KhatystyrCave_M_10.2kya est suivi par l'individu MiddleVitim_Dzhilinda1_M_N_8.4kya possédant une forte proportion d'APS. Cela résulte probablement d'un mélange génétique avec une population source proche de Kolyma_M_10.1kya. Ensuite la proportion d'APS diminue avec des mélanges successifs avec des populations est Asiatiques comme on peut le voir dans la population Syalakh-Belkachi datée entre 6800 et 6200 ans, puis dans la population Yakutia_LNBA. De manière intéressante cette succession inclut toutes les anciennes populations Sibériennes qui sont décalées vers les populations Amérindiennes sur la PCA. De plus la population Syalakh-Belkachi a donné une contribution majeure (environ 70%) à la population Paléo-Eskimo du nord de l'Amérique. Par contre, on ne retrouve pas cette ascendance chez les populations <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Athabaskans" hreflang="fr">Athabaskanes</a>, ce qui suggère plusieurs vagues de migrations de l'Eurasie vers les Amériques<br />
<br />
Entre 10.000 et 4000 ans, les 150 anciens individus de cette étude, plus 81 anciens individus dont le génome a été préalablement publiés, appartiennent au gradient des chasseurs-cueilleurs de la steppe boisée (FSHG). Ce gradient est visible sur la PCA et sur l'étude avec le logiciel ADMIXTURE. Il se situe à proximité des anciens Nord Eurasiens du site d'Afontova-Gora, mais aussi des anciens individus du début de l'Âge du Bronze du bassin du Tarim. La grande majorité des différentes populations situées sur le gradient FSHG peuvent être modélisées comme issues d'un mélange génétique entre quatre populations: les chasseurs-cueilleurs de l'ouest de l'Europe (WHG), les chasseurs-cueilleurs de l'est de l'Europe (EHG), les anciens Nord Eurasiens (ANE) et les anciens est Asiatiques représentés par un ancien individu du bassin de la rivière Amour daté de 19.000 ans. Dans la partie occidentale de ce gradient, les anciens individus ont une composante majoritaire EHG, avec un peu de composante WHG. Du côté de l'Oural, chez les anciens individus, la composante EHG se mélange avec la composante ANE avec un peu d'ascendance est Asiatique. Ces populations ont un profil génétique proche de celui des anciennes population de la culture du <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Culture_de_Bota%C3%AF" hreflang="fr">Botai</a>. Encore plus loin vers l'est, les anciens individus sont modélisés par un mélange entre composante ANE et composante est Asiatique. Au bout de ce gradient, les anciennes populations trans Baïkale du Néolithique sont formées principalement par la composante est Asiatique. Les populations appartenant au gradient FSHG qui ont le plus d'ascendance ANE sont les populations Néolithique du site de Kuznetsk dans l'Altaï et les populations Néolithique du bassin du Tarim. Ce gradient FSHG semble stable pendant 5000 ans entre 10.000 et 5000 ans suggérant une continuité génétique dans le nord de l'Eurasie durant cette période. Cependant, il y a 5000 ans cette stabilité disparaît suite à différentes migrations venues de l'ouest et de l'est. Les sources occidentales sont liées aux expansions Yamnaya vers l'est, suivies par les expansions des cultures Sintashta et Andronovo. Les sources orientales ont propagé une composante Cis-Baïkale de la fin du Néolithique dans le nord de l'Eurasie. Ces différents mouvements ont provoqué la formation de différents groupes mélangés génétiquement que l'on retrouve dans les populations actuelles turques, mongoles, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Toungouses" hreflang="fr">toungouses</a>, ouraliennes et <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Langues_ienisse%C3%AFennes" hreflang="fr">ienisseïennes</a>. Ces deux dernières populations, locuteurs des langues ouraliennes et ienisseïennes ont reçu une proportion importante de leur profil génétique des anciennes populations cis-Baïkale et <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Iakoutes" hreflang="fr">Iakoute</a> de la fin du Néolithique.<br />
<br />
La population cis-Baïkale de la fin du Néolithique est riche en ascendance des Anciens Paléo Sibériens. Dans l'analyse avec le logiciel ADMIXTURE, la composante cis-Baïkale de la fin du Néolithique apparaît en forte proportion chez les populations parlant une langue <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Ket_(langue)" hreflang="fr">Ket</a>, une langue <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Langues_samoy%C3%A8des">Samoyède</a> et en Sibérie chez les populations turques du bassin de la rivière Ienisseï.<br />
<br />
La population Iakoute de la fin du Néolithique est également riche en ascendance des Anciens Paléo Sibériens. Mais contrairement à l'ancienne population précédente, elle a beaucoup d'affinité génétique avec les populations arctiques des deux côtés du détroit de Béring. Elle peut être modélisée comme issue d'un mélange génétique entre une population locale Syalakh-Belkachi datée entre 6800 et 6200 ans (50%) et une population trans-Baïkale de la culture Kitoi (50%). Tous les hommes de la population Iakoute sont de l'haplogroupe du chromosome Y: N. Cette population semble affiliée génétiquement à toutes les populations ouraliennes anciennes et contemporaines. Ce résultat est indiqué par l'analyse avec le logiciel ADMIXTURE et la statistique f4. De plus le logiciel qpAdm indique que toutes les populations ouraliennes ont besoin d'une source Iakoute qui inclut l'ensemble de leur ascendance est Asiatique. Ces résultats suggèrent que la diffusion des langues ouraliennes en Eurasie s'est produite à partir de la population Iakoute dans un mouvement vers l'ouest. Notamment la population Iakoute possède toutes les sub-clades de l'haplogroupe N que l'on retrouve dans les populations ouraliennes. Cette diffusion a du commencer il y a environ 4000 ans.<br />
<br />
De manière intéressante cette étude montre de plus que cette diffusion des langues ouraliennes vers l'ouest s'est faite à travers la diffusion du phénomène <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Cultures_de_Seima-Turbino" hreflang="fr">Seima-Turbino</a>. Ce phénomène se réfère à l'apparition soudaine d'un ensemble d'artefacts en bronze reflétant des techniques métallurgiques de moulage avancé qui se sont diffusées très rapidement dans le nord de l'Eurasie entre la Chine et la mer Baltique. En effet les auteurs de cette étude ont analysé le génome de 16 anciens individus affiliés au phénomène Seima-Turbino appartenant à quatre sites archéologiques: Rostovka (n=9), Satyga-16 (n=2), Chernoozerye-1 (n=1) et Chernoozerye-1 (n=4). Tous ces individus ont un profil génétique très hétérogène à l'exception des quatre individus de Tatarka Hill qui sont très homogènes et proches des anciens Iakoutes. Les trois principales composantes des individus de Rostovka , Satyga-16 et Chernoozerye-1 sont une population du gradient FSHG riche en ANE, une population des steppes occidentales de l'Âge du Bronze Moyen ou Final et les Iakoutes de la fin de l'Âge du Bronze.</p>http://secher.bernard.free.fr/blog/index.php?post/2023/11/27/Anciens-g%C3%A9nomes-dans-le-nord-de-l-Eurasie-entre-le-M%C3%A9solithique-et-l-%C3%82ge-du-Bronze#comment-formhttp://secher.bernard.free.fr/blog/index.php?feed/atom/comments/604Génomes d'anciens individus de l'Âge du Bronze du nord de l'Eurasieurn:md5:d99d195307bbf345b3e351123c0701452023-11-24T17:01:00+01:002023-11-26T16:13:39+01:00Bernard SécherADN ancien <p>L'Âge du Bronze en Eurasie, qui s'étend entre 3000 et 1000 av. JC., est caractérisé par le développement de la métallurgie, une des plus importantes innovations culturelles dans l'histoire de l'homme. Le début de cette période est associé à l'émergence du complexe métallurgique circum-pontique et l'extension vers l'est de cette technologie. Dans la seconde moitié de cette période, on voit un mouvement inverse vers l'ouest de différents objets associés au <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Cultures_de_Seima-Turbino" hreflang="fr">complexe de Seima-Turbino</a>. Des artefacts métalliques apparaissent dans les régions forestières et des steppes boisées du nord de l'Eurasie. Le complexe de Seima-Turbino est représenté par différents sites archéologiques en Eurasie datés entre 2200 et 1900 av. JC. associés à des objets en alliage de cuivre et d'étain et des pratiques artisanales spécifiques qui suggèrent le mouvement de groupes de personnes. Le nom Seima-Turbino fait référence à deux sites archéologiques fouillés au début du vingtième siècle. Ce phénomène combine des éléments de différentes cultures archéologiques et ne représente pas une véritable culture unique associé à un type spécifique de poterie. En fait le critère d'attribution est associé à la présence d'artefacts métalliques spécifiques que l'on retrouve entre la Chine et une ligne qui relie en Europe l'est de la Finlande au nord de la Moldavie, sur une superficie de trois millions de kilomètres carrés. Il y a des variations des artefacts dans toute cette région avec une plus forte proportion d'étain et un plus grand nombre de moules pour la fonte dans les régions orientales:<br />
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<img src="http://secher.bernard.free.fr/blog/public/2023_Childebayeva_Figure1.png" alt="2023_Childebayeva_Figure1.png, nov. 2023" style="display:table; margin:0 auto;" title="2023_Childebayeva_Figure1.png, nov. 2023" /><br />
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L'inventaire métallique du complexe Seima-Turbino peut être divisé en deux grands groupes:</p>
<ul>
<li>les objets pouvant être attribués aux cultures archéologiques eurasiennes, telles qu'Alakul, Abashevo, Sintashta, Petrovka et Srubnaya</li>
<li>les objets connus uniquement sur les sites Seima-Turbino: haches à douille, lames de poignard lamellaire, poignards et couteaux à garde complète et ce que l'on appelle les pointes de lance fourchues<br /></li>
</ul>
<p><br />
Ainash Childebayeva et ses collègues viennent de publier en pre-print, un papier intitulé: <a href="https://www.biorxiv.org/content/10.1101/2023.10.01.560195v1" hreflang="en">Bronze Age Northern Eurasian Genetics in the Context of Development of Metallurgy and Siberian Ancestry</a>. Ils ont analysé le génome de plusieurs anciens individus issus du site archéologique de Rostovka (ROT: symbole carré vert ci-dessus), un des rares sites associés au complexe de Seima-Turbino et contenant des restes humains. Les dates radiocarbone obtenues sur ce site varient entre 2200 et 1900 av. JC.<br />
<br />
Une composante identifiée du paysage génétique du nord de l'Eurasie est une ascendance Sibérienne qui est présente dans les populations actuelles de Finlande, Estonie à l'ouest et Sibérie à l'est. <a href="http://secher.bernard.free.fr/blog/index.php?post/2019/05/10/Arriv%C3%A9e-d-une-ascendance-Sib%C3%A9rienne-%C3%A0-l-est-de-la-Baltique" hreflang="fr">Une étude précédente</a> de génétique a montré l'arrivée de cette composante dans la région Baltique à l'Âge du Fer et non pas à l'Âge du Bronze. Les auteurs avaient associé l'arrivée de cette composante génétique avec l'arrivée des <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Langues_ouraliennes" hreflang="fr">langues ouraliennes</a>. De plus l'haplogroupe du chromosome Y: N1a1a1a1a apparait pour la première fois en Europe sur le site archéologique de Bolshoy Oleni Ostrov (BOO: symbole disque vert clair ci-dessus) situé dans le nord-ouest de la Russie. Cet haplogroupe est associé à une forte proportion d'ascendance Sibérienne. Les auteurs de cette étude publient également deux nouveaux génomes issus d'anciens individus du site de Bolshoy Oleni Ostrov.<br />
<br />
Parmi les neuf individus du site de Rostovka analysés, il y a huit hommes et une femme, les deux individus du site de Bolshoy Oleni Ostrov sont deux femmes:
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<img src="http://secher.bernard.free.fr/blog/public/2023_Childebayeva_Table1.png" alt="2023_Childebayeva_Table1.png, nov. 2023" style="display:table; margin:0 auto;" title="2023_Childebayeva_Table1.png, nov. 2023" /><br />
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Les auteurs ont identifié deux individus reliés au second degré à Rostovka: ROT011 et ROT015, deux hommes de l'haplogroupe du chromosome Y: C2a. Deux individus sont également reliés au second degré à Bolshoy Oleni Ostrov: BOO004 et BOO005.<br />
<br />
Les auteurs ont ensuite réalisé une Analyse en Composantes Principales afin de comparer ces anciens génomes à d'autres préalablement publiés. Les génomes des individus de Rostovka sont représentés ci-dessous par des carrés vert foncé et ceux de Bolshoy Oleni Ostrov par des disques vert clair. Dans la figure ci-dessous, le graphe du haut représente les deux premières composantes alors que le graphe du bas représente les composantes 1 et 3. Le premier graphe permet de séparer les populations occidentales à gauche des populations orientales à droite. Le graphe du bas permet de différencier les principales zones écologiques de l'Eurasie:<br />
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<img src="http://secher.bernard.free.fr/blog/public/2023_Childebayeva_Figure2a.png" alt="2023_Childebayeva_Figure2a.png, nov. 2023" style="display:table; margin:0 auto;" title="2023_Childebayeva_Figure2a.png, nov. 2023" /><br />
<br />
Dans le graphe du bas, on voit que les individus du complexe de Seima-Turbino sont situés sur le gradient correspondant à la zone forêt/toundra associée aux actuels locuteurs de langue ouralienne. Les auteurs ont ensuite effectué une analyse avec le logiciel ADMIXTURE. En haut de la figure ci-dessous, les anciens individus du site de Rostovka sont de profil génétique divers: un individu (ROT003) est proche des individus de l'Âge du Bronze de la steppe occidentale, alors qu'un autre (ROT002) se rapproche des individus de Sibérie orientale caractérisés par une forte proportion de la composante rouge. Les autres ont des profils génétiques intermédiaires. A l'inverse, les individus de Bolshoy Oleni Ostrov situés juste en dessous, ont un profil génétique plus homogène:<br />
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<img src="http://secher.bernard.free.fr/blog/public/2023_Childebayeva_Figure2c.png" alt="2023_Childebayeva_Figure2c.png, nov. 2023" style="display:table; margin:0 auto;" title="2023_Childebayeva_Figure2c.png, nov. 2023" /><br />
<br />
Ces résultats sont confirmés par la statistique f3. De plus la statistique f4 montre que les anciens individus de Rostovka et Bolshoy Oleni Ostrov ont une plus forte affinité génétique avec l'ascendance ANE des Anciens Nord Eurasiens, que les anciens individus de l'Âge du Bronze de l'est de la Sibérie.<br />
<br />
Les auteurs ont ensuite utilisé le logiciel qpAdm. Ils ont ainsi modélisé les individus de Rostovka comme issus d'un mélange génétique entre trois populations: une de la fin de l'Âge du Bronze de l'est de la Sibérie, une correspondant à la culture Sintashta de l'Âge du Bronze des steppes occidentales et la dernière correspondant aux chasseurs-cueilleurs de l'ouest de la Sibérie. Il est également possible de les modéliser comme issus d'un mélange entre seulement deux populations: la première de la fin de l'Âge du Bronze de l'est de la Sibérie et la seconde des chasseurs-cueilleurs de l'est de l'Europe:<br />
<br />
<img src="http://secher.bernard.free.fr/blog/public/2023_Childebayeva_Figure4.png" alt="2023_Childebayeva_Figure4.png, nov. 2023" style="display:table; margin:0 auto;" title="2023_Childebayeva_Figure4.png, nov. 2023" /><br />
<br />
Le logiciel DATES permet d'estimer le mélange génétique pour le modèle à deux populations pour les individus de Bolshoy Oleni Ostrov. Le résultat obtenu est de 18 générations, soit environ 500 ans avant eux.<br />
<br />
L'analyse des segments identiques par descente (IBD) a permis de mettre en évidence des ancêtres communs entre les anciens individus de Bolshoy Oleni Ostrov et ceux appartenant à la culture Sintashta. Ces ancêtres communs vivaient entre 500 et 750 avant eux.<br />
<br />
En résumé, la forte hétérogénéité génétique des anciens individus de Rostovka suggère que le mélange génétique entre ascendances occidentale et orientale dans ce complexe culturel était très récent. Sur le plan individuel, il n'y a pas de corrélation entre le profil génétique et le mobilier archéologique. En effet, l'individu de Rostovka dont le profil génétique est occidental contient dans sa sépulture des objets d'origine orientale. Les anciens individus de Bolshoy Oleni Ostrov ont un profil génétique homogène dont le mélange génétique semble remonter au temps du complexe de Seima-Turbino entre 2200 et 2000 av. JC. Sur ce site, les anciens individus présentent des segments identiques par descente (IBD) et d'homozygotie compatibles avec une population isolée de petite taille. De manière intéressante, les anciens individus de Rostovka exhibent une petite proportion d'ascendance des fermiers d'Europe qui est absente chez les individus de Bolshoy Oleni Ostrov. Ces derniers présentent au contraire une ascendance chasseurs-cueilleurs locale. D'autre part cette étude confirme l'association de l'expansion du complexe de Seima-Turbino avec la diffusion des langues ouraliennes.</p>http://secher.bernard.free.fr/blog/index.php?post/2023/11/24/G%C3%A9nomes-d-anciens-individus-de-l-%C3%82ge-du-Bronze-du-nord-de-l-Eurasie#comment-formhttp://secher.bernard.free.fr/blog/index.php?feed/atom/comments/603Analyse génétique d'une enfant du Paléolithique en Pologneurn:md5:779a9a2197b6445dc36e4b046130b0562023-11-20T11:31:00+01:002023-11-20T11:31:33+01:00Bernard SécherADN ancien <p>Les restes humains du Paléolithique Supérieur en Eurasie sont rares, cependant cette période est caractérisée par l'accroissement de la visibilité des sépultures humaines dans les enregistrements archéologiques, notamment ceux de la période gravettienne entre 34.000 et 24.000 ans, ou même antérieurs entre 39.000 et 34.000 ans. L'est de l'Europe Centrale est riche en vestiges Paléolithiques avec plusieurs sites contenant des restes humains comme celui de la grotte Mladeč en république Tchèque, de la grotte Oblazowa en Pologne, des sites de Peștera Muierii et Peștera Cioclovina en Roumanie ou encore de la grotte Goyet en Belgique, tous datés entre 37.000 et 33.000 ans et associés provisoirement à la culture Aurignacienne. Le complexe Kostenki-Borshchevo en Russie s'étend sur des périodes différentes du Paléolithique Supérieur et a produit également de nombreux restes humains comme sur le site de Kostenki également associé à l'Aurignacien entre 39.000 et 37.000 ans. Les restes humains de Buran Kaya III en Crimée sont associés au Gravettien malgré leur datation précoce entre 36.800 et 35.700 ans. En Europe Centrale le Gravettien s'étend entre 34.000 et 24.000 ans.<br />
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La grotte Borsuka (symbole 8 dans la carte ci-dessous) localisée sur la rivière Szklarka dans le sud de la Pologne ajoutent des données importantes à cette discussion. Les fouilles de l'entrée de la grotte ont été effectuées entre 2008 et 2010, et ont mis au jour six dents de lait appartenant à un enfant de 12 à 18 mois, associées à 112 dents percées de bisons et d'élans présentant des traces d'ocre:<br />
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<img src="http://secher.bernard.free.fr/blog/public/2023_Fewlass_Figure1.png" alt="2023_Fewlass_Figure1.png, nov. 2023" style="display:table; margin:0 auto;" title="2023_Fewlass_Figure1.png, nov. 2023" /><br />
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Tous ces restes sont contenus dans la couche VI située en dessous la couche V correspondant au dernier maximum glaciaire. La couche VI contient également des restes animaux appartenant à des animaux de la steppe ou toundra comme le renne, le renard polaire, le cheval sauvage, le rhinocéros laineux, l'élan, l'auroch, la martre des pins, le lynx, le castor et le blaireau. Deux dents percées d'herbivore ont été directement datées entre 32.890 et 30.760 ans et entre 29.900 et 29.120 ans, suggérant un Paléolithique Supérieur moyen pour la couche VI. Les archéologues supposent que ces restes correspondent à une sépulture d'enfant du Paléolithique Supérieur, contemporaine des sites Gravettiens de Dolní Věstonice-Pavlov, et Předmostí situés en République Tchèque et Krems-Wachtberg en Autriche. Cependant la typologie du pendentif en dents animales est similaire à celle du site de Mladeč correspondant à la fin de l'Aurignacien.<br />
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Helen Fewlass et ses collègues viennent de publier un papier intitulé: <a href="https://www.cell.com/iscience/fulltext/S2589-0042(23)02360-X" hreflang="en">Chronological and genetic analysis of an Upper Palaeolithic female infant burial from Borsuka Cave, Poland</a>. Ils ont mené une étude pluri-disciplinaires sur les restes de la grotte Borsuka afin de déterminer si les six dents humaines correspondent au même individu, la relation chronologique entre les dents humaines et le pendentif en dents d'animaux et la culture d'appartenance de ces restes. Les auteurs ont ainsi obtenu des datations radiocarbone et mener une étude génétique des dents humaines.<br />
<br />
Les datations radiocarbone obtenues pour deux dents humaines sont comprises respectivement entre 29.860 et 29.090 ans et 29.860 et 29.090 ans. Celles des dents percées sont comprises entre 35.290 et 33.260 ans.<br />
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Ces deux mêmes dents humaines ont fait l'objet d'une analyse génétique. Les deux dents appartiennent au même haplotype ce qui suggère qu'elles appartiennent au même individu et au même haplogroupe mitochondrial U6. Cet haplogroupe commun aujourd’hui en Afrique du nord a cependant déjà été observé en Europe au Paléolithique chez l'individu daté de 34.000 ans du site de Peștera Muierii en Roumanie:<br />
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<img src="http://secher.bernard.free.fr/blog/public/2023_Fewlass_Figure6c.png" alt="2023_Fewlass_Figure6c.png, nov. 2023" style="display:table; margin:0 auto;" title="2023_Fewlass_Figure6c.png, nov. 2023" /><br />
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L'analyse des autosomes montrent de plus que cet individu est une fillette. Les auteurs ont ensuite effectué une Analyse en Composantes Principales afin de comparer le génome de la fillette de la grotte Borsuka avec d'autres anciens génomes d'Eurasie. Dans la figure ci-dessous il est représenté par un triangle rouge et se regroupe avec les autres anciens génomes du Paléolithique Supérieur d'Eurasie de l'ouest:<br />
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<img src="http://secher.bernard.free.fr/blog/public/2023_Fewlass_Figure6b.png" alt="2023_Fewlass_Figure6b.png, nov. 2023" style="display:table; margin:0 auto;" title="2023_Fewlass_Figure6b.png, nov. 2023" /><br />
<br />
Ces résultats sont confirmés par l'analyse avec la statistique f3 qui montre que l'individu de la grotte Borsuka partage le plus d'allèles avec l'individu de la grotte Bacho Kiro daté de 35.000 ans, suivi par l’individu de Peștera Muierii daté de 34.000 ans, l'individu Věstonice 16 daté de 31.000 ans et les individus de Sunghir en Russie datés de 34.000 ans. La statistique D indique également que l’individu de la grotte Borsuka a le plus d'affinité génétique avec les anciens individus Gravettiens et Aurignaciens.</p>http://secher.bernard.free.fr/blog/index.php?post/2023/11/18/Analyse-g%C3%A9n%C3%A9tique-d-une-enfant-du-Pal%C3%A9olithique-en-Pologne#comment-formhttp://secher.bernard.free.fr/blog/index.php?feed/atom/comments/602Étude génomique de deux tombes adulte/enfant dans le Campaniformeurn:md5:fd1bb29ee5eaeeb30ecd42fd9fe78b722023-11-02T14:41:00+01:002023-11-02T14:41:18+01:00Bernard SécherADN ancien <p>Aujourd'hui, la mort d'un enfant représente un événement traumatisant qui implique le deuil et le chagrin. Les enterrements d’enfants sont souvent des affaires privées et familiales, la communauté ne s’engageant que lorsque la tragédie ou la violence suscitent une réaction publique. Les réactions passées face à la mort d’enfants étaient peut-être plus complexes et plus diverses et, dans les archives archéologiques, elles trouvent sans doute leur expression la plus claire dans les traces survivantes de rites funéraires. La recherche archéologique nous montre que dans les communautés préhistoriques, le lien étroit entre l’enfant et l’adulte, qu’il s’agisse de parents biologiques ou non, semble s’exprimer à travers des tombes communes, peut-être lorsque les deux sont décédés en même temps. Par exemple, sur le site mésolithique de Vedbaek au Danemark, un nouveau-né a été enterré avec une jeune femme, reposant tous les deux sur une aile de cygne. Les sépultures communes entre adulte et enfant signalent plus que de l’émotion ; ils peuvent aussi servir, par exemple, à mettre en valeur la situation familiale, la lignée, ou la place des enfants dans le système de filiation.<br />
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Au début du 3ème millénaire av. JC., les sociétés commencent à enterrer leurs morts dans des tombes individuelles marquant un changement dans les pratiques funéraires et abandonnant les tombes collectives courantes dans les sociétés néolithiques antérieures. Dans ces nouvelles cultures, les sépultures communes sont rares, bien que les sépultures adulte/enfant relèvent d'une caractéristique particulière.
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Nicoletta Zedda et ses collègues viennent de publier un papier intitulé: <a href="https://www.nature.com/articles/s41598-023-45612-3" hreflang="en">Biological and substitute parents in Beaker period adult–child graves</a>. Ils ont analysé les liens familiaux à l'aide de la paléo-génétique entre des individus de deux tombes doubles Campaniformes adulte/enfant à Altwies au Luxembourg et à Dunstable Downs en Grande-Bretagne.<br />
<br />
La sépulture d'Altwies a été découverte en 2000. Une femme de 25 à 35 ans (ALW1) et un enfant de trois à quatre ans (ALW2), sont enterrés dans une fosse ovale. Le mobilier funéraire comprend un anneau en pierre et un vase campaniforme de type maritime. Apparemment les deux squelettes ont été déposés en même temps dans la tombe. La femme est en position fléchie sur le côté droit, alors que l'enfant est sur le côté gauche. Les deux individus se font face. Les datations radiocarbone réalisées montrent que ces individus sont datés de la seconde moitié du 3ème millénaire av. JC. :<br />
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<img src="http://secher.bernard.free.fr/blog/public/2023_Zedda_Figure1A.jpg" alt="2023_Zedda_Figure1A.jpg, nov. 2023" style="display:table; margin:0 auto;" title="2023_Zedda_Figure1A.jpg, nov. 2023" /><br />
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La seconde sépulture est issue d'un tumulus de 3 m de hauteur et 14 m de diamètre, mis au jour à Dunstable Downs en 1887. Les restes osseux d'une femme de 18 à 25 ans (LUT1) et d'une fillette de 4 à 8 ans (LUT2) ont été découverts. La femme est disposée sur le côté droit la tête vers le nord, alors que la fillette lui fait face, disposée sur le côté gauche. Le mobilier funéraire comprend deux vases campaniformes brisés, trois percuteurs en pierre, un galet de quartz blanc, deux grattoirs et des éclats de silex. 91 fossiles d'oursins ont été retrouvés autour de la sépulture. Les datations radiocarbone obtenues dans cette tombe sont anormalement jeunes par rapport au mobilier archéologique et laissent penser à un problème de contamination. Un dessin a été réalisé par le découvreur de la tombe:<br />
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<img src="http://secher.bernard.free.fr/blog/public/2023_Zedda_Figure1B.jpg" alt="2023_Zedda_Figure1B.jpg, nov. 2023" style="display:table; margin:0 auto;" title="2023_Zedda_Figure1B.jpg, nov. 2023" /><br />
<br />
Une Analyse en Composantes Principales indique que les profils génétiques de ces quatre individus se regroupent dans la diversité des populations campaniformes:<br />
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<img src="http://secher.bernard.free.fr/blog/public/2023_Zedda_Figure2A.jpg" alt="2023_Zedda_Figure2A.jpg, nov. 2023" style="display:table; margin:0 auto;" title="2023_Zedda_Figure2A.jpg, nov. 2023" /><br />
<br />
Ils possèdent une forte proportion d’ascendance des steppes, respectivement 68,2% (ALW1), 67,2% (ALW2), 59,4% (LUT1) et 58% (LUT2):<br />
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<img src="http://secher.bernard.free.fr/blog/public/2023_Zedda_Figure2B.jpg" alt="2023_Zedda_Figure2B.jpg, nov. 2023" style="display:table; margin:0 auto;" title="2023_Zedda_Figure2B.jpg, nov. 2023" /><br />
<br />
Les analyses génétiques montrent d'autre part, que la sépulture d'Altwies contient les squelettes d'une mère et de son fils. Ils possèdent le même haplogroupe mitochondrial H et le jeune garçon est de l'haplogroupe du chromosome Y: R1b typique des populations campaniformes. La différence de deux SNP (12127 et 16188) dans leurs haplotypes mitochondriaux est probablement du à des dommages post mortem et des différences de couverture. Selon le standard campaniforme qui est que les hommes sont enterrés la tête au nord sur le côté gauche et les femmes la tête au sud sur le côté droit, la tombe d'Altwies est au standard pour le jeune garçon:<br />
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<img src="http://secher.bernard.free.fr/blog/public/2023_Zedda_Figure1C.jpg" alt="2023_Zedda_Figure1C.jpg, nov. 2023" style="display:table; margin:0 auto;" title="2023_Zedda_Figure1C.jpg, nov. 2023" /><br />
<br />
A Dunstable Downs, les deux individus sont de sexe féminin reliés au second degré du côté paternel. Elles appartiennent aux haplogroupes mitochondriaux K1c et N1b. La femme adulte est probablement la tante paternelle de la fillette. On peut supposer que la tante pouvait être une mère de substitution pour l'enfant:<br />
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<img src="http://secher.bernard.free.fr/blog/public/2023_Zedda_Figure1D.jpg" alt="2023_Zedda_Figure1D.jpg, nov. 2023" style="display:table; margin:0 auto;" title="2023_Zedda_Figure1D.jpg, nov. 2023" /></p>http://secher.bernard.free.fr/blog/index.php?post/2023/11/02/%C3%89tude-g%C3%A9nomique-de-deux-tombes-adulte/enfant-dans-le-Campaniforme#comment-formhttp://secher.bernard.free.fr/blog/index.php?feed/atom/comments/601Le génome de deux ancien individus vieux de 36.000 à 37.000 ans de Criméeurn:md5:d6e0e93f69df6909e72830e0709799312023-10-24T11:45:00+02:002023-11-02T18:09:40+01:00Bernard SécherADN ancien <p>Les hommes modernes sont présents en Europe depuis au moins 45.000 ans et possiblement encore plus tôt comme le montre les recherches archéologiques à la grotte Mandrin dans la vallée du Rhône. Les études de paléo-génétique sur des anciens individus d'Europe datant d'avant 40.000 ans montrent que ceux-ci se sont mélangés avec la population Néandertale et que de plus certains d'entre eux ont eu une descendance dans la population actuelle d'Asie de l'est. Quelques temps après 40.000 ans, cette ascendance disparait d'Europe et est remplacée par un nouveau profil génétique identifié d'abord à Kostenki et Sunghir en Russie, puis dans les clusters de Věstonice et Fournol associés à la culture gravettienne.<br />
<br />
L'abri sous roche de Buran-Kaya III en Crimée a été découvert en 1990 et montre la présence des hommes entre le Paléolithique Moyen et le Moyen-Âge. La couche datée entre 38.000 et 34.000 Ans a fourni des microlithes, des outils en os, de l'ocre, des objets en ivoire, des coquillages, des dents et différents fragments de crâne humain. Ce mobilier a été assigné à la culture gravettienne bien que sa datation soit nettement antérieure à l'apparition de cette culture en Europe Centrale. Certains ont rapproché ce mobilier de celui retrouvé dans plusieurs sites du Caucase, datés de la même époque et étiquetés comme proto-gravettien:<br />
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<img src="http://secher.bernard.free.fr/blog/public/2023_Bennett_Figure1a.jpg" alt="2023_Bennett_Figure1a.jpg, oct. 2023" style="display:table; margin:0 auto;" title="2023_Bennett_Figure1a.jpg, oct. 2023" />
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Andrew Bennett et ses collègues viennent de publier un papier intitulé: <a href="https://www.nature.com/articles/s41559-023-02211-9" hreflang="en">Genome sequences of 36,000- to 37,000-year-old modern humans at Buran-Kaya III in Crimea</a>. Ils ont analysé le génome de deux échantillons issus de la couche proto-gravettienne de Buran-Kaya III. Les résultats montrent que ces deux individus sont deux hommes. Le plus ancien daté de 36.800 ans, identifié sous le nom de BuKa3C, appartient à l'haplogroupe mitochondrial U. Le second, nommé BuKa3A, appartient à l'haplogroupe mitochondrial N1. Il possède de plus trois des huit mutations qui conduisent à l'haplogroupe N1b, un rare haplogroupe que l'on retrouve aujourd'hui principalement au Proche-Orient. Parmi les anciens individus, un Natoufien daté de 11.000 ans appartient également à la branche qui mène à l’haplogroupe N1b:<br />
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<img src="http://secher.bernard.free.fr/blog/public/2023_Bennett_FigureE2.jpg" alt="2023_Bennett_FigureE2.jpg, oct. 2023" style="display:table; margin:0 auto;" title="2023_Bennett_FigureE2.jpg, oct. 2023" /><br />
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L'haplotype du chromosome Y de BuKa3C, appartient à une branche basale de l'haplogroupe F, proche des haplotypes des anciens individus de Bacho Kiro (BK_F6-6201) et Oase1. Le génome du second individu BuKa3A est de mauvaise qualité mais son haplotype du chromosome Y semble également appartenir à une branche basale de l'haplogroupe F.<br />
<br />
Les couches antérieures du site de Buran-Kaya III ont montré l'existence de traces liés à Néandertal entre 43.200 et 40.200 ans. Ces résultats prouvent que Néandertal à habité ce site un peu avant l'homme moderne. La statistique f4 montre que les deux individus BuKa3A et BuKa3C possèdent de l'ADN issu de Néandertal, respectivement 3,8% et 2,2%.<br />
<br />
De plus la statistique f3 montre que les deux anciens individus de Buran-Kaya III possèdent plus d'affinité génétique avec les anciens individus plus récent que 38.000 ans qu'avec ceux plus anciens que cette date. Ils sont également plus proche génétiquement des anciens individus du Paléolithique Supérieur d'Europe que ceux des autres continents. Ils partagent ainsi le plus d'allèles avec les anciens gravettiens des clusters de Věstonice et de Fournol. De plus les deux individus BuKa3A et BuKa3C séparés d'environ 1000 ans, diffèrent quelques peu puisque BuKa3A a plus d'affinité génétique avec le cluster de Fournol que BuKa3C, et également plus d'affinité génétique avec les individus antérieurs comme Oase1, Bacho Kiro, Zlatý Kůň et Tianyuan en Asie de l'est:<br />
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<img src="http://secher.bernard.free.fr/blog/public/2023_Bennett_FigureE5.jpg" alt="2023_Bennett_FigureE5.jpg, oct. 2023" style="display:table; margin:0 auto;" title="2023_Bennett_FigureE5.jpg, oct. 2023" /><br />
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De plus les deux individus de Buran-Kaya III sont plus proches génétiquement des individus du cluster de Fournol que de ceux du cluster de Věstonice. Parmi les individus plus anciens qu'eux, ils sont plus proches d'Oase1 que de Bacho Kiro ou Ust’Ishim.<br />
<br />
Les auteurs ont ensuite modélisé un arbre de descendance à l'aide du logiciel qpGraph. Dans ce modèle l’individu de Zlatý Kůň est sur une branche qui a divergé le plus anciennement par rapport aux autres anciens individus d'Europe. Ainsi les anciens individus de Buran-Kaya III possèdent entre 6 et 17% d’ascendance issue de cette ancienne branche de Zlatý Kůň:<br />
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<img src="http://secher.bernard.free.fr/blog/public/2023_Bennett_Figure3.jpg" alt="2023_Bennett_Figure3.jpg, oct. 2023" style="display:table; margin:0 auto;" title="2023_Bennett_Figure3.jpg, oct. 2023" /><br />
<br />
Une ascendance spécifique (CHG) a été identifiée chez un ancien chasseur-cueilleur du Caucase de la grotte Satsurblia en Géorgie vieux de 9800 ans. On estime que cette ascendance CHG s'est séparée de l'ascendance WHG des chasseurs-cueilleurs de l'ouest il y a environ 45.000 ans, avant de subsister de manière isolée dans le Caucase. Cette ascendance a été retrouvée également chez d'autres anciens chasseurs-cueilleurs du Caucase dans la grotte Dzudzuana il y a 26.000 ans et sur le site archéologique de Kotias Klde daté de 25.000 ans, également en Géorgie. La statistique f4 montre également que les anciens individus de Buran-Kaya III partagent plus d'allèles avec les anciens chasseurs-cueilleurs du Caucase que la plupart des autres chasseurs-cueilleurs d'Europe plus vieux que 30.000 ans.
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Vous pouvez écouter l'émission de radio sur france culture du jeudi 2 novembre 2023:</p>
<div class="external-media" style="margin: 1em auto; text-align: center;">
<audio controls="controls"><source src="https://media.radiofrance-podcast.net/podcast09/21421-02.11.2023-ITEMA_23538581-2023C26620S0306-21.mp3" type="audio/mp3">Votre navigateur n'est pas compatible</source></audio>
</div>
http://secher.bernard.free.fr/blog/index.php?post/2023/10/24/Le-g%C3%A9nome-d-un-ancien-individu-vieux-de-36.000-%C3%A0-37.000-ans-de-Crim%C3%A9e#comment-formhttp://secher.bernard.free.fr/blog/index.php?feed/atom/comments/600Organisation sociale et relations familiales dans un tumulus vieux de 3800 ans correspondant à une population pastorale du centre de l'Eurasieurn:md5:f2479e75b1a481285018dabffa31a4632023-09-07T15:25:00+02:002023-09-07T15:25:00+02:00Bernard SécherADN ancien <p>Récemment les avancées scientifiques, notamment en paléo-génétique, ont permis d’appréhender les relations familiales dans les anciennes populations, notamment la descendance, le mariage et la résidence. Il est maintenant possible de reconstruire la généalogie de ces anciens individus sur plusieurs générations et d'en déduire leur organisation sociale.<br />
<br />
Jens Blöcher et ses collègues viennent de publier un papier intitulé: <a href="https://www.pnas.org/doi/10.1073/pnas.2303574120" hreflang="en">Descent, marriage, and residence practices of a 3,800-year-old pastoral community in Central Eurasia</a>. Ils ont analysé le génome des anciens individus enterrés dans un tumulus vieux de 3800 ans de la nécropole de Nepluyevsky localisé au centre des steppes Eurasiennes, au sud de l'Oural, sur la rive droite de la rivière Yandyrka. Ce cimetière comprend un total de 38 tumulus, et le tumulus étudié ici est le plus gros. Il abrite l'inhumation de 44 individus qui se trouvent dans la zone d’interactions entre la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Culture_Sroubna" hreflang="fr">culture Sroubna</a> et la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Culture_d%27Andronovo" hreflang="fr">culture d'Andronovo</a>:<br />
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<img src="http://secher.bernard.free.fr/blog/public/2023_Blocher_Figure1.jpg" alt="2023_Blocher_Figure1.jpg, sept. 2023" style="display:table; margin:0 auto;" title="2023_Blocher_Figure1.jpg, sept. 2023" /><br />
<br />
Les auteurs ont obtenu des données génomiques pour 32 anciens individus de ce tumulus, 18 hommes et 14 femmes. Les haplogroupes mitochondriaux sont divers: H, N, K, T et U. Ils sont associés aux populations occidentales. A l'inverse la diversité du chromosome Y est très faible puisque tous les hommes appartiennent à l"haplogroupe Q1b à l'exception de deux individus qui sont de l'haplogroupe R1a. Si ce dernier haplogroupe est fréquent dans les steppes Eurasiennes de l'est de l'Europe, Q1b est lui fréquent dans les populations du sud de la Sibérie ou de Mongolie.<br />
<br />
Les auteurs n'ont pas détecté d'excès de longs segments homozygotes, ce qui suggère peu de consanguinité dans cette population. Ils ont reconstruit un arbre généalogique sur trois générations connectant 33 individus dont 21 ont été séquencés pour la première fois dans cette étude. A la racine de cet arbre se trouvent six frères avec leurs épouses, leurs enfants et petits-enfants. Le frère le plus âgé (b32-1) est également le seul qui a eu des enfants avec deux femmes. Il est enterré avec une jeune femme de 25 à 35 ans (b32-2) dont il a eu au moins sept enfants: deux filles et cinq garçons. Il a eu de plus un enfant (b10-2) avec une autre femme (b28-2) enterrée plus loin. Un second frère (b2b-1) a eu un fils (b7-1) avec sa femme (b25-1). Un troisième frère (b2a-1) est enterrée avec une femme (b2a-2) sans enfant détecté dans cette étude. De plus les études ont montré que les deux individus: j11-1 et b17-1 sont deux jumelles monozygotes, nièces des trois frères identifiés ci-dessus. De même les deux individus: b30-1 et b22-1 sont également deux neveux, issus de deux autres frères:<br />
<br />
<img src="http://secher.bernard.free.fr/blog/public/2023_Blocher_Figure2.jpg" alt="2023_Blocher_Figure2.jpg, sept. 2023" style="display:table; margin:0 auto;" title="2023_Blocher_Figure2.jpg, sept. 2023" /><br />
<br />
Enfin onze individus n'ont pas pu être placés dans cet arbre généalogiques, bien que quatre d'entre eux soient reliés au 3ème ou au 4ème degré avec les individus contenus dans l'arbre. Deux des hommes de ces individus non contenus dans l'arbre, appartiennent à l’haplogroupe du chromosome Y: R1a.<br />
<br />
Les auteurs ont ensuite réalisé une Analyse en Composantes Principales pour comparer ces anciens individus de Nepluyevsky (disques rouges dans la figure ci-dessous) avec d'autres anciens individus d'Eurasie. Ils se regroupent tous ensemble avec les autres anciens individus des cultures du Bronze Moyen Sintashta et Fatyanovo, à l'exception de deux individus: une femme b28-2 située proche des individus Sarmates de l'Âge du Fer (triangles vert foncé) et un jeune homme b10-2 situé en position intermédiaire:<br />
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<img src="http://secher.bernard.free.fr/blog/public/2023_Blocher_Figure3A.jpg" alt="2023_Blocher_Figure3A.jpg, sept. 2023" style="display:table; margin:0 auto;" title="2023_Blocher_Figure3A.jpg, sept. 2023" /><br />
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Les cultures Sroubna et Andronovo sont supposées prendre leur source dans la culture Sintashta datée entre 2100 et 1800 av. JC. à partir des similarités dans les pratiques funéraires et le mobilier archéologiques. Cette étude permet de confirmer cette hypothèse. De plus la très grande majorité des individus enterrés danse ce tumulus appartiennent à une seule famille dont l'organisation sociale est patrilinéaire.</p>http://secher.bernard.free.fr/blog/index.php?post/2023/09/07/Organisation-sociale-et-relations-familiales-dans-un-tumulus-vieux-de-3800-ans-correspondant-%C3%A0-une-population-pastorale-du-centre-de-l-Eurasie#comment-formhttp://secher.bernard.free.fr/blog/index.php?feed/atom/comments/599