L'ADN ancien issu des os, des dents ou des cheveux a révolutionné notre compréhension de l'histoire de l'homme. Lorsque des restes humains ne sont pas disponibles, des études précédentes ont montré qu'il était possible d'extraire de l'ADN ancien à partir des sédiments, notamment dans les grottes.

Pere Gelabert et ses collègues viennent de publier un papier intitulé: Genome-scale sequencing and analysis of human, wolf, and bison DNA from 25,000-year-old sediment. Ils ont extrait de l'ADN ancien à partir de sédiments issus de la grotte Satsurblia située au sud du Caucase, et datés d'environ 25.000 ans. Ils ont ainsi récupéré de l'ADN humain, de loups et de bisons à partir de ces sédiments:

2021_Gelabert_Figure1A.jpg, juil. 2021

Les auteurs ont commencé par extraire le génome mitochondrial. Ils ont ainsi obtenu une séquence mitochondriale pour l'homme avec une couverture x10, pour le loup avec une couverture x13 et pour le bison avec une couverture x8. L'étude de la diversité permet de voir si ces séquences appartiennent à un ou plusieurs individus pour chacune des espèces. Pour l'homme la probabilité d'avoir plusieurs individus est faible, mais non négligeable (environ 4% des séquences appartiendraient à un autre individu) . Elle est certaine pour le loup. Pour le bison la moindre qualité des résultats obtenus ne permet pas de conclure.

Toutes les séquences humaines appartiennent à l'haplogroupe mitochondrial: N. Dans la figure ci-dessous, l'échantillon humain principal obtenu dans cette étude est nommé SAT29:

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La comparaison du chromosome X avec les autres chromosomes permet de dire que l'individu SAT29 est une femme. Pour le loup et le bison le résultat n'est pas tranché indiquant ainsi que les auteurs ont obtenu pour chacune de ces deux espèces, le génome de plusieurs individus des deux sexes.

L'analyse des séquences mitochondriales obtenues permet d'estimer la date de ces génomes. Ainsi la femme est datée d'environ 28.500 ans, les loups sont datés d'environ 28.250 ans, et le bison de 21.900 ans. Ces résultats sont en accord avec la datation radiocarbone de la couche contenant les sédiments analysés. Cette datation est comprise entre 25.500 et 24.200 ans.

Les auteurs ont ensuite réalisé une Analyse en Composantes Principales pour comparer l'ancien génome de l'échantillon SAT29 avec d'autres anciens génomes d'Eurasie. Dans la figure ci-dessous SAT29 est représenté par un triangle rouge avec la pointe vers le haut. Il se trouve a proximité du génome de l'ancien individu de la grotte Dzuzuana (carré rouge) située également dans le Caucase et daté de la même époque, mais un peu plus loin des autres ancien individus du Caucase plus récents des grottes Satsurblia (13.300 ans) et Kotias (9700 ans) (cercle et carré rose):

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Ces résultats sont confirmés par le logiciel ADMIXTURE:

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La statistique f3 montre que SAT29 partage plus d'allèles avec les individus de Dzuzuana2 et Villabruna. Ces résultats suggèrent que les individus du Caucase d'avant le maximum glaciaire ont contribué à différentes populations d'Eurasie post glaciaires. Enfin l'analyse montre que SAT29 contient environ 1% d'ADN de Néandertal, ce qui est peu par rapport à d'autres anciens individus Eurasiens. Ce résultat est du à la forte proportion d'ascendance Basal Eurasienne contenue chez SAT29.

L'analyse des génomes des anciens loups de cette étude, montre que ces derniers ont divergé de la branche des canidés anciennement, avant la séparation des chiens et loups actuels. Ces résultats sont en accord avec le résultat précédent qui a montré que la diversité génomique actuelle des loups date d'après le dernier maximum glaciaire:

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L'analyse des génomes des anciens bisons de cette étude montre qu'ils sont plus proches des bisons d'Eurasie que des bisons d'Amérique:

2021_Gelabert_Figure5B.jpg, juil. 2021