La région Franco-Cantabrique au Nord de l'Espagne est une des régions les plus peuplées d'Europe au Paléolithique Supérieur. La grotte de Santimamiñe est localisée sur le bord oriental du bassin de la rivière Oka, et très proche de son estuaire à moins de 10 km de la côte Atlantique:
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C'est un site archéologique clef bien connu pour son art Paléolithique. Son occupation s'étale du Magdalénien (15.500 av. JC.) à l'Âge du Bronze (1500 av. JC.), incluant même quelques traces sporadiques de la période Romaine tardive.

Leire Palencia-Madrid et ses collègues viennent de publier un papier intitulé: Ancient mitochondrial lineages support the prehistoric maternal root of Basques in Northern Iberian Peninsula. Ils ont analysé l'ADN mitochondrial de sept squelettes issus de cette grotte du Mésolithique à la période Romaine. Ils ont séquencé les régions HVR1 et HVR2 de la région de contrôle et testé quelques SNPs de la région codante pour discriminer les principaux haplogroupes. Ils ont ensuite comparé ces résultats avec quelques populations anciennes d'Europe et la population actuelle située dans les villages entourant la grotte de Santimamiñe.

Les auteurs ont également effectué des mesures isotopiques de l'azote et du carbone sur les squelettes pour déterminer leur diète, et des mesures radiocarbone pour déterminer leur âge. Le plus vieil échantillon date autour de 5000 av. JC, correspondant à la date d'arrivée du Néolithique dans la région. Cependant ses résultats isotopiques montrent sans ambiguïté que sa nourriture était basée essentiellement sur des produits marins (coquillages) typiques des populations Mésolithiques. Les autres échantillons avaient une diète basée sur des produits terrestres caractéristiques des sociétés Néolithiques:
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Les résultats mitochondriaux montrent que l'individu du Mésolithique appartient à l'haplogroupe U5a2a. Les individus du Chalcolithique et de l'Âge du Bronze appartiennent aux haplogroupes H1, T2b, U5b, R0 et U3a. L'individu de la période Romaine tardive appartient à l'haplogroupe H. Les haplogroupes H1, T2b et U5b sont largement distribués en Europe aujourd'hui, ainsi que dans la population ancienne d'Europe. Si T2b est maximal en Italie aujourd'hui, H1 et U5b ont leur plus haute fréquence aujourd'hui dans la région Franco-Cantabrique. L'individu Mésolithique représente la plus ancienne occurrence de U5a en Europe Occidentale. L'haplogroupe U3a qui semble prendre racine au Proche-Orient, s'est probablement diffusé en Europe avec les fermiers du Néolithique.

Les auteurs ont ensuite effectué une Analyse en Composantes Principales pour comparer ces résultats avec les autres populations anciennes d'Europe. Dans la figure ci-dessous, les populations pré-Néolithiques sont représentées par des croix, les populations Néolithiques par des disques, les populations du Chalcolithique par des triangles et les populations de l'Âge du Bronze par des carrés. Le groupe formé par le seul individu du Chalcolithique et par les individus de l'Âge du Bronze de la grotte de Santimamiñe est représenté par un astérisque: Snt-BrCh. HGNI est le groupe des chasseurs-cueilleurs du Nord de la péninsule Ibérique. Il inclut l'individu de la grotte de Santimamiñe:
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La figure ci-dessus montre que les chasseurs-cueilleurs du Nord de la péninsule Ibérique se regroupent avec les chasseurs-cueilleurs d'Europe Centrale (HGC). Le groupe de la grotte de Santimamiñe du Chalcolithique et de l'Âge du Bronze se rassemble avec les autres groupes Ibériques notamment les fermiers Néolithiques du Pays Basque et de Navarre (NBQ) et le groupe Chalcolithique de El Portalón (A-Por). De manière générale, les populations Néolithiques et Chalcolithiques du Nord de la péninsule Ibérique sont plus proches des populations de chasseurs-cueilleurs que les autres populations Européennes. Seul le groupe Chalcolithique de El Mirador (A-Mir) est plus éloigné. Cette proximité est due à la plus grande persistance de l'haplogroupe U dans les populations Ibériques à partir du Néolithique.

Les auteurs ont ensuite analysé 158 séquences mitochondriales appartenant à la population composée des quatre villages entourant la grotte de Santimamiñe. Dans cette population, les haplogroupes les plus remarquables sont H1j1 et U5b1f1a qui incluent les deux haplotypes les plus fréquents de cette population. Ils ont été décrits comme des sous-clades locales à la région Franco-Cantabrique. Parmi les 158 individus de la population étudiée, 18 (11,4%) appartiennent à la sous-clade H1j1, et 8 (5,1%) appartiennent à l'haplogroupe U5b1f1a. Les auteurs ont ensuite positionné sur un arbre en réseau, les haplotypes des individus anciens et actuels de la région de la grotte de Santimamiñe:
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Les individus anciens sont identifiés par des flèches. Même s'il n'y a pas de correspondance exacte entre individus anciens et actuels, certains haplotypes sont cependant très proches et appartiennent à des branches communes. Ces résultats supportent une certaine continuité génétique depuis le Mésolithique dans la région Franco-Cantabrique, au moins sur les lignées maternelles.