Les pratiques funéraires ouvrent une fenêtre sur le monde et la structure sociale des sociétés du passé. L'ethnographie nous apprend que beaucoup de cultures attribuent peu de personnalité aux très jeunes enfants. Ainsi les sépultures de nouveau né fournissent des indices importants sur qui était considéré comme une personne et méritait ainsi les attributs d'un moi individuel, d'une agentivité et d'une éligibilité à l'adhésion à un groupe.

Jamie Hodgkins et ses collègues viennent de publier un papier intitulé: An infant burial from Arma Veirana in northwestern Italy provides insights into funerary practices and female personhood in early Mesolithic Europe. Ils ont étudié les restes d'un nouveau né, datés du début du Mésolithique et situés dans la grotte Arma Veirana localisée dnas le nord ouest de l'Italie:

2021_Hodgkins_Figure1.jpg, déc. 2021

La position des restes osseux indique une position du corps allongé sur le dos, avec la tête dirigée vers l'ouest. La datation radiocarbone effectuée directement sur les os donne une valeur comprise entre 10.211 et 9914 ans. Le squelette du nouveau né est très abîmé à cause du piétinement du sol, de l'érosion par l'eau et de l'altération chimique. La majeure partie de la région mi-abdominale est manquante. De nombreux pendentifs et perles en coquillage ont été retrouvés avec le squelette.

L'étude de la poussée dentaire suggère que cet individu est âgé de moins de deux mois. De plus les mesures histologiques de l'émail des dents fourni un âge compris entre 40 et 50 jours. Elles indiquent également des périodes de stress affectant la mère et son fœtus, 47 et 28 jours avant la naissance. L'analyse isotopique du carbone et de l'azote indique également une nourriture terrestre pour la mère.

L'analyse protéomique indique que ce nouveau né est une fille. Ce résultat est confirmé par l'analyse de l'ADN ancien. Son haplogroupe mitochondrial est U5b2b, fréquent à cet époque dans la péninsule Italienne, mais aussi en Europe occidentale:

2021_Hodgkins_FigureS13.jpg, déc. 2021

Le squelette est associé à 66 perles de Columbella rustica et trois pendentifs de Glycymeris dont une partie recouvrait l'épaule droite et le haut du thorax, et une autre partie la région abdominale. De plus 27 coquillages de Columbella rustica et un de Glycymeris ont été retrouvés dans une fosse à proximité du squelette. Tous ces coquillages étaient usés et ont donc été portés par une tierce personne avant d'être associés à la sépulture de ce nouveau né:

2021_Hodgkins_Figure5.jpg, déc. 2021

L'abondance de cette parure indique que les sociétés du début du Mésolithique en Italie du nord-ouest attribuaient une personnalité aux nouveau-nés de sexe féminin. Ce résultat suggère à cette époque une égalité dans le traitement des individus dans la vie ou la mort indépendamment de leur âge ou de leur sexe.