Turi King vient de publier un papier intitulé: Identification of the remains of King Richard III. Richard III est un des rois d'Angleterre les plus fameux et controversés. En effet, il usurpe le pouvoir à la mort de son frère Edouard IV en 1483, au détriment de ses neveux Édouard V et Richard de Shrewsbury, qu'il fait enfermer à la Tour de Londres et peut-être exécuter. Sa mort en 1485, seulement 2 ans plus tard, à la bataille de Bosworth, marque la fin de la dynastie des Plantagenêt après plus de 300 ans de règne et l'avènement de la dynastie des Tudor. Le mystère entourant le destin de son squelette a persisté jusqu'en 2012.

Les enregistrements historiques rapportent qu'après sa mort, les restes de Richard III ont été emmenés à Leicester et enterrés dans l'église médiévale du monastère de Grey Friars. Ce dernier est dissout en 1538 sous le règne de Henri VIII, et les bâtiments sont détruits dans les années qui ont suivi. Environ 125 ans plus tard une rumeur apparait et indique que les restes de Richard III ont été jeté dans la rivière Soar à Leicester. Cependant, il a longtemps persisté l'idée que cette rumeur était infondée. Néanmoins l'endroit exact de sa tombe a été perdu depuis sa mort.

Bien que son règne a duré que 2 ans, de nombreux aspects de sa vie et de sa mort existent dans les enregistrements historiques. Ainsi, il aurait été de faible constitution, avec une épaule plus haute que l'autre. De plus il aurait subi de nombreuses blessures à la bataille de Bosworth juste avant sa mort.

En septembre 2012, un squelette a été découvert sur le site présumé de l'ancien monastère de Grey Friars à Leicester. Les découvertes archéologiques, les analyses ostéologiques et les datations radiocarbone sont compatible avec le fait que ce squelette soit celui de Richard III. En effet ce squelette est celui d'un homme de 30 à 34 ans atteint d'une forte scoliose et qui présente de nombreuses traces de blessures. La datation radiocarbone donne une probabilité de 95,4% pour que l'individu soit décédé entre 1456 et 1530.

Pour compléter cette analyse, l'objectif de ce papier est de présenter une analyse génétique du squelette trouvé en 2012 à Leicester et de la comparer à l'ADN de certains des descendants contemporains de Richard III, et à ce que l'on sait de ses traits physiques (couleur des yeux et des cheveux).

L'analyse des chromsomes X et Y a montré que le squelette est bien celui d'un homme. Ensuite, les auteurs ont identifié 5 hommes reliés paternellement à Richard III:
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Ces 5 individus sont tous des descendants en ligne directe du 5ème duc de Beaufort (1744-1803). Ces individus sont éloignés de 24 à 26 générations de Richard III. Quatre de ces cinq individus sont de l'haplogroupe du chromosome Y R1b-U152. Le cinquième individu est de l'haplogroupe I-M170 et indique ainsi un événement de non paternité (adultère, adoption, ...) entre le 5ème duc de Beaufort et lui.

Le squelette de Leicester est de l'haplogroupe G2-P287. Ainsi les descendants du 5ème duc de Beaufort ne sont pas reliés paternellement au squelette de Leicester. Cependant, ceci n'est pas vraiment surprenant sachant que le taux d'événements de non paternité est compris entre 1 et 2% selon des études précédentes.

Les événenents de non maternité sont beaucoup moins probable que les événenements de non paternité pour des raisons évidentes. Cependant les lignées maternelles sont plus compliquées à restituer à cause du changement de nom à chaque génération. Les auteurs ont identifié 2 individus reliés maternellement avec Richard III:
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Ces individus sont éloignés de Richard III de 19 et 21 générations. L'analyse complète de l'ADN mitochondrial a montré qu'un individu a exactement le même haplotype que le squelette, alors que le second individu diffère seulement d'une mutation avec le squelette. Ils sont tous de l'haplogroupe J1c2c3. De plus cet haplotype est très rare car il est absent d'une base de données de 26127 individus. Il est donc très peu probable que la correspondance de ces 2 individus avec le squelette de Leicester soit du au hasard. Ils sont donc bien reliés maternellement avec le squelette de Leicester.

L'analyse ADN du squelette montre que l'individu avait une probabilité de 96% d'avoir les yeux bleus, et une probabilité de 77% d'avoir les cheveux blonds. Cependant, un certain nombre d'individus blonds à leur naissance, voient leur cheveux foncer à l'adolescence. La figure ci-dessous montre en haut, la prédiction de couleur pour les yeux et les cheveux en fonction de l'ADN du squelette, et en bas le portrait de Richard III le plus ancien connu aujourd'hui. Ce dernier correspond bien aux prédictions de l'ADN:
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L'ensemble des analyses ostéologiques, des datations radiocarbone et des analyses génétiques montre que le squelette de Leicester a une très forte probabilité d'être celui de Richard III. Seul l'analyse ADN du chromosome Y diffère, mais ce point peut être expliqué aisément par un événement de non paternité entre Richard III et le 5ème duc de Beaufort.