Après le Dernier Maximum Glaciaire autour de 23.000 ans, la glace s'est peu à peu retirée de la Scandinavie laissant la place à de nouvelles régions habitables permettant aux plantes et aux animaux de recoloniser la région. Les données archéologiques montrent que l'homme arrive en Scandinavie autour de 11.700 ans à la fois dans le Nord et dans le Sud. Les glaciers occupent alors le centre de la péninsule, mais la côte Nord est libérée des glaces.

Les premières analyses d'ADN ancien sur des chasseurs-cueilleurs Scandinaves ont montré qu'ils étaient issus de deux populations Mésolithiques: chasseurs-cueilleurs de l'Ouest (WHG) originaires de l'Europe de l'Ouest, du Centre et du Sud et chasseurs-cueilleurs de l'Est (EHG) originaires de l'Europe du Nord-Est.

Torsten Günther et ses collègues viennent de publier un papier intitulé: Genomics of Mesolithic Scandinavia reveal colonization routes and high-latitude adaptation. Ils ont séquencé le génome de sept chasseurs-cueilleurs Scandinaves datés entre 9500 et 6000 ans situés à Hummervikholmen au Sud-Ouest de la Norvège, à Steigen dans le Nord de la Norvège et dans les îles de la Baltique: Stora Karlsö et Gotland. Ces données ont été comparées avec les génomes des chasseurs-cueilleurs de Motala en Suède et de Zvejnieki en Lettonie:
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Quatre des individus sont des hommes et trois sont des femmes. Tous les individus de l'Ouest et du Nord de la Scandinavie et un de l'Est de la Scandinavie sont de l'haplogroupe mitochondrial U5a1, les autres individus de l'Est de la Scandinavie sont de l'haplogroupe U4. Les hommes sont tous de l'haplogroupe du chromosome Y: I2 commun en Europe avant le Néolithique:
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La haute couverture du génome de l'individu SF12 a permis aux auteurs de découvrir de nouveaux SNPs. Ainsi 17% de ces SNPs ne sont pas connus chez les populations actuelles suggérant qu'une part importante de la variation du génome des Mésolithiques Scandinaves a été perdue aujourd'hui. La qualité de ce génome a également permis aux auteurs de reconstruire son visage en 3D:
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Dans la figure ci-dessus, la première ligne montre la face reconstruite à partir du génome, la seconde ligne ajoute une pigmentation de la peau typiquement Européenne, et la troisième ligne une pigmentation de la peau correspondant au génome de l'individu.

Les données ont été ensuite comparées avec les individus de Motala en Suède, 47 individus anciens d'Eurasie et 203 populations actuelles. Les auteurs ont réalisé une Analyse en Composantes Principales:
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Les résultats montrent que les chasseurs-cueilleurs Scandinaves sont issus d'un mélange génétique entre des chasseurs-cueilleurs de l'Ouest et des chasseurs-cueilleurs de l'Est.

Les auteurs ont ensuite investigué quatre routes de migration hypothétiques:

  • une migration WHG venant du Sud
  • une migration EHG venant de l'Est à travers la mer Baltique
  • une migration EHG venant de l'Est le long de la côte Nord Atlantique
  • une migration EHG venant de l'Est et du Sud de la mer Baltique

De manière intéressante les SHG du Nord et de l'Ouest montrent plus d'affinité génétique avec les EHG que les SHG de l'Est et du Centre. Ces résultats couplés avec les preuves archéologiques et les données isotopiques indiquent que le scénario de colonisation de la Scandinavie implique une première migration par des WHG venant du Sud, suivie par une seconde migration d'EHG venant du Nord-Est le long de la côte Atlantique:
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Les auteurs ont ensuite déterminé la diversité génétique des populations WHG et SHG par des méthodes de mesure des longueurs des segments homozygotes et de déséquilibre de liaison. Ainsi la population SHG était équivalente en nombre à la population WHG.

Les auteurs ont ensuite déterminé l'adaptation de la population SHG aux hautes latitudes. Notamment il y a le gène TMEM131 associé aux performances physiques qui pourrait être associé à l'adaptation au froid. Les auteurs ont également regardé les gènes liés à la pigmentation: SLC24A5 et SLC45A2 liés à la pigmentation de la peau et OCA2/HERC2 lié à la pigmentation des yeux. Ainsi les SHG montrent une combinaison unique en Europe au Mésolithique avec une peau claire et des yeux variés entre des couleurs bleu et marron clair. C'est très différents des WHG qui ont une peau foncée et des yeux bleus et des EHG qui ont la peau clair et des yeux marrons:
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Ces valeurs ne sont pas seulement expliquées par un mélange génétique entre WHG et EHG, mais également par une adaptation aux hautes latitudes.

Mise à jour

Le papier a été définitivement publié sous le titre: Population genomics of Mesolithic Scandinavia: Investigating early postglacial migration routes and high-latitude adaptation en janvier 2018