Les preuves linguistiques et archéologiques montrent que les langues Bantoues se sont diffusées avec l'agriculture il y a entre 5000 et 4000 ans de l'Ouest de l'Afrique vers l'Est et le Sud.

Etienne Patin et ses collègues viennent de publier un papier intitulé: Dispersals and genetic adaptation of Bantu-speaking populations in Africa and North America. Ils ont séquencé le génome de 1318 individus issus de 35 populations Bantoues d'Afrique de l'Ouest qu'ils ont fusionnés avec le génome d'autres populations Africaines Bantoues ou non pour former un ensemble de 2055 échantillons issus de 57 populations différentes. Dans les figures ci-dessous, BSP (Bantu-speaking populations) est indiqué pour les populations Bantoues de l'Ouest (wBSP), de l'Est (eBSP), du Sud-Ouest (swBSP) et du Sud-Est (seBSP). RHG (Rainforest Hunter-Gatherer) est utilisé pour les chasseurs-cueilleurs des forêts de l'Ouest (wRHG) et de l'Est (eRHG):
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Les auteurs ont réalisé une analyse avec le logiciel ADMIXTURE:
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La figure ci-dessus, indique que toutes les populations Bantoues se regroupent entre elles, avec une majorité d'ascendance rouge. Cette homogénéité reflète la récente dispersion de ces populations en Afrique Sub-Saharienne. Elles possèdent de faibles proportions d'ascendance chasseur-cueilleur des forêts (16% en vert clair), Afro-asiatique (17% en rose), et chasseur-cueilleur San (23% en jaune pâle).

Le logiciel GLOBETROTTER a permis de mettre en évidence des événements de mélange génétique. Ainsi un mélange génétique a eu lieu il y a entre 1500 et 1000 ans, puis entre 400 et 150 ans entre des Bantous de l'Ouest d'Angola et des populations Afro-asiatiques d’Éthiopie (10%) (Figure A ci-dessous). En Afrique du Sud, un mélange génétique a eu lieu il y a environ 700 ans entre une population Bantoue d'Angola mais aussi de l'Est, et des chasseurs-cueilleurs San de Namibie (23%) (Figure B ci-dessous):
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Il y a environ 800 ans un mélange génétique a eu lieu entre une population Bantoue de l'Ouest et des chasseurs-cueilleurs des forêts.

Ces données renforcent le modèle selon lequel l'expansion Bantoue s'est effectuée d'abord vers le sud depuis le lieu d'origine situé à la frontière entre le Nigeria et le Cameroun, jusqu'en Angola à travers la zone forestière, puis vers l'Est et vers le Sud en deux mouvements séparés.

Les auteurs ont ensuite recherché des signes de sélection naturelle durant la dispersion des populations Bantoues. Ils ont ainsi mis en évidence 8, 5 et 7 régions du génome présentant une forte sélection dans les populations Bantoues de l'Ouest, de l'Est et du Sud-Est respectivement:
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Ainsi, les gènes HLA qui transmettent la réponse immunitaire, présentent les plus forts signaux de sélection. Ensuite le gène CD36 associé à la réponse à la malaria présente le second signal. Le gène LCT qui code la réaction au lactase présente un signal fort chez les populations Bantoues de l'Est.

Les auteurs ont ensuite estimé la contribution Bantoue dans la population Afro-Nord Américaine en analysant 5244 échantillons. Ainsi le logiciel ADMIXTURE estime que les Afro-Américains possèdent entre 73% et 78% d'ascendance Africaine dont 13% issue de Sénégambie, 7% de Côte d'Ivoire, 50% du Golfe du Bénin et 30% d'Afrique Centrale de l'Ouest:
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