Après la dispersion de l'homme moderne hors d'Afrique entre 50.000 et 70.000 ans, celui-ci apparait en Europe entre 45.000 et 40.000 ans avant de remplacer l'homme de Neandertal. Les résultats génétiques des premiers Eurasiens ont été apportés notamment par le génome de quatre individus ancien: Ust’-Ishim en Sibérie de l'Ouest daté de 45.000 ans, Kostenki en Russie daté entre 39.000 et 36.000 ans, Fumane 2 en Italie daté entre 41.000 et 39.000 ans et Peştera cu Oase en Roumanie daté entre 42.000 et 37.000 ans. Les analyses de génétique des populations basées sur l'ADN mitochondrial suggèrent que parallèlement à l'occupation de l'Europe, des populations se sont dispersées en Afrique du Nord à partir d'Eurasie.

Montserrat Hervella et ses collègues viennent de publier un papier intitulé: The mitogenome of a 35,000-year-old Homo sapiens from Europe supports a Palaeolithic back-migration to Africa. Ils ont analysé l'ADN mitochondrial d'un fossile issu de la grotte Peştera Muierii en Roumanie daté autour de 35.000 ans. En comparant les résultats obtenus avec ceux de deux Néandertaliens, deux Dénisoviens et six génomes anciens Eurasiens d'Homo Sapiens, les auteurs ont montré que ce fossile était celui d'un homme moderne. Ce fossile n'est pas associé à une culture archéologique bien définie puisque des restes lithiques Moustériens et Aurignaciens ont été trouvés à proximité.

La séquence complète de l'ADN mitochondrial a été obtenu et présente 15 SNPs de différence avec la séquence de référence rCRS. Elle appartient à l'haplogroupe U6* avec une mutation supplémentaire à la position T10517A:
2016_Hervella_Figure1B.jpg

Cet haplogroupe se retrouve principalement en Afrique du Nord-Ouest aujourd'hui comme le montre la figure ci-dessous (voir également ce papier):
2016_Hervella_Figure2.jpg

Sa présence actuelle en Europe est expliquée par des migrations en provenance d'Afrique soit pendant l'expansion Islamique, soit à des influences plus anciennes notamment à partir du Néolithique.

L'appartenance de l'individu de Peştera Muierii à la base de l'haplogroupe U6 indique que l'origine de cet haplogroupe se trouve bien en Eurasie avant de se disperser principalement en Afrique du Nord, mais aussi en faible quantité en Europe. L'âge du plus récent ancêtre commun des individus U6 est estimé à environ 35.300 ans à partir des séquences contemporaines. Cette séquence de Peştera Muierii datée de 35.000 ans montre qu'il est probablement plus vieux. Les auteurs de cette étude ont utilisé une calibration basée sur six anciens individus d'Eurasie pour montrer que l'haplogroupe U6 est probablement âgé d'environ 49.600 ans en utilisant un taux de mutations de 2.06*10−8.

Commentaires

  • Le fossile analysé dans cette étude correspond à celui de l'individu 1 retrouvé dans la grotte Peştera Muierii. De manière intéressante le papier récent de Fu a donné le génome de l'individu 2 de cette même grotte située en Roumanie. Celui-ci était également de l'haplogroupe mitochondrial U6* avec deux délétions et la même mutation T10517A. Il est donc possible que ces deux fossiles appartenait en réalité au même individu, surtout qu'ils sont datés approximativement à la même date. Le papier de Fu donnait une date de 33.000 ans.
  • Je suis un peu sceptique sur l'estimation donnée par les auteurs pour l'âge de l'haplogroupe U6 autour de 49.600 ans, sachant notamment que l'individu analysé ne compte qu'une seule mutation en plus de l'haplogroupe U6. Cet âge est probablement plutôt situé entre 40.000 et 35.000 ans.