Le plateau Tibétain a une altitude moyenne de 4000 mètres. Il couvre la région autonome du Tibet et la province Qinghai de la Chine. L'agriculture arrive dans les régions à haute altitude il y a 3600 ans en provenance de sa frontière nord-est. On ne sait pas si cette arrivée est liée à une diffusion culturelle ou suite à la migration d'une population.

Manyu Ding et ses collègues viennent de publier un papier intitulé: Ancient mitogenomes show plateau populations from last 5200 years partially contributed to present-day Tibetans. Ils ont séquencé l'ADN mitochondrial de 73 anciens individus issus de 27 sites archéologiques situés sur le plateau Tibétain:

2020_Ding_FigureS1.jpg, mar. 2020

Les auteurs ont obtenu des résultats pour 67 des échantillons. Parmi ces individus, deux partagent le même haplotype sur le site de Hejiatai et six individus partagent deux haplotypes sur le site de Zongri. Deux individus des sites de Hualongqunke et Guidehexi partagent également le même haplotype, ainsi que deux individus des sites de Xiaoenda et Hualongqunke. Les auteurs ont ensuite regroupé les échantillons en deux clusters selon s'ils sont issus d'un site à haute (HTP) ou à plus basse altitude (LTP). Le groupe HTP comprend 12 individus et le groupe LTP 55. De plus les auteurs ont ajouté dans le groupe HTP, huit individus issus du papier de Jeong et al de 2016, datés entre 3150 et 1250 ans. Les auteurs ont comparés l'ADN mitochondrial de ces 75 anciens individus avec celui de 4656 personnes actuelles appartenant à 137 populations d'Asie du nord, d'Asie centrale, d'Asie de l'est, d'Asie du sud et d'Asie du sud-est. De manière générale les anciennes populations du plateau se regroupent avec les populations actuelles du Tibet.

Pour explorer si d'anciens haplogroupes du plateau se retrouvent aujourd'hui dans la population Tibétaine, les auteurs ont construit des réseaux par haplogroupe. Ils ont ainsi mis en évidence deux haplogroupes pour lesquels le réseau est en forme d'étoile avec un ancien individu en son centre supposé comme centre de la diffusion. Le premier réseau est celui de l'haplogroupe D4j1b qui montre une diffusion de LTP vers HTP. Le centre est occupé par un individu vieux de 4750 ans du site de Zongri. Il diffuse notamment vers un ancien individu à haute altitude vieux de 2775 ans et vers un Tibétain actuel:

2020_Ding_Figure1g.jpg, mar. 2020

Le second réseau est celui de l'haplogroupe M9a1a1c1b1a qui montre une diffusion dans le groupe à haute altitude à partir de 2125 ans, vers deux anciens individus un peu plus récent vieux de 1500 et 1100 ans, ainsi que vers un Tibétain actuel:

2020_Ding_Figure1h.jpg, mar. 2020

Les auteurs ont ensuite testé différents modèles démographiques pour déterminer si les populations actuelles du plateau Tibétain descendent seulement des anciennes populations de la région ou d'autres sources extérieures. Les méthodes classiques ne permettent pas de discriminer entre les différents modèles. Les auteurs ont donc utilisé l'intelligence artificielle et l'apprentissage profond pour mieux résoudre le problème. Les résultats indiquent que le modèle le plus probable est un modèle qui implique une certaine continuité génétique de la lignée maternelle sur le plateau Tibétain depuis 5200 ans, mais avec cependant une contrepartie extérieure. Ainsi une population s'est déplacée des régions à plus basse altitude vers les régions à haute altitude entre 4750 et 2775 ans. Cela correspond à l'arrivée de l'agriculture dans les régions à haute altitude. Une explication de la composante externe dans l'ascendance des populations actuelles du Tibet, pourrait être l'arrivée d'une population de chasseurs-cueilleurs dans les régions à haute altitude avant l'arrivée de l'agriculture.