La région du Xinjiang a longtemps été un carrefour pour les échanges de populations, culturels, agricoles et linguistiques. Elle peut être divisée en deux parties séparées par les montagnes du Tianshan: le bassin de la Dzoungarie au nord et le bassin du Tarim au sud. Le bassin de la Dzoungarie abrite des sites archéologiques appartenant aux cultures Afanasievo (3000 à 2600 av. JC.) et Chemurchek (2500 à 1700 av. JC.). La découverte de centaines de momies dans le bassin du Tarim datées entre 2000 av. JC et 200 ap. JC. a attiré l'attention du monde entier. Les plus anciennes se trouvent sur les sites de Gumugou (2135 à 1939 av. JC.), Xiaohe (1884 à 1736 av. JC.) et Beifang (1785 à 1664 av. JC.) qui sont regroupés sous la dénomination d'horizon Xiaohe de l'Âge du Bronze. Plusieurs hypothèses ont été émises pour expliquer leur origine: Yamnaya/Afanasievo, bactrienne (BMAC) et couloir des montagnes de l'Asie intérieure (IAMC).

Les études de paléo-génomique précédentes ont montré que les populations des steppes Yamnaya/Afanasievo ont un profil génétique différent des populations BMAC ou IAMC d'Asie Centrale. Ces populations sont également distinctes des populations de chasseurs-cueilleurs d'Asie intérieure.

Fan Zhang et ses collègues viennent de publier un papier intitulé: The genomic origins of the Bronze Age Tarim Basin mummies. Ils ont séquencé le génome de cinq individus du bassin de la Dzoungarie de la culture Afanasievo datés entre 3000 et 2800 av. JC. et treize individus du bassin du Tarim datés entre 2100 et 1700 av. JC. appartenant à l'horizon Xiaohe:

2021_Zhang_Figure1.jpg, oct. 2021

Les auteurs ont réalisé une Analyse en Composantes Principales. Dans la figure ci-dessous la première composante sépare les populations occidentales à gauche des populations orientales à droite:

2021_Zhang_Figure2.jpg, oct. 2021

Les anciens individus du bassin de la Dzoungarie se situent pas très loin des populations des steppes du début de l'âge du Bronze: Yamnaya et Afanasievo. A l'inverse, les anciens individus du bassin du Tarim se regroupent ensemble près des anciens individus du Botaï et de Sibérie de l'ouest qui possèdent une forte proportion d'ascendance ANE (Anciens Nord Eurasiens). Cependant un des individus du site de Beifang se regroupe avec les anciens individus de la région du lac Baïkal du début de l'Âge du bronze.

L'utilisation du logiciel qpAdm montre que les anciens individus de la Dzoungarie possèdent entre 50 et 70% d'ascendance Afanasievo, entre 19 et 36% d'un mélange ANE/Tarim et entre 9 et 21% d'ascendance du lac Baïkal. De plus les anciens individus de la culture Chemurchek possèdent environ les deux tiers d'ascendance des anciens individus de la Dzoungarie et le reste issu d'un mélange entre Tarim/IAMC ou BMAC.

Les anciens individus du Tarim sont issus d'un mélange génétique entre une population ANE (72%) et des anciens individus de la région du lac Baïkal (28%). Ils ne possèdent pas d'ascendance Afanasievo. La date de ce mélange génétique est estimé à 183 générations avant la date de ces individus soit entre 8000 et 6000 av. JC.:

2021_Zhang_Figure3.jpg, oct. 2021

Ainsi les momies du Tarim de l'Âge du Bronze appartiennent à une ancienne population locale qui est restée longtemps isolée génétiquement. Cependant cette population a eu des échanges culturels avec les populations voisines puisque le pastoralisme laitier et l'agriculture du blé et du millet forment la base de l'économie locale.

Les auteurs ont également analysé les protéomes de tartre dentaire pour sept individus du site de Xiaohe datés entre 2000 et 1700 av. JC. Les résultats ont confirmé l'ingestion de produits laitiers bien que ces individus étaient intolérants au lactose.