Le Xinjiang situé dans le nord ouest de la Chine a longtemps été un carrefour important pour les migrations venues de l'ouest ou de l'est. Dès l'Âge du Bronze, cette région a hébergé différentes cultures venues des steppes, de Sibérie, d'Asie centrale ou du nord est de l'Asie.

Wenjun Wang et ses collègues viennent de publier un papier intitulé: Ancient Xinjiang mitogenomes reveal intense admixture with high genetic diversity. Ils ont séquencé le génome mitochondrial de 237 anciens individus du Xinjiang datés entre l'Âge du Bronze et la période historique. Parmi ces individus, il y en a 63 de l'Âge du Bronze, 128 de l'Âge du Fer et 46 de l'époque historique:

2021_Wang_Figure1.jpg, avr. 2021

Les auteurs ont effectué une Analyse en Composantes Principales basée sur la fréquence des différents haplogroupes. Dans la figure ci-dessous la première composante sépare les populations occidentales (à gauche) et orientales (à droite), alors que la seconde composante sépare les populations du nord (en haut) et du sud (en bas). Les différentes populations se regroupent en quatre clusters principaux: Asie du nord est (en bleu clair), Asie du sud est (en rose), Steppe Centrale (en marron) et Europe (en vert). L'ensemble des anciens individus du Xinjiang se situent sur un gradient qui relie les Européens aux Asiatiques du nord est:

2021_Wang_Figure2A.jpg, avr. 2021

De manière intéressante, les anciens individus de la culture Afanasievo se regroupent avec les populations des steppes, alors que ceux de la culture de Chemurchek ou du site de Songshugou au nord du Xinjiang, sont décalés vers la droite. Ces individus de l'Âge du Bronze sont caractérisés par une forte fréquence des haplogroupes U, H et R. Les individus de la culture de Chemurchek ont également une connexion avec l'Asie du nord est via la présence de l'haplogroupe D4j. Les anciens individus de l'Âge du Bronze de l'est du Xinjiang sont localisés encore plus vers la droite sur la PCA. Ils sont caractérisés par une forte proportion de l'haplogroupe D et une faible proportion de l'haplogroupe U. Les anciens individus du site de Xiaohe situé au sud est du Xinjiang sont caractérisés par une très forte proportion de l'haplogroupe C4 caractéristique des populations de Sibérie.

De manière générale, les anciens individus de l'Âge du Fer présentent une plus forte diversité génétique que les anciens individus de l'Âge du Bronze du Xinjiang. Ce résultat suggère d'importants mélanges génétiques durant l'Âge du Fer. Sur la PCA les anciens individus de l'Âge du Fer du nord du Xinjiang se regroupent proche des populations de l'Asie du nord est. Ils sont caractérisés par la présence des haplogroupes D et F. Les anciens individus de l'Âge du Fer de l'est du Xinjiang comme les individus du site de Shirenzigou daté de l'Âge du Fer et situé à l'est des montagnes du Tianshan se situent proche génétiquement des individus de l'Âge du Bronze du nord de la Chine (site archéologique de Qijia), bien qu'ils apparaissent dans des positions différentes sur la PCA, à cause de la plus forte proportion de l'haplogroupe U chez les individus de Shirenzigou (40%) que chez ceux de l'est du Xinjiang (22%). Les individus de l'est du Xinjiang possèdent également l'haplogroupe T2d1 caractéristique des populations du Touran en Asie centrale. Enfin les populations de l'Âge du Fer de l'ouest du Xinjiang se regroupent avec les populations du centre des steppes (Sakas et Huns). Ils sont caractérisés par la présence des haplogroupes U (20,4%), H (18,5%), C (14,8%) et D (11,1%). Enfin les individus du site archéologique de Zaghunluq (SZGLK_IA) situé au sud du Xinjiang montrent une connexion avec les steppes et l'Asie Centrale. Ils ont une forte proportion des haplogroupes C (25%) et D (25%), mais aussi H (26%) et U (5%). La présence de l'haplogroupe N1a fréquent parmi les fermiers du Néolithique Européen, est aussi à noter.

Les individus du Xinjiang de la période historique sont proche génétiquement des individus de l'Âge du Fer de la même région, suggérant une forte continuité génétique durant ces périodes.

En résumé, cette étude suggèrent plusieurs migrations et événements de mélanges génétiques. Au début de l'Âge du Bronze, des populations occidentales arrivent dans le nord du Xinjiang. Plus tard durant l'âge du Fer, cette région présente plus de connexions avec l'Asie du nord est. A l'ouest du Xinjiang, il y a une certaine continuité génétique entre l'Âge du Bronze et l'Âge du Fer, avec la présence des haplogroupes U5, H15, C4, G2 et D4. Il y a également une connexion avec le Touran et la région de la rivière Ili. L'est du Xinjiang montre toujours plus d'affinité génétique avec l'Asie du nord est, bien que l'on trouve également des haplogroupes occidentaux suggérant des migrations venues de l'ouest. Enfin le sud du Xinjiang montre plus d'affinité occidentale bien que le site d'altitude de Jierzankale situé au sud ouest du Xinjiang montre des connexions avec le nord est de l'Asie.