Les Caraïbes sont une région bordée par l'Océan Atlantique à l'est, la côte sud des Bahamas au nord, la côte nord de l'Amérique du sud au sud et la côte est du Mexique à l'ouest. Ils comprennent environ 700 îles et 17 millions de personnes. La première présence humaine est datée de 7200 ans sur l'île de Trinidad. Ensuite une colonisation des îles de Cuba, Hispañola et Porto-Rico est attestée entre 8000 et 5000 ans, suivie des Petites Antilles et de la Barbade entre 5000 et 3000 ans. Pour les autres îles, les données archéologiques et linguistiques suggèrent une arrivée de l'homme dans des migrations successives jusque vers l'an 1500. Les différentes sources de peuplement des Petites Antilles sont l'Amérique du sud ou les Grandes Antilles. Au moins 8 groupes ethniques différents peuplaient cette région au moment de l'arrivée des Européens: les Guanahatebay de Cuba, les Macorix et les Ciguayo d'Hispañola, les Taïnos Lucayens dans les Bahamas, les Ciboney à Haïti, la Jamaïque et Cuba, les Taïnos classique dans la République Dominicaine, Porto-Rico, les îles Vierge et les îles Leeward, et les Kalipuna et les Karina dans les îles du Vent.
Ces premières populations ont été beaucoup affectées par l'assimilation génétique, les maladies et les génocides au moment de la colonisation Européenne et de la traite des esclaves. Elles ont été également dispersées dans d'autres îles ou d'autres lieux des Amériques durant cette période.
Tandis que les données archéologiques, ethno-historiques et linguistiques apportent des réponses cruciales au peuplement et à l'histoire de cette région, beaucoup de questions subsistent quant à l'origine et la date des migrations initiales.
Jada Benn Torres vient de publier un papier intitulé: Genetic Diversity in the Lesser Antilles and Its Implications for the Settlement of the Caribbean Basin. Il a analysé l'ADN mitochondrial et du chromosome Y de deux communautés indigènes: la First Peoples’ Community (FPC) de Santa Rosa à Trinidad et les Garifuna de Saint Vincent:
88 échantillons ont été recueillis pour des tests génétiques: 65 sont des Garifuna de Saint Vincent et 23 de la FPC de Trinidad. Après élimination des échantillons apparentés, il en reste 12 de la FPC de Trinidad (dont 5 hommes) et 43 Garifuna (dont 18 hommes). Ces données ont été comparées à d'autres populations des Caraïbes et d'Amérique du Sud et Centrale.
Les résultats ont montré que pour l'ensemble des 2 communautés, la proportion de lignées maternelles indigènes est de 42%. Cependant, seulement 2 des 5 haplogroupes mitochondriaux Amérindiens principaux: A2 et C1 ont été détectés:
Il y a également 4 lignées maternelles Africaines (L0, L1, L2 et L3) et une lignée sud Asiatique (M33) à Trinidad. La diversité génétique est plus grande dans la communauté de Trinidad que chez les Garifuna de Saint Vincent:
Cependant lorsqu'on enlève les lignages Africains et Asiatiques, cette diversité chute fortement. Ceci peut-être du à plusieurs facteurs comme la dérive génétique, la perte de lignages aux temps historiques et l'endogamie.
Une Analyse Multi-Échelles a été réalisée sur les distances génétiques entre échantillons à l'intérieur de chaque population. Seuls les haplotypes Amérindiens ont été utilisés. Comme les populations d'Amérique du Nord n'apportent aucune information supplémentaire, elles ont été retirées de cette analyse:
De manière intéressante, les populations des Caraïbes sont distantes l'une de l'autre avec des populations d'Amérique du Sud situées entre elles. Ainsi FPC de Trinidad est plus proche de certaines populations du Brésil, de Colombie ou d'Amérique Centrale, alors que les Garifuna de Saint Vincent sont plus proche de populations différentes de Colombie ou du Brésil. De plus, les populations des Caraïbes ne semblent pas se rapprocher d'un groupe linguistique particulier. Néanmoins elles devaient parler une langue appartenant à la fois aux familles Arawakiennes et Caribes.
Des réseaux ont été ensuite tracé à partir des séquence HVR1 des différentes populations, pour les haplogroupes A2 et C1. Comme les haplotypes des populations d'Amérique Centrale sont bien séparées des autres populations, elles ont été retirées de cette analyse:
Dans le réseau de l'haplogroupe A2 ci-dessus, des haplotypes de Trinidad, Porto Rico, du Venezuela et du Brésil se situent dans le nœud central. Un haplotype voisin défini par la mutation 16288C est observé uniquement à St Vincent.
Dans le réseau de l'haplogroup C1, les échantillons de Saint Vincent se situent en majorité dans le noeud central et le nœud qui définit la sous-clade C1d (mutation 16051G), contrairement aux échantillons de Trinidad ou de Porto Rico:
Les deux haplotypes C1 de Saint Vincent correspondent à des haplotypes anciens de Guadeloupe situés à Marie-Galante et à la Désirade datés entre 1289 et 1445. Il y a donc une certaine continuité génétique dans les Petites Antilles au moins depuis cette date. D'autre part les lignages maternels Asiatiques à Trinidad ne sont pas surprenant sachant qu'après l'émancipation de 1838, les esclaves d'origine Africaine de Trinidad ont quitté l'île et ont été remplacé par des travailleurs sud Asiatiques originaire du Bengale, de l'Awadh dans le nord de l'Inde et du Penjab.
Les estimations des âges des lignages maternels Amérindiens indiquent que l'haplogroupe C1 est plus jeune (2900 ans) que l'haplogroupe A2 (8500 ans). Ces dates coïncident avec les preuves archéologiques qui indiquent que les Petites Antilles ont été habitées il y a 7200 ans dans une série de migrations depuis les régions voisines.
Des haplogroupes du chromosome Y Africains (E1b), Européens (R1b) et Amérindiens (Q-M3) sont présents dans les deux populations de Trinidad et de Saint Vincent. L'haplogroupe Amérindien C3c commun parmi les populations Na-Dene d'Amérique du Nord est absent des populations des Caraïbes. Plus de 80% des haplotypes du chromosome Y ne sont pas Amérindiens. A Saint Vincent il y a environ autant d'haplotypes Africains que d'haplotypes Européens, alors qu'à Trinidad il y a beaucoup plus d'haplotypes Africains (60%) qu'Européens (20%) (voir la table 3 ci-dessus). La diversité génétique paternelle des populations des Caraïbes est équivalente à celle des populations des Amériques. Tous les haplotypes des Caraïbes sont uniques sauf un haplotype de Saint Vincent commun avec un haplotype de Guyane Française (population Kali'na qui parle une langue des Caraïbes).
Une Analyse Multi-Échelles a été réalisée sur les distances génétiques entre échantillons à l'intérieur de chaque population:
Les groupes des Caraïbes sont éloignés des groupes du Brésil ou de Colombie. Un réseau a été tracé pour l'haplogroupe Q-M3 à partir des marqueurs STR:
Les haplotypes des Caraïbes sont uniques et dispersés dans le réseau. Cependant le manque d'haplogroupes dans les Caraïbes que l'on retrouve dans les populations du sud-ouest de l'Amérique, indique que la source potentielle des populations des Caraïbes doit se situer plutôt au Brésil ou au Venezuela. De plus les haplotypes diffèrent entre Trinidad et Saint Vincent malgré la faible distance géographique entre les deux îles. Cela implique que soit elles sont issues de populations différentes, soit elles ont subi des dérives génétiques différentes de par leur isolations respectives. Ces données génétiques pointent davantage pour une origine chez les Kali'na parlant une langue Caribe. Ils se situent actuellement au nord du Brésil, au Venezuela, en Guyane Britannique et au Surinam.
Diversité génétique dans les Petites Antilles
vendredi 16 octobre 2015. Lien permanent Génétique des populations