Les premiers hommes modernes se sont diffusés en Europe entre 45.000 et 35.000 ans, au moment où disparaissaient les hommes de Néandertal présents dans la région depuis au moins 300.000 ans. La comparaison des génomes de l'homme de Néandertal et de l'homme moderne a montré que Néandertal a contribué à envrion 1 à 3% du génome des hommes modernes situés en dehors de la région sub-Saharienne de l'Afrique.

Qiaomei Fu vient de publier un papier: An early modern human from Romania with a recent Neanderthal ancestor qui donne l'analyse du génome d'un individu trouvé en 2002 dans la grotte Peștera cu Oase située dans un système karstique près de la ville de Anina dans le sud-ouest de la Roumanie. La mandibule humaine découverte (nommée Oase1) est datée entre 42.000 et 37.000 ans. Il s'agit donc d'un des plus anciens restes humains d'homme moderne en Europe. Cependant certains aspects de cette mandibule sont archaïques et consistant avec Néandertal.

La séquence mitochondriale obtenue est située à la racine de l'haplogroupe N avec quelques mutations privées:
2015_Fu_FigureS1.jpeg

Dans la figure ci-dessus Oase1_all_fragments correspond à la séquence trouvée avec l'ADN contaminé et Oase1_damaged_fragments correspond à la séquence trouvée sans l'ADN contaminé. L'âge de cette séquence peut être estimée à environ 36.330 ans en accord avec les mesures radiocarbones.

L'analyse des chromosomes X et Y a montré que cet individu était un homme. Son haplogroupe du chromosome Y est F* car il possède les SNPs: P187 et P158.

La statistique D utilisée sur l'ADN autosomal montre que Oase1 partage plus d'allèles avec les hommes contemporains d'Asie de l'est et les Amérindiens, qu'avec les Européens contemporains. Par contre il partage autant d'allèles avec les Est-Asiatiques et les Amérindiens qu'avec les individus paléolithiques ou mésolithiques d'Eurasie (Loschbour, Kostenki ou Ust-Ishim):
2015_Fu_Figure1.jpeg

Cela signifie que Oase1 appartenait à une population qui n'a pas contribué génétiquement (ou très peu) aux Européens actuels. Ces résultats contrastent avec l'individu de Kostenki de Russie (vieux de 39.000 à 36.000 ans) qui partagaient plus d'allèles avec les Européens actuels qu'avec les Est-Asiatiques.

Le génome de Oase1 a ensuite été comparé avec le génome de Néandertal. Il a été ainsi montré que Oase1 partage beaucoup plus d'allèles avec Néandertal que tous les hommes contemporains, ou que d'autres individus anciens âgés de 24.000 à 45.000 ans. Les mesures ont montré que Oase1 possédaient entre 6 et 9,4% d'ADN de Néandertal.

La position des allèles partagés avec Néandertal a été indiquée dans la figure ci-dessous:
2015_Fu_Figure2.jpeg

Les 7 barres grises correspondent aux segments partagés avec Néandertal. 3 d'entre eux sont supérieurs à 50 centimorgans (cM) suggérant que la contribution de Néandertal au génome de Oase1 était récente: Oase1 devait avoir un ancêtre Néandertal seulement 4 ou 6 générations avant lui (moins de 200 ans avant).

Ainsi cet individu de Roumanie montre que le mélange génétique entre les hommes modernes et les hommes de Néandertal n'a pas eu lieu seulement au Proche-Orient à la sortie d'Afrique de l'homme moderne. Cela arriva plus tard et notamment en Europe.