Généalogie génétique

Le Néolithique émerge au Proche-Orient entre 9000 et 7000 av. JC. Le mécanisme de néolithisation au sud du Caucase est encore mal compris. Dans cette région les sites Mésolithiques connus sont la grotte Damjili située à l'ouest de l'Azerbaïdjan, l’abri sous roche de Kmlo-2 à l'ouest de l'Arménie et la grotte de Kotias Klde à l'ouest de la Géorgie. Les premières études de paléo-génomique montrent une origine commune de ces individus avec les anciens Iraniens, mais diffèrent des chasseurs-cueilleurs d'Anatolie ou du Levant suggérant une forte diversité génétique des chasseurs-cueilleurs du Proche-Orient. Les premiers habitats du Néolithique appartiennent à la culture acéramique en Géorgie centrale, Géorgie occidentale et dans l'ouest de l'Azerbaïdjan et correspondent à une phase intermédiaire entre le Mésolithique et le Néolithique. Au sud du Caucase, la culture de Shomutepe-Shulaveri est la première culture présentant un package néolithique complet. Elle est caractérisée par des habitats circulaires en briques crues. l'élevage d'animaux domestiques, la culture de céréales, la poterie et l'industrie de l'os et de l'obsidienne. L'origine de la culture de Shomutepe-Shulaveri est encore débattue. Le site archéologique de Mentesh Tepe situé à l'ouest de l'Azerbaïdjan, est un des plus anciens de cette culture. Il a été fouillé entre 2007 et 2015. Une tombe collective contenant une trentaine d'individus y a été découverte. Elle est associée à la fin de la première phase d'occupation. Cette sépulture suggère un événement dramatique comme une épidémie ou une famine. Cependant les restes humains ne présentent aucune trace de violence.

Perle Guarino-Vignon et ses collègues viennent de publier un papier intitulé: Genome-wide analysis of a collective grave from Mentesh Tepe provides insight into the population structure of early neolithic population in the South Caucasus. Ils ont analysé le génome de quelques individus de cette tombe collective. Ils ont obtenu des résultats pour trois échantillons dont une femme MT7 et deux jeunes garçons étroitement enlacés MT23 et MT26:



Les auteurs ont réalisé une Analyse en Composantes Principales et une analyse avec le logiciel ADMIXTURE pour comparer ces trois génomes avec d'autres anciens génomes de la région ou de populations contemporaines. La figure ci-dessous montre que ces trois individus sont localisés à proximité des autres individus du Néolithique et du Chalcolithique du sud du Caucase représentés par des symboles roses sur la PCA. Cependant l'individu issu du site de Aknashen est plus proche des chasseurs-cueilleurs du Caucase que des agriculteurs du Néolithique, et se trouve en position intermédiaire entre les fermiers d'Iran et ceux d'Anatolie:



L'analyse avec le logiciel ADMIXTURE montre que les fermiers de Mentesh Tepe possèdent trois composantes principales: Néolithique d'Iran en vert foncé (30%), Néolithique du Levant en rose pâle (15%) et Néolithique d'Anatolie en rose, bleu et vert clair (55%). Ces trois individus sont proches génétiquement d'un autre individu du même site de Mentesh Tepe prélablement publié (MT001) et d'autres individus du Néolithique ou du Chalcolithique du sud du Caucase. Ils sont également proches des individus du Chalcolithique et de l'Âge du Bronze d'Anatolie.

La statistique D confirme que les anciens fermiers de Mentesh Tepe partagent plus d'allèles avec les premiers fermiers d'Europe, d'Anatolie ou du Levant que les chasseurs-cueilleurs du Caucase. Cependant, ils partagent plus d'allèles avec les chasseurs-cueilleurs du Caucase, que les fermiers d'Anatolie.

L'analyse avec le logiciel qpAdm montre que les anciens individus de Mentesh Tepe peuvent être modélisés comme issus d'un mélange génétique entre une population du sud-est de l'Anatolie (63%) et une population Iranienne (37%), ou une population du sud-est de l'Anatolie (entre 51 et 64%) et une population de chasseurs-cueilleurs du Caucase (entre 36 et 49%). L'analyse avec le logiciel DATES montre que ce mélange génétique est survenu environ 15 générations avant l'époque des fermiers de Mentesh Tepe, soit vers 6300 av. JC. Ils peuvent également être modélisés comme issus d'un mélange génétique entre trois populations: les chasseurs-cueilleurs du Caucase (entre 15 et 25%), les fermiers d'Anatolie (entre 40 et 45%) et une population Néolithique du nord-et de la Mésopotamie (entre 29 et 45%).

Les auteurs ont ensuite analysé le génome d'individus de l'Âge du Bronze du sud du Caucase préalablement publiés comme des individus de la culture Kura-Araxes. Sur la PCA ces individus sont décalés vers les anciens individus des Steppes Pontiques. Sur la figure ADMIXTURE, ils incluent une nouvelle composante rouge maximale chez les individus des steppes et présente aussi chez les chasseurs-cueilleurs du Caucase. De manière intéressante les individus du Chalcolithique de la grotte Areni-1 en Arménie possèdent tous cette composante alors que l'individu du Chalcolithique du site de Alkhantepe en Azerbaïdjan ne la possède pas. Ces résultats suggèrent un flux de gènes en provenance des steppes dans la population du sud Caucase. Le logiciel qpAdm montre que ces individus de la grotte Areni-1 peuvent être modélisés comme issus d'un mélange génétique entre une population des steppes (25%) et la population du Néolithique de Mentesh Tepe (75%). La contribution des steppes augmente chez les individus de la culture Kura-Araxes entre le début et la fin de l'Âge du Bronze suggérant des migrations en provenance des steppes vers le sud du Caucase durant cette période.

Les quatre individus de Mentesh Tepe du Néolithique possèdent trois haplogroupes mitochondriaux différents U7, K1 et U1a1. Les deux individus MT23 et MT26 possèdent le même haplogroupe mitochondrial et le même haplogroupe du chromosome Y: J2b. De plus le logiciel READ suggère que ces deux derniers individus sont reliés au premier degré. Comme ce sont deux jeunes garçons, ils s'agit de deux frères.